Un projet journaliste original propose sur internet une série de témoignages photographiques sur le quotidien des populations du Kivu, en conflit depuis 20 ans.
Alors qu’une nouvelle page se tourne à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) avec la fin de la rébellion du M23, un projet journaliste voit le jour sur internet. Local Voices rassemble dans une série de 7 publications des témoignages et des photographies sur la vie quotidienne des populations du Kivu, en proie aux milices et à la violence armée.
Le projet a été initié par deux journalistes belges, Alexis Bouvy et François Van Lierde et soutenu par deux ONG spécialistes dans les conflits armés : Search For Common Ground et International Alert. Local Voices redonne la parole aux sans voix de la guerre qui secoue l’Est de la RDC depuis bientôt vingt ans. Devant l’objectif on retrouve tous les acteurs du conflits : seigneurs de guerre, miliciens, mais aussi femmes réfugiées, enfants ou autorités locales.
Un site internet est entièrement dédié au projet Local Voices et permet de consulter les différents reportages proposés. Le 5 décembre, jour de lancement du site www.localvoicesproject.com, une première publication sera mise en ligne, intitulée « Masisi, la blessure du Kivu« . Suivront 6 autres reportages autour des milices, de la terre, de l’identité et de portraits de jeunes activistes de la paix.
Chaque publication est articulée autour d’un travail photographique d’une grande qualité qui nous plonge dans le quotidien des populations du Kivu : groupes armés, Etat défaillant, tensions ethniques… Pour Alexis Bouvy, directeur du projet et cofondateur de Local Voices, il s’agit avant tout de « rendre la parole à des populations qui n’ont aucune opportunité de raconter leur expérience des conflits armés, d’exprimer leurs préoccupations, leurs difficultés, leurs frustrations et leurs peurs. »
Les témoignages des Congolais recueillis apporte en effet un nouvel éclairage sur un conflit complexe et multiforme. Un leader communautaire du Nord-Kivu, à Goma, explique : « notre drame, c’est que les groupes armés se créent soi-disant pour défendre leur communauté, alors que ce sont ces mêmes groupes armés qui finissent par tuer leur propre communauté. » Ou encore cet activiste de la société civile du Nord-Kivu, à Goma : « tous nos problèmes [de conflits armés] sont venus de la mauvaise gouvernance. On a réussi à officialiser chez nous la culture de la corruption« .
Local Voices propose également dans ces publications un travail journalistique de décryptage du conflit. Dans sa première publication sur le territoire de Masisi, Alexis Bouvy dresse un bilan sans complaisance du mode de gouvernance du Congo : « Les groupes armés sont le fruit d’un système politique corrompu et défaillant qui, sous les apparats de la démocratie et d’élections pluralistes, cache (difficilement) des logiques prédatrices, brutales et violentes« . A bon entendeur.. Rendez-vous donc sur le site de Local Voices pour découvrir une approche très humaine du conflit du Kivu : www.localvoicesproject.com.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia