Rien n’y fait. Malgré les différents dispositifs de lutte, la corruption s’est aggravée en République démocratique du Congo (RDC), selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime. Le conseiller anti-corruption des Nations unies, en visite à Kinshasa, pointe « le manque de volonté politique (…) au plus haut niveau de l’Etat« . Difficile à chiffrer, la corruption coûterait entre 400 et 800 millions de dollars à la RDC.
Avec un score de 2 sur 10 sur l’échelle de perception de la corruption, l’ONG Transparency international place la République démocratique du Congo (RDC) au 168ème rang sur 182, des pays les plus corrompus de la planète. La corruption y est même qualifiée « d’endémique« . En RDC, les surcoûts associés à la corruption se chiffrent entre 30 à 40% de la valeur de la transaction, alors qu’ils ne sont que de 10 à 30% dans le reste de l’Afrique (1). Dans le pays, 90% de l’économie est dite « informelle » et seulement 400.000 comptes bancaires sont ouverts pour pratiquement 70 millions d’habitants.
Selon l’économiste congolais, Oasis Kodila Tedika, la corruption est inscrite dans les moeurs du Congo et touche toutes les strates de la société. L’économiste s’est penché sur le phénomène, en analysant l’impact de la corruption sur les transports en RDC. Les chauffeurs de taxi payent régulièrement différentes « taxes« , « droits de passages » ou « pourboires » aux forces de sécurité congolaises. Ces pertes peuvent aller jusqu’à 60% des revenus moyens des chauffeurs de taxi.
Au niveau de l’Etat, Oasis Kodila Tedika, estime que 55% des recettes échappent au Trésor congolais à cause de la fraude fiscale liée à la corruption. Le manque à gagner serait estimé à 800 millions de dollars, soit environ 12% du PIB du pays.
La corruption fait aussi des ravages au plus haut sommet de l’Etat. En 2009, un rapport de l’Assemblée nationale congolaise avait épinglé le gouvernement d’Adolphe Muzito en dénonçant la « dilapidation des finances publiques« . 23, 7 millions de dollars s’étaient évaporés lors de la signature d’un contrat avec un consortium chinois pour avoir accès aux gisements de cuivre et de cobalt appartenant à l’entreprise d’Etat, la Gécamines. La commission demandait aussi le remboursement de 68 millions de dollars de créances douteuses à une banque privée et 25 autres millions à une société qui avait livré du matériel « inadéquat » à la MIBA, pour l’extraction du diamant.
En 2010, le gouvernement congolais a décidé de mettre en oeuvre pas moins de 45 mesures pour lutter contre la corruption (codes miniers et forestiers, processus de Kimberley… ). La « tolérance zéro » est ensuite proclamée par le président Joseph Kabila pour lutter contre l’impunité… visiblement sans effet.
Le rapport du conseiller anti-corruption des Nations unies, en visite à Kinshasa, ne laisse entrevoir aucun progrès en matière de lutte anti-corruption. « Les résultats ont été mitigés. L’une des raisons majeures est le manque de volonté politique pour lutter contre la corruption, même au plus haut niveau de l’Etat », a affirmé le professeur Muzong sur Radio Okapi.
Le fonctionnaire onusien dénonce également « le dysfonctionnement du secteur judiciaire qui a fait que même les gens qui sont attrapés la main dans le sac peuvent s’en tirer à très peu de frais ». Le dernier rapport « Doing Business » 2012 sur le climat des affaires dans le monde, place la RDC 181ème sur 183. Le pays a perdu 2 places cette année.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia