La justice militaire a requis la peine de mort contre l’ex-chef de l’Etat pour ses liens avec la rébellion de l’AFC/M23. Un bannissement politique censé affaiblir l’opposition, mais pas sans risques.

L’addition est lourde pour l’ancien président congolais. En exil, et donc absent du box des accusés, la justice militaire a requis la peine de mort pour Joseph Kabila, et l’Etat congolais a réclamé plus de 20 milliards de dollars de dommages et intérêts et la saisie de ses comptes bancaires. La liste des infractions reprochées à l’ex-président est longue comme le bras : « crimes de guerre », « trahison », « organisation d’un mouvement insurrectionnel », « apologie de crimes de guerre », ou « complot ». Joseph Kabila est surtout accusé de tirer les ficelles de l’AFC/M23, le mouvement rebelle soutenu par le Rwanda, qui occupe désormais une bonne partie du Nord et Sud-Kvu, dont les deux principales villes, Goma et Bukavu. C’est d’ailleurs la venue de Joseph Kabila fin mai à Goma, qui a accéléré la mise en accusation de l’ancien président. Pourtant, cela faisait des mois que le pouvoir congolais, le président Félix Tshisekedi en première ligne, accusait Joseph Kabila d’être « le vrai commanditaire de l’AFC/M23 », dirigée par un de ses proches, Corneille Nangaa. Les multiples sorties médiatiques, dans lesquelles Joseph Kabila fustigeait le pouvoir congolais, avaient apporté de l’eau au moulin de Kinshasa pour faire de l’ancien chef de l’Etat une cible privilégiée.
21 milliards de dollars de « compensation »
L’essentielle de l’accusation repose sur les déclarations d’un membre de l’AFC/M23, Eric Nkuba, interpellé en Tanzanie et condamné à mort. Selon ses aveux, Joseph Kabila était en « contact soutenu » par téléphone avec Corneille Nangaa. Au cours d’une conversation, il aurait même conseillé à l’ancien président de la Commission électorale de chasser Félix Tshisekedi du pouvoir par un coup d’Etat plutôt qu’en l’assassinant et en faire un héros national. L’Etat congolais, qui s’est constitué partie civile, réclame 21 milliards de dollars de « compensation » pour les préjudices causés par les pillages, les destructions, et les pertes de recettes causées par l’occupation des territoires par les rebelles de l’AFC/M23. Sans surprise, le procureur militaire a réclamé la peine de mort pour l’ancien président, tout comme avaient été condamnés Corneille Nangaa et les principaux cadres de la rébellion, en août 2024.
Ennemi public numéro un
Depuis leur rupture d’alliance contre-nature fin 2020, Joseph Kabila est devenu, petit à petit, la bête noire de Félix Tshisekedi à mesure que la situation sécuritaire se dégradait à l’Est du pays. Le retour des rebelles du M23 au Nord-Kivu en 2022 et la déroute de l’armée congolaise, ont considérablement crispé Kinshasa et affaibli Félix Tshisekedi. L’arrivée de Corneille Nangaa, un proche de Kabila, dans l’organigramme de la rébellion et son objectif revendiqué de vouloir marcher sur la capitale pour faire tomber le régime, ont fini de faire de l’ancien président l’ennemi public numéro un, qui serait prêt à tout pour reprendre le pouvoir. Dès lors, certaines des résidences de l’ancien président et de ses proches ont été perquisitionnées ou vandalisées, son parti politique, le PPRD, a été interdit dans les médias et ses cadres interrogés par la justice.
Purge dans l’armée, réputée proche de Kabila
Mais Joseph Kabila est surtout soupçonné d’avoir conservé un important réseau de fidèles au sein de l’armée congolaise. Félix Tshisekedi, qui n’avait aucune connexion dans les services de sécurité à son arrivée au pouvoir, n’a jamais réussi à s’imposer chez les militaires. Pour preuve, les multiples remaniements dans la chaîne de commandement, et les arrestations récentes d’officiers supérieurs, jusqu’au très puissant responsable de la maison militaire, Franck Ntumba, ou à l’ancien chef d’état-major, Christian Tshiswewe, tous deux en prison. La purge a également écarté une soixantaine d’officiers, tous originaires du Katanga, comme Joseph Kabila, et accusés d’être encore proches de l’ancien chef de l’Etat.
Affaiblir l’opposition
Politiquement, le bannissement de Joseph Kabila de la vie politique congolaise, permet à Kinshasa de couper l’herbe sous le pied à l’opposition qui réfléchit à une grande alliance qui pourrait aller de Moïse Katumbi à Matata Ponyo, en passant par Delly Sessanga, Franck Diongo… jusqu’à Joseph Kabila. En échec militaire à l’Est, Félix Tshisekedi est également poussé au dialogue politique par l’opposition, mais aussi par les Eglises catholique (Cenco) et protestante (Ecc), qui réclament un dialogue national pour apaiser les tensions. La stratégie du camp présidentiel consiste à mettre hors-jeu Joseph Kabila et à assimiler tous ceux qui le rallieraient à des « traîtres » en collusion avec la rébellion. Félix Tshisekedi ne veut pas du dialogue national de la Cenco et de l’Ecc et préfère en choisir lui-même le cadre et le format, si le dialogue doit finalement avoir lieu. Le chef de l’Etat a dernièrement resserré les rangs au sein de l’Union sacrée, en recomposant sa gouvernance.

Mauvais signal
La stratégie de diabolisation de Joseph Kabila n’est pas sans risques pour Félix Tshisekedi. Personne n’est dupe sur le caractère éminemment politique du procès Kabila. Sa condamnation à mort peut transformer l’ancien président, que les Congolais ont majoritairement voulu voir partir en 2018, en victime de Félix Tshisekedi, et le remettre en selle politiquement. Risque également de polariser davantage une société congolaise au bord de l’implosion. Ce procès constitue enfin un mauvais signal alors que la RDC et l’AFC/M23 sont à la recherche d’un consensus pour finaliser un accord de paix au point mort. Mais Kinshasa semble décidé à éliminer politiquement le Raïs du paysage congolais. Le 30 juin dernier, jour de l’indépendance, la télévision nationale (RTNC) avait retiré Joseph Kabila de la galerie de portraits des anciens présidents congolais. Au milieu de Kasa-Vubu, Mobutu, Kabila père et Tshisekedi, Joseph Kabila avait été tout simplement été effacé de l’Histoire du Congo. Un effacement qui ne fera pas oublier aux Congolais les 18 ans de pouvoir sans partage de Joseph Kabila. Un règne fait de corruption, de prédation et de répression sanglante, qui devrait sans doute faire l’objet d’un procès… Le vrai procès de Joseph Kabila.
Christophe Rigaud – Afrikarabia
Celui qui compte tuer kabila, va tout d’abord nous passer par le corps
Quel ahurissant spectacle!
Ainsi, la justice militaire congolaise vient de decouvrir que quelqu’un qui a dirige leur pays pendant 18 ans n’etait pas congolais! Really?
Quel spectacle d’auto-humiliation? Ainsi pendant 18 ans, tous les services de renseignements, toute l’élite congolaise ne voyait rien, n’entendait rien et bien sur ne disait rien quand « un Rwandais diriigeait leur pays! Tout le monde ne savait rien, on était dans le noir complet. Peut être entrain de danser.
Si c’est ainsi, posez-vous la question: Etes-vous vtaiment capables de mener/diriger ce pays? Et si tout simplement, l’élite congolaise n’était pas à la hauteur? Affligeant tout simplement.