Une enquête de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) accuse le pouvoir congolais d’avoir « instrumentalisé » les violences au Kasaï et dénonce « des crimes contre l’humanité ».
Loin des radars médiatiques et des préoccupations de la communauté internationale, le conflit « à bas bruit » des Kasaï a pourtant jeté près de deux millions de déplacés sur les routes de République démocratique du Congo (RDC). C’est la volonté de reprise en main des pouvoirs locaux par Kinshasa dans ces provinces du centre du pays qui a rapidement tourné au conflit. L’événement déclencheur de la spirale de la violence a été l’assassinat pendant l’été 2016 du chef coutumier Kamuina Nsapu. Depuis, sa milice affrontent les forces de sécurité et l’armée régulière. Un conflit largement orchestré par le pouvoir central, son armée régulière, sa police et sa milice supplétive Bana Mura. Le niveau de violence a atteint un degré jamais égalé dans cette province, réputée calme, mais depuis toujours acquise à l’opposition. Peu de chiffres circulent sur ces violences inédites dans le centre de la RDC. L’église catholique estime à 4.000 le nombre de morts depuis fin 2016, mais la découverte de plus de 87 fosses communes fait craindre un bilan plus important – voir notre article.
Un chaos organisé
Une enquête très documentée de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) auprès de Congolais réfugiés en Angola apporte un éclairage cru sur les massacres commis par les milices Kamuina Nsapu et par les forces de sécurité congolaises dans les Kasaï – voir le rapport complet. L’ONG les qualifient « de crimes contre l’humanité » et accuse le pouvoir du président Joseph Kabila d’avoir instrumentalisé le conflit à des fins politiques en « organisant le chaos ». Kinshasa a d’ailleurs saisi l’opportunité des violences dans la province pour retarder l’enregistrement des électeurs et reporter pour la seconde fois l’élection présidentielle, alors que le mandat du président Kabila s’est achevé le 19 décembre 2016. Un « prétexte » qui permet à Joseph Kabila de s’accrocher au pouvoir.
Des attaques préméditées et planifiées
Villages détruits, attaques de lieux de culte, tortures, mutilations, viols… la majorité des exactions commises au Kasaï l’a été par les forces de sécurité congolaises. Pour la FIDH, il n’y a aucun doute, ces exactions constituent bien « des crimes contre l’humanité ». Selon Tchérina Jerolon, directrice adjointe pour l’Afrique de la FIDH « l’ampleur des crimes commis, leur préméditation, leur planification et le caractère ethnique des massacres sont des éléments constitutifs du crime contre l’humanité ». L’avocate Safya Akorry, qui a participé à l’enquête en Angola, dénonce « les attaques généralisée, systématiques et ciblées contre les populations Luba ». « Les villages étaient encerclés par les forces de sécurité ou les milices Bana Mura, alors que les populations non-Luba, visiblement prévenues de l’attaque, avaient quitté le village », explique l’avocate.
Les autorités ont été alertées
Les témoignages recueillis par la FIDH démontrent enfin que les autorités congolaises étaient informées en permanence de ce qui se passaient dans les Kasaï et des exactions commises par leurs propres troupes. « Des médecins de l’hôpital du village de Cinq ont alerté le gouverneur de la province, lui ont envoyé des SMS auxquels il a répondu, des articles de journaux locaux sont sortis dans la presse au moment des massacres du village de Cinq. Il y avait donc le moyen pour les autorités congolaises de savoir que des crimes étaient perpétrés » témoigne Tchérina Jerolon. « Des représentants de la Direction générale des migrations (DGM) ont alerté leurs supérieurs hiérarchiques… sans résultat. Ensuite, des réunions se sont tenues avant les massacres auxquelles participaient des chefs coutumiers proches du pouvoir et des membres de l’armée, de la police ou des services de renseignements. Et enfin, des témoignages prouvent que certains responsables politiques ont clairement soutenu les exactions des forces de sécurité. ».
Une liste de 50 noms transmise à la CPI
« Kinshasa savait, tout le monde savait ce qui se passait, jusqu’au gouverneur de la province, Alex Kande » tempête Paul Nsapu. Des agents de l’Agence nationale de renseignements (ANR), réfugiés en Angola, ont également confirmé à la FIDH que toutes les informations sur les Kasaï remontaient à Kinshasa. Mais pour l’instant aucune enquête de la justice congolaise ne s’est penchée sur les responsables des exactions dans les Kasaï. Pourtant, à l’issue de leur rapport, la FIDH a compilé une liste d’une cinquantaine de noms « de présumé responsables des crimes commis sur le territoire de Kamonia » au Kasaï. Une liste qui sera notamment transmise aux experts de l’ONU qui enquêtent au Congo, ainsi qu’au bureau de la Cour pénale internationale (CPI) qui suit de près la situation congolaise.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Le gouvernement Kabila à été impliqué plusieurs massacres en RDC y compris celui du nord Kivu où plus de 3000 personnes ont été égorgé , tué par les machettes ,des haches ,des femmes violées ,des maisons et hôpital pillé et brûler.
À béni ville et territoires ces massacres continue jusqu’au jour d’aujourd’hui tout ça pour justifier qu’il est difficile d’organiser les élections sous l’insécurité. À Beni il a créé des faux Adf pour exécuter les carnages de la population.
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Il ne faut pas penser à une enquête de la part de la CPI ni de la Communauté Internationale.On a déjà enregistré des cas plus graves dans ce pays mais passés aux oubliettes en l’espace de quelques jours car l’actualité est très riche dans ce pays et les cas d’aujourd’hui effacent les anciens de la mémoire collective.Et ainsi de suite
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