Sans recensement depuis plus de 30 ans, personne n’est en mesure de déterminer le nombre exact d’habitants en République démocratique du Congo (RDC). Une absence de données qui fait polémique en période électorale, mais qui pose également la question du développement du pays, qui possède l’un des taux de fécondité les plus élevés du monde.
80 ou 85 millions d’habitants ? A quelques millions près, le chiffre de la population congolaise reste inconnu. Dans une note récente de l’Ifri, “la République démocratique du Congo face au défi démographique”, le géographe Roland Pourtier s’est penché sur ce sujet hautement sensible en RDC. En effet, le manque de données démographiques pèse lourdement sur les nombreuses crises électorales du pays. L’absence de recensement depuis 1984 a fait l’objet de violentes tensions, en 2015, lorsque le gouvernement a souhaité conditionner la tenue des élections de 2016 à l’organisation d’un vaste comptage de la population.
Pour l’opposition, il s’agissait d’une simple manoeuvre pour retarder la présidentielle à laquelle le président sortant, Joseph Kabila, ne pouvait pas se représenter. Selon plusieurs experts, le recensement se serait étalé sur plusieurs mois, voir plusieurs année, repoussant ainsi le scrutin. De violentes manifestations réprimées dans le sang avaient fait reculer le pouvoir, ce qui n’a pas empêché Joseph Kabila de reporter par deux fois la présidentielle de 2016, qui devrait finalement se tenir en décembre 2018.
Confusion pré-électorale
L’absence de recensement avait déjà fait polémique pendant la présidentielle de 2011. La réélection contestée de Joseph Kabila avait laissé apparaître un fichier électoral douteux, truffé d’anomalies. En 2017, la Commission électorale (Ceni) a procédé à la révision de ce fichier. Selon la Ceni, le nombre des enrôlés a fortement augmenté dans certaines provinces. Une augmentation qui laisse planer le doute sur la rigueur et les intentions de Ceni. “Les écarts considérables entre provinces d’un enrôlement à l’autre vont de 0,86 % dans le Nord-Ubangi, à 84% dans le Sankuru ! Que le nombre d’enrôlés à Kinshasa ait augmenté de 35%, est plausible étant donné la croissance démographique vigoureuse de la capitale congolaise, mais qu’il l’ait été de 41% au Mai-Ndombe est peu vraisemblable”, estime Roland Pourtier. Et sans chiffres exacts sur la répartition de la population, il devient également difficile de précéder à la répartition des sièges des députés de l’Assemblée nationale
La guerre des chiffres cristallise une bonne partie des contestations de l’opposition congolaise. “Les principaux bastions de l’opposition ont perdu des sièges, note le chercheur, quatre pour chacune des anciennes provinces de l’Équateur et du Kasaï occidental, deux pour le Bandundu. L’ex-Katanga en revanche en gagne deux. Le tripatouillage électoral n’est certes pas une spécificité congolaise, mais le manque de données raisonnablement fiables concernant les effectifs et la répartition de la population ajoute à la confusion”.
Un inquiétant boom démographique
Si les données manquent pour extrapoler les chiffres de la population dans les années à venir, “toutes les sources convergent pour faire de la RDC un des pays connaissant la plus forte croissance démographique au monde, un de ceux où l’expression «explosion démographique » trouve tout son sens”, s’inquiète Roland Pourtier. Selon “Léon de Saint Moulin” et “World Population Prospect”, la population congolaise, estimée à 81,3 millions en 2017, pourrait être de… 197 millions en 2050 ! “Les observations sur le terrain et les images satellitaires témoignent de la rapidité de l’urbanisation, à tous les niveaux statistiques, de la petite ville aux agglomérations millionnaires, la croissance de ces dernières étant particulièrement spectaculaire” explique la note de l’Ifri.
A ce boom démographique s’ajoute un taux de fécondité particulièrement élevé. La RDC fait partie des 5 pays au monde où ce taux dépasse, en 2017, 6 enfants par femme. Cette question est “fondamentale pour l’avenir du Congo” selon le géographe, et impacte fortement le développement futur du pays. La Banque mondiale évalue le PIB par habitant à 450 dollars en 2016, soit moins qu’en 1980 en dollars constants. Pour le chercheur, “le prétexte qu’au Congo «il y a de la place», ce qui est vrai sauf aux frontières orientales, ne saurait occulter l’impact économique, social et environnemental de l’accroissement, sur un rythme exceptionnellement rapide, du nombre des hommes”.
“Il faut sans cesse répéter que la marche vers l’émergence n’a aucune chance d’aboutir sans accélération de la transition démographique, c’est-à-dire sans une diminution aussi rapide que possible du taux de fécondité” prévient Roland Pourtier. Une baisse de la fécondité qui passe obligatoirement par un meilleur accès à la contraception. Pour le moment, seules 19% des Congolaises ont recours à la contraception. Des pays y sont parvenus, comme la Tunisie ou l’Iran, “même avec le carcan de l’islam”. La RDC, comme l’ensemble de l’Afrique tropicale peut y parvenir, conclut Roland Portier. “Il n’y a pas de malédiction dans l’histoire. Mais le temps presse”.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Toute cette discussion sur la démographie galopante me paraîttait pertinente s’il y avait d’une part un gouvernement responsable qui planifie l’avenir, et si d’autre part il n’y avait pas cette volonté manifeste des pays voisins, équipés par les puissants de ce monde, d’effacer le peuple congolais de sa terre. Le genocide se poursuit depuis octobre 1996 sans desamparer et sans que les grandes puissances s’en émeuvent. Ce que l’on entend le plus souvent c’est la protection des pauvres gorilles de montagne, trésor de l’humanite Entière. Mais le genocide des congolais aujourd’hui à Béni et au Kasai, hier et encore aujourd’hui en Ituri, à Masisi, Rutshuru, au Nord-Katanga, et j’en passe vont sans doute dans l’optique de ce qu’on appelle la communauté internationale de dépeupler le Congo-Kinshasa. C’est pourquoi, avant de parler de la démographie galopante, il faut parler de la protection du peuple congolais contre les tueurs de tout bord.