Après presque quarante ans de dictature puis d’élections truquées, le pouvoir a dû reconnaître la victoire de Linyon Demokratik Seselwa (LDS), la coalition de l’opposition, qui appelait à en finir avec prédation et gabegie.
Linyon Demokratik Seselwa (LDS, « L’Union démocratique seychelloise », en créole) vient de remporter les élections législatives qui ont eu lieu dans cet archipel de l’Océan Indien les 8, 9 et 10 septembre. Avec 49,65 % des suffrages exprimés, le LDS obtient 15 des 25 districts. De son côté, Lepep (« Le Peuple », en créole, l’ex-parti unique au pouvoir depuis le coup d’Etat marxiste de 1977), n’a réussi à conserver que 10 sièges à l’Assemblée nationale avec 49.28% des suffrages. Pour la première fois depuis le retour officiel au multipartisme en 1993, les trucages, achats de cartes d’électeurs, charcutage des circonscriptions et usage éhonté des moyens publics par Lepep n’ont pas suffi à pérenniser l’oligarchie au pouvoir à Victoria, la capitale des Seychelles. (lire nos précédents articles). Les abus étaient tels qu’aux élections législatives de 2011 l’opposition avait boycotté le scrutin.
Un régime politique inspiré des Etats-unis
« Les résultats que vient d’annoncer la Commission électorale sont historiques pour notre pays, et je ressens une certaine fierté » a confié Roger Mancienne, l’un des leaders politiques du LDS. La victoire de l’opposition n’a pas été contestée par le rségime de James Michel. Ce dernier avait été réélu avec seulement 195 vois d’avance en décembre dernier.
Deux groupes internationaux d’observation suivaient l’élection : la Communauté de développement d’Afrique australe (Southern African Development Community, SADC) et l’Union africaine (UA). L’équipe d’observation de la SADC était composée de dix-neuf personnes venant de huit pays membres de la SADC. De son côté, l’Union africaine avait envoyée une équipe d’observation composée exclusivement de femmes, dirigées par la diplomate rwandaise Fatuma Ndangiza, qui est dans son pays la secrétaire exécutive de la commission nationale unité et Réconciliation.
L’opposition et le président Michel font assaut d’amabilités
Les élections législatives sont régies par un processus complexe aux Seychelles. La dispersion du pays de 92 000 habitants sur 150 îles et îlots (dont les deux tiers habités, répartis sur plus d’un million de kilomètres carrés), nécessite que le scrutin s’étale sur trois jours. Vingt-cinq députés sont élus dans autant de circonscriptions par scrutin uninominal majoritaire à un tour.
Huit autres députés sont élus en se basant sur le pourcentage des voix reçues par chaque parti. Pour chaque 10% de l’ensemble des votes exprimés, un parti obtient un siège supplémentaire.
En définitive, Linyon Demokratik Seselwa aura 19 sièges et Lepep 14 sièges à l’Assemblée nationale.
Cependant, si l’opposition prend le contrôle du Parlement, le pouvoir exécutif restera dans les mains de James Michel, qui est à la fois chef de l’Etat et du gouvernement, comme aux Etats-Unis.
« Je suis content d’entendre que l’opposition est prête à se joindre au gouvernement pour mettre en avant ces valeurs pour que notre pays puisse continuer de progresser, a dit James Michel. Mon espoir est que cet esprit de consultations se perpétue dans la nouvelle Assemblée nationale, où nous travaillerons tous ensemble pour le bien commun de notre nation. »
Une promesse dont la sincérité est mise en doute par beaucoup, après quarante années de crimes, prédations et abus divers.
Jean-François DUPAQUIER (avec AFP, agence Belga et Seychelles News Agency)