Alors que les affrontements se multiplient au Nord-Kivu entre l’armée congolaise et le M23, Paul Kagame et Félix Tshisekedi renouent avec la guerre des mots en attendant un possible retour des négociations à Nairobi.

Depuis l’annulation de la rencontre entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame à Luanda, le 15 décembre dernier, pour signer un accord de « neutralisation des FDLR », assorti d’un retrait des troupes rwandaises, les armes ont de nouveau parlé au Nord-Kivu. Les offensives rebelles du M23, appuyé par le Rwanda, se sont succédées aux contre-offensives de l’armée congolaise et de leurs supplétifs Wazalendo. La rébellion s’est étendue vers le Nord de la province, dans le Lubero, vers l’Ouest en direction du Masisi en occupant la cité de Masisi-Centre, puis en tentant une poussée vers la province voisine du Sud-Kivu pour rallier des groupes alliés amis. De son côté, l’armée congolaise a lancé une importante campagne de contre-offensives, principalement dans le Masisi, en reprenant le contrôle de Ngungu et en stoppant l’avancée rebelle autour de Sake et en direction du Sud-Kivu. Ce week-end, le M23 a repris l’avantage en faisant tomber la cité minière de Lumbishi à la frontière du Masisi et du Sud-Kivu.
Un rapport de force toujours en faveur du M23
En l’absence de toute perspective diplomatique et d’accord entre la RDC et le Rwanda après l’échec des pourparlers de Luanda, le M23 et les autorités congolaises ont donc décidé de privilégier la solution militaire. Kinshasa refusant toute négociation directe avec le M23, et Kigali conditionnant désormais son retrait à un dialogue entre le gouvernement congolais et la rébellion, faisant par la même occasion voler en éclats un cessez-le-feu qui n’a jamais vraiment été respecté. Malgré les récents succès militaires des FARDC, le rapport de force ne s’est pas vraiment inversé sur le terrain. Sans un retrait des forces rwandaises qui, selon le dernier rapport de l’ONU, apportent un soutien militaire décisif en hommes et en armes sophistiquées, on ne voit pas comment l’armée congolaise peut venir à bout de la rébellion. Du côté du M23, on a également l’impression que les rebelles ne sont plus vraiment en mesure de conquérir de nouveaux territoires sans fragiliser les zones déjà sous son contrôle. La prise de Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu, par le M23 apparait aujourd’hui comme un objectif qui n’est plus souhaitable, trop coûteux militairement et diplomatiquement pour son parrain rwandais.
Retour de la guerre des mots
Alors faute de pourparlers et dans l’attente de la possible reprise du second processus de paix piloté à Nairobi par l’ancien président kényan, Kenyatta, le vide diplomatique a laissé la place à une guerre des mots entre Tshisekedi et Kagame. Ce n’est pas la première fois que les deux présidents échangent des propos acerbes. Depuis le retour du M23, Félix Tshisekedi a déjà comparé Paul Kagame à Hitler, puis a affirmé vouloir entrer en guerre avec le Rwanda et enfin souhaiter que l’Afrique se débarrasse « de ce genre de dirigeants ». De son côté, le président rwandais n’a pas été avare de critiques à l’encontre de Félix Tshisekedi, qui serait « capable de tout, sauf de mesurer les conséquences de ce qu’il dit ». Concernant une possible guerre de la RDC contre le Rwanda, Kagame a rétorqué : « Si vous cherchez quelqu’un qui s’y connaît, venez me voir ! », et s’est déclaré prêt à se battre « si nécessaire avec la RDC ». Après une accalmie dans les joutes verbales pendant la dernière ligne droite des pourparlers de Luanda, voici les deux présidents de nouveau dans l’escalade verbale.
Tshisekedi « n’a jamais été élue, à deux reprises »
Le premier à dégainer est Paul Kagame devant les représentations diplomatiques à Kigali. Absent à Luanda, et présenté par Kinshasa comme celui qui a fait échouer la signature de l’accord, le chef de l’Etat rwandais est passé à l’offensive. Peu disert sur le dossier congolais, dont le conflit est peu relayé au Rwanda, Kagame était très en verve devant les diplomates étrangers à propos de Tshisekedi : « Je sais reconnaître les leaders quand je les vois. Je sais aussi reconnaître les idiots. Vous pouvez imaginer la combinaison des deux, le désastre que cela produit ». Selon lui, le chef de l’Etat congolais est responsable du conflit et surtout vainqueur d’une élection frauduleuse : « La personne qui est en train de causer des problèmes dans la situation que j’évoque, entre le Rwanda et la RDC, n’a jamais été élue, à deux reprises. Et vous le savez ». Concernant la guerre au Nord-Kivu, Paul Kagame s’est également interrogé. « Pouvez-vous m’expliquer pourquoi les FDLR sont au Congo et sont en train d’être aidés par le gouvernement du Congo qui a aussi apporté le Burundi sous la même idéologie, soi-disant pour combattre le M23 ? ».
Des élections rwandaises scénarisées
La réponse du berger à la bergère ne s’est pas fait attendre. Félix Tshisekedi s’est également exprimé devant les ambassadeurs accrédités à Kinshasa. Sur la question visiblement sensible de son élection de 2018, le président congolais en a profité pour louer la vitalité démocratique congolaise, et de tacler au passage le processus électoral rwandais. « En RDC, nous avons fait le choix irréversible de bannir la dictature et de construire une démocratie véritablement inclusive. Contrairement à d’autres pays où les élections s’apparentent à des répétitions d’un scénario pré-écrit avec des adversaires soigneusement choisis d’avance pour garantir un résultat inchangé, le processus électoral congolais est un espace ouvert ». Il faut dire que le président Kagame a, en effet, été élu avec le score « soviétique » de 99,18%, qui laisse peu de place aux voix dissonantes. Félix Tshisekedi en a aussi profité pour rappeler que tout dialogue avec le M23 était à exclure et constituait « une ligne rouge » qu’il ne franchirait jamais.
Le grand flou de Nairobi
Le dialogue de sourds entre Kinshasa et Kigali pourrait trouver une nouvelle porte de sortie à Nairobi. Ce processus de pourparlers entre les groupes armés et le gouvernement congolais était au point mort depuis plusieurs mois, laissant la place à celui de Luanda entre la RDC et le Rwanda. Après l’échec de la médiation angolaise, les espoirs se tournent maintenant vers l’ancien président kényan, Uhuru Kenyatta, qui pilote le processus. Le hic, c’est que personne ne sait ce qui est sortie de ces pourparlers, quels groupes armés y sont éligibles ? Le M23, exclu par Kinshasa, y retournera-t-il ? Le grand flou règne autour des négociations de Nairobi, d’autant que certains groupes qui y participaient ont rejoint les FARDC au sein de la coalition de groupes armés Wazalendo, alors que d’autres ont rallié le M23. Les espoirs sont donc minces et les armes ne sont pas prêtes de se taire, l’objectif étant d’arriver en position de force, le jour où il faudra se mettre autour de la table… et négocier.
Christophe Rigaud – Afrikarabia
Ngungu has been recaptured by M3 3 days ago 100%
M23 is not going to accept any discussion that is involving these military groups (Wazalendo) will Never, ever.
DRC needs peace. Only Congolese can make peace among themselves.
UN experts reports will not be of help. Experts of what? For who?
Only a Narrative they want to shape. No chance. The land in question belongs to the Congolese of Kinyarwanda speaking. The leader of experts knows it very well she originated from Belgium – country that put in place the frontiers.