Emmanuel Macron a annoncé une aide de 1,5 milliard d’euros et la promesse de la réouverture de l’aéroport de Goma en clôture de la conférence sur la paix dans la région des Grands Lacs. Une occasion pour Paris de se repositionner sur le dossier congolais et de remettre en selle la médiation de l’Union africaine.

Comment exister face aux initiatives diplomatiques lancées par les poids lourds que sont les Etats-Unis et le Qatar pour ramener la paix au Congo ? La France tente un repositionnement en co-organisant avec le Togo, médiateur de l’Union africaine (UA), une conférence en soutien à la paix dans la région des Grands Lacs. La porte d’entrée choisie par Paris pour reprendre pied dans le dossier congolais est humanitaire, en se proposant de combler le déficit de financement de l’aide à la RDC. Depuis la défection des Etats-Unis avec l’arrêt des financements de l’USAID, le plan de réponse de l’ONU n’est actuellement financé qu’à hauteur de 16 %. Du pain béni pour Paris et sa soixantaine de contributeurs qui se sont donc faits forts de venir combler les manquements américains.
1,5 milliard d’euros et la promesse de la réouverture de l’aéroport de Goma
Sur ce volet humanitaire, la conférence a rempli ses objectifs. Emmanuel Macron a promis « plus d’1,5 milliard d’euros d’assistance pour les populations les plus vulnérables », répondant au-delà des besoins minimums affichés par les ONG consultées, « bien qu’une partie soit en réalité un recyclage d’engagements anciens » a tout de même tempéré Luc Lamprière, le directeur du Forum des ONG internationales en RDC (FONGI). Second satisfecit pour les humanitaires : la réouverture annoncée de l’aéroport de Goma, fermé depuis la prise de contrôle de la ville par les rebelles de l’AFC/M23 en janvier dernier. L’aéroport, fortement endommagé par les combats, ne sera réouvert que pour des vols humanitaires, de jour et pour des avions petits porteurs. Le président français a également annoncé la création de corridors humanitaires sans en donner plus de détails.
Revenir dans le jeu… avec l’Union africaine
Sur la réouverture de l’aéroport de Goma, le ministre des Affaires étrangères rwandais, qui représentait le président Paul Kagame absent, est venu apporter un bémol de taille. Pour Olivier Nduhungirehe, l’aéroport étant sur un territoire contrôlé par l’AFC/M23, sa réouverture doit être discutée avec les rebelles dans le cadre des négociations de Doha avec les autorités congolaises et le médiateur qatari. Une position qui sera confirmée par l’AFC/M23 plus tard dans la soirée, démontrant qu’il sera difficile de réouvrir l’accès à l’aéroport de Goma d’un coup de baguette magique, les négociations de Doha étant au point mort depuis plusieurs mois. Paris a tout de même réussi à trouver un trou de souris pour revenir dans le jeu. L’autre atout de Paris pour se repositionner sur le dossier congolais est l’Union africaine, co-organisatrice de la conférence. Largement marginalisée après les échecs des processus de paix de Nairobi et Luanda, l’Union africaine pourrait, elle aussi, s’impliquer davantage dans le dossier. Poussée par Paris pour reprendre un rôle de médiateur actif, l’UA a également une carte à jouer face à l’enlisement des processus diplomatique de Washington et Doha. Jusque-là, Faure Gnassingbé et ses co-médiateurs avaient brillé par leur absence sur le dossier congolais.

Concurrence sur les projets économiques
La conférence de Paris ne sera un succès qu’en garantissant un suivi sérieux des initiatives de la conférence. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, en a convenu, assurant qu’il y a aura « une traçabilité et un suivi attentif des décaissements ». L’offensive diplomatique de Paris a également bien pris soin de ne pas froisser les initiatives américaine et qatarie. Le conseiller Afrique de Donald Trump, Massad Boulos, était bien présent à Paris, et la médiation des deux pays a été saluée par les organisateurs de la conférence. Pourtant, on peut s’interroger sur l’efficacité de cet empilement d’initiatives diplomatiques, sans réelle coordination, où chacun des acteurs essaie de tirer les bénéfices de son implication. En parallèle de la conférence pour le soutien à la paix, un volet économique était discuté pendant le Forum de Paris pour la paix, sur les opportunités d’investissements dans la région des Grands Lacs. Des projets miniers, énergétiques, d’infrastructures sont sur la table. Souvent les mêmes qui apparaissent dans le deal américain « business contre sécurité » qui est toujours en attente de signature à Washington entre la RDC et le Rwanda. On pense notamment au projet de barrage hydroélectrique Ruzizi III, au coeur de nombreuses convoitises. Une concurrence loin d’être saine qui risque de parasiter les chances de paix.
Christophe Rigaud – Afrikarabia





 
				 
				 
				 
				 
				 
				 
				 
				 
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