L’ONU demande aux autorités congolaises d’assurer le retour et de protéger l’opposant congolais, en exil forcé. Une décision qui a poussé Moïse Katumbi a annoncé son retour « imminent » au pays… mais sans en préciser la date.
Le délicat retour de Moïse Katumbi à Kinshasa se précise. Ce n’est pas la première fois que l’opposant congolais, en exil en Europe depuis plus d’un an, annonce son prochain retour au pays. En février, lors d’une messe en hommage à Etienne Tshisekedi, mais aussi en mai et maintenant en juin, Moïse Katumbi a déjà promis son come-back « pour bientôt » ou « imminent » au Congo. Ce vendredi, l’ancien gouverneur du Katanga n’a toujours pas donné de date, mais estime qu’il sera rapidement de retour en République démocratique du Congo (RDC), « le temps de faire mes valises et de dire au revoir à mes amis ». Si le riche homme d’affaires reste aussi évasif sur le jour de son départ, c’est qu’il joue gros en revenant à Kinshasa.
Moïse Katumbi risque en effet de se faire interpeller dès sa descente d’avion. L’opposant a été récemment condamné à trois ans de prison pour une rocambolesque affaire immobilière et reste accusé « d’atteinte à la sûreté de l’État » pour avoir tenté de recruter des mercenaires. Des ennuis judiciaires qui coïncident étrangement avec sa déclaration de candidature à la présidence de la République. Depuis 13 mois, Moïse Katumbi s’est exilé en Europe avec l’accord des autorités congolaises, qui se débarrassent ainsi du principal adversaire au président Joseph Kabila.
« Règlement de compte politique »
Katumbi et ses proches dénoncent régulièrement le « harcèlement judiciaire » de Kinshasa et une justice « instrumentalisée » dans le seul but d’empêcher l’ancien gouverneur de briguer la magistrature suprême. Depuis son exil belge, Katumbi tente alors de faire pression sur les autorités congolaises pour pouvoir retourner en RDC sans passer par la case prison. La très respectée Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco), partie prenante de la médiation entre la majorité et l’opposition dans la crise politique congolaise, a demandé plusieurs fois au pouvoir de cesser ce « règlement de compte politique » et de tout faire pour que le riche homme d’affaires puissent « rentrer libre au pays ». Mais rien n’y fait. Les timides mesures de « décrispation politique » de Kinshasa oublient volontairement de statuer sur le cas de l’ex-gouverneur du Katanga et le gouvernement, à l’image du ministre des Affaires étrangères, Léonard She Okitundu sur France24, continue de déclarer que Katumbi sera arrêter « dès son retour en RDC. »
Après l’appel de la Cenco pour un retour de Katumbi « en homme libre » à Kinshasa, le second round se déroule le 2 juin à Genève devant le Comité des droits de l’Homme de l’ONU. Moïse Katumbi, assisté du ténor du barreau parisien, Eric Dupond-Moretti, dépose une requête contre l’Etat pour « de nombreuses violations des droits fondamentaux (…), procès arbitraires » et l’arrestation de partisans de l’ancien gouverneur. L’objectif affiché est de forcer les autorités congolaises à « protéger » le candidat Katumbi lors de son retour en RDC. La procédure est longue, mais le camp Katumbi espère ainsi faire bouger les lignes. Une première réponse du Comité des droits de l’Homme ne se fait pas attendre.
« Participer librement et en toute sécurité aux élections »
Le 13 juin, l’opposant et son avocat reçoivent une missive de Genève. Il ne s’agit pas d’une condamnation de l’ONU, mais de recommandations à l’Etat congolais. Le Comité estime que les autorités congolaises doivent « garantir (le) droit à la liberté et à la sécurité en protégeant (Moïse Katumbi) contre toute forme d’arrestation ». Mais aussi de « prendre toutes les mesures nécessaires en vue d’assurer que (Moïse Katumbi) puisse rentrer et participer librement et en toute sécurité, en tant que candidat, aux élections présidentielles prévues pour la fin 2017 ». Une petit victoire que savourent les soutiens à l’homme d’affaires, mais qui n’obligent en rien Kinshasa à accéder aux demandes du Comité.
Fort du soutien des Nations unies, Moïse Katumbi a donc convoqué une conférence de presse ce vendredi à Paris, dans les bureaux de Me Dupond-Moretti. L’opposant y a annoncé une nouvelle fois son retour « imminent » pour Kinshasa. Une bonne occasion pour remettre la pression sur les autorités congolaises. Mais pour autant, le retour de Katumbi est-il si « imminent » que cela ? Rien n’est moins sûr. On peut en effet douter que l’ancien gouverneur remettent sa sécurité entre les mains de Kinshasa dès son pied posé sur le tarmac de l’aéroport. Car si Katumbi redoute d’être jeté en prison dès son arrivée, il craint également pour sa vie. « Vous avez remarqué que les opposants disparaissent facilement au Congo. Je ne serai pas une victime de plus d’un régime d’assassin » a-t-il confié récemment à La Libre Belgique. Une trentaine de ses proches croupissent actuellement en prison depuis son passage dans l’oppostion. Me Dupond-Moretti a précisé que « pour que la sécurité soit efficace, nous allons saisir la Monusco », la mission des Nations unies au Congo, jugeant que « cette lettre ne suffit pas, surtout si la RDC n’envisage pas de la respecter » (ce qui sera vraisemblablement le cas).
La Monusco sollicitée
Question timing, la Monusco risque d’être lente au démarrage, d’autant plus que son responsable à Kinshasa, Maman Sidikou, semble actuellement plutôt enclin à ne pas vouloir froisser les autorités locales. Le patron de la Monusco est d’ailleurs régulièrement critiqué par la société civile congolaise, qui l’accuse d’être « trop proche du pouvoir ». Et enfin, dernier élément qui risque de repousser le retour rapide de Moïse Katumbi à Kinshasa : l’ONU donne deux mois à l’État congolais « pour réagir à la requête que le Comité lui a transmis. » Un délai qui pourrait rendre la Monusco « impuissante » pendant ce long laps de temps.
Mais pour Moïse Katumbi, le temps presse. L’ancien gouverneur ne peut plus rester en dehors du pays alors que deux dossiers chauds agitent la politique congolaise : la spirale de la violence qui perdure dans les Kasaï et l’organisation des élections qui prend un dangereux retard. Candidat à la présidentielle, Katumbi doit ensuite affirmer son leadership sur le Rassemblement de l’opposition, une plateforme hétéroclite qui bat de l’aile avec la mort d’Etienne Tshisekedi en février et le débauchage de cadres de l’UDPS dans le nouveau gouvernement. Prêt à partir pour Kinshasa, Moïse Katumbi prendra-t-il le risque de poser le pied à l’aéroport de Kinshasa sans risque pour sa sécurité ? Telle est la question. Pour le moment, sans l’assurance d’une protection de la Monusco, autant dire que l’homme d’affaires donnerait l’impression de se jeter dans la gueule du loup.
Katumbi ne peut manquer son rendez-vous avec la rue
Mais peut-être que l’ancien gouverneur espère pouvoir très prochainement tenir l’une de ses promesses : rentrer à Kinshasa avec la dépouille d’Etienne Tshisekedi. Protéger par le corps de l’opposant historique et par des journalistes internationaux, qu’il a d’ailleurs invité à le suivre à Kinshasa, Katumbi pourrait sans doute échapper à une arrestation à sa descente d’avion. C’est sans doute ce que cherchent à organiser les proches de l’ex-gouverneur avec la famille Tshisekedi, puisque le lieu de l’inhumation du « Sphinx de Limete » semble avoir été fixé dans la commune de N’Sele à Kinshasa. Reste ensuite à garantir sa sécurité dans le temps et sur l’intégralité du territoire congolais… et là seule une protection internationale peut lui en donner l’assurrance.
Moïse Katumbi doit pourtant faire vite. Les opérations d’enrôlement des électeurs prennent du retard et le financement du processus électoral est loin d’être bouclé. Et si l’ancien gouverneur du Katanga et président du club de foot TP Mazembe veut occuper le premier poste d’opposant face au président Kabila, comme il l’affirme, il se doit d’être présent sur le terrain auprès de ses partisans. A Paris, Moïse Katumbi a d’ailleurs lancé un ultime avertissement à Kinshasa et donné rendez-vous dans la rue aux Congolais : « Des actions vont reprendre à partir de juillet si le calendrier électoral n’est pas publié. » Cet été, la Commission électorale (CENI), qui n’a toujours pas publié son calendrier, doit avoir terminer la révision complète de son fichier… et c’est plutôt mal partie. Si Moïse Katumbi appelle les Congolais à se mobiliser, il se doit d’être à leurs côtés.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Moise Katumbi, le peuple congolais de la RDC vous attend à bras ouvert. Venez pour le libérer de cet fantôme Président, rwandais. Courage ! ! !
Reviens Moise avec ou sans la protection de la MONUSCO, nous peuple sommes là, même si on t’arrête nous serons avec toi en prison chaque jour car tu incarnes en toi le changement et l’alternance.
Kinshasa vous attends.