A un peu plus d’un an de la présidentielle de 2015, International Crisis Group (ICG) s’inquiète des inégalités d’accès à la terre dans un pays à forte densité démographique. ICG préconise une profonde réforme foncière afin d’éviter de nouveaux conflits.
Au Burundi, petit pays rural d’Afrique centrale, agricole à 90%, l’Etat peine à reconstruire son économie après une longue guerre civile qui a fait 300.000 morts entre 1993 et 2006. Comme un partout dans la région des Grands lacs, les conflits fonciers constituent la principale source d’insécurité et de violence dans le pays. Selon Crisis Group, le Burundi est confronté à la raréfaction de la terre « sous le coup de la croissance démographique« , mais aussi à l’épineux problème des terres à restituer aux réfugiés et aux déplacés qui ont été spoliés pendant les années troubles.
Absence d’indépendance de la justice
Dans un rapport publié en février 2014 (1), International Crisis Group (ICG) pointe la « mauvaise gouvernance foncière » du Burundi. La grande réforme foncière prévue par les accords d’Arusha de 2000 « n’a abouti qu’à une réformette bien en deçà des attentes et des problèmes » note ICG. Le rapport dénonce les inégalités d’accès à la terre, notamment pour les femmes, mais aussi la disparition des mécanismes traditionnels de régulation des conflits, permettant de régler les litiges à l’amiable. Mais c’est le manque d’indépendance de la justice qui préoccupe Crisis Group. Selon le centre de recherche, « les ingérences de l’exécutif dans le secteur judiciaire s’opèrent parfois de manière tout à fait ouverte (…) Les juges apparaissent régulièrement comme partiaux ou corrompus aux yeux de la partie perdante« .
Un accès à la terre plus égalitaire
Afin de « canaliser des conflits« , le rapport souhaiterait notamment la pérennisation d’initiatives comme celle des « cliniques juridiques« , des structures de médiation foncière portées par la société civile. ICG recommande également une nouvelle stratégie de développement rural « vers un droit et un accès à la terre plus égalitaires« , mais aussi une « campagne nationale de sensibilisation au règlement pacifique des querellles foncières« .
Eviter les conflits futurs
A plus d’un an de la prochaine élection présidentielle de 2015, de nombreux défis sont encore à relever pour le Burundi. Le climat politique est toujours extrêmement tendu et la nouvelle loi sur la presse, jugée liberticide, inquiète les partenaires du Burundi. Pour apaiser les tensions, la mise en place de la Commission Vérité et réconciliation, prévue par les accords d’Arusha, est toujours en souffrance. La relance de l’économie constitue également un important chalenge. En octobre 2012 à Genève, les bailleurs de fonds s’étaient engagés à verser 2 milliards d’euros pour rebooster l’économie burundaise. Une promesse sans suite pour le moment. Pour toutes ces raisons, une grande réforme du secteur foncier apparaît indispensable pour le Burundi, afin de calmer le ressentiment des populations et d’éviter de « probables futurs conflits« , prévient Crisis Group.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
(1) Le rapport d’International Crisis Group : « les terres de la discorde : la réforme foncière au Burundi » est accessible ici. Un second rapport sur le même thème intitulé « restitution et réconciliation au Burundi » vient également d’être publié sur cette page.