Après plus d’un mois d’état de siège dans l’Est de la République démocratique du Congo, le Baromètre Sécuritaire du Kivu (KST) constate une dégradation de la sécurité et une augmentation des exactions commises par l’armée congolaise.
Depuis l’entrée en vigueur de l’état de siège, décrété par le président Félix Tshisekedi le 6 mai dernier, la communication gouvernementale tourne à plein régime sur « les succès » et « les victoires » engrangés par les Forces armées congolaises contre les groupes armés dans l’Est du pays. Plusieurs localités ont été reprises aux rebelles, des axes routiers ont été sécurisés, des membres de groupes armés ont été capturés, d’autres éliminés, certains ont déposé les armes… Ces annonces cachent pourtant un premier bilan nettement plus mitigé de l’état de siège, voulu pour Félix Tshisekedi pour ramener la paix en Ituri et au Nord-Kivu.
55 morts en une nuit
Dans une note publiée par le Baromètre Sécuritaire du Kivu (KST), Pierre Boisselet révèle que « la sécurité des civils s’est en réalité globalement dégradée dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri ». En mai, le Baromètre a enregistré 223 morts contre 198 en avril. Ironie du sort, c’est en plein état de siège qu’a été enregistrée la journée la plus meurtrière. Dans la nuit du 30 au 31 mai, 55 civils ont été massacrés à Boga et Tchabi, sur le territoire d’Irumu. A Beni, la dégradation de la situation sécuritaire est encore plus nette : 74 civils ont été tués en mai, contre 47 en avril. Autre paradoxe, le Baromètre Sécuritaire du Kivu n’a pas enregistré une réelle augmentation de l’activité des FARDC depuis le début de l’état de siège : 29 affrontements en mai contre 26 en avril.
Gare aux effets d’annonce
Le Baromètre Sécuritaire du Kivu note également que certains succès annoncés par le gouvernement sont en fait antérieurs à l’Etat de siège. C’est notamment le cas de la pacification de l’axe Mbau-Kamango à Beni. Selon le Baromètre, « la réouverture de cet axe avait déjà été annoncée en septembre 2020 par le ministre de la Défense de l’époque et aucun incident n’a été enregistré sur cet axe par le KST en 2021. Difficile d’en attribuer le mérite à l’état de siège… »
Pourtant, l’armée congolaise a remporté de réelles victoires sur le terrain : le contrôle de la N27, « où les incidents s’y sont raréfiés ». « Les FARDC ont également repris la ville de Nyakunde, près de Marabo (territoire d’Irumu) et divers villages alentour aux Chini ya Kilima-FPIC. Onze miliciens ont été tués et quatorze arrêtés. Mais il est difficile de savoir si cette offensive est véritablement liée à l’état de siège : elle a débuté le 2 mai, soit après l’annonce de la mesure, mais avant son entrée en vigueur. »
Pas d’opérations communes avec la Monusco
L’état de siège n’a pas non plus modifié les relations, toujours délicates, entre l’armée et la Monusco. Pierre Boisselet, le coordonnateur du Baromètre Sécuritaire du Kivu souligne l’absence de planification et d’opérations communes FARDC/Monusco. L’ONU « semble donc pour l’instant cantonnée à réagir aux attaques de groupes armés dans le meilleur des cas ». Plus étonnant, le Baromètre révèle n’avoir enregistré aucun affrontement avec les ADF, à l’initiative de la brigade d’intervention de la Monusco (FIB) depuis … 2018.
Les FARDC sur le banc des accusés
Enfin, dernier phénomène inquiétant, les exactions des FARDC sont en augmentation depuis la mise en place de l’état de siège. « Plusieurs incidents particulièrement graves se sont produits en Ituri, constate le Baromètre Sécuritaire du Kivu. Après la reprise de la ville de Nyakunde par les Forces armés de République démocratique du Congo, ces dernières ont tué sept civils au cours d’opérations de ratissages dans le village de Nongo le 2 mai et huit dans les villages de Banikasowa, Ndenge I et II le 15 mai ». Les problèmes liés au respect des droits humains au sein de l’armée congolaise sont malheureusement anciens, note Pierre Boisselet, et ne sont pas particulièrement liés à l’état de siège.
Un soutien qui s’effrite
Très populaire, l’état de siège est largement soutenu par les Congolais, lassés par des années de conflit et de massacres sans fin. Pourtant « l’unanimité autour de l’état de siège s’est toutefois quelque peu fracturée suite aux massacres de Boga et Tchabi » analyse le Baromètre Sécuritaire du Kivu. « Après cet événement, le gouverneur militaire de l’Ituri a dû reconnaître qu’il s’était jusque-là essentiellement consacré à “l’évaluation de la situation” et la “mise en place de toutes les équipes” ». Car au-delà des simples effets d’annonce, la population attend des résultats concrets et de réelles améliorations de la situation sécuritaire à l’Est du pays.
Vers un glissement de l’état de siège
Le porte-parole du gouvernement a confirmé l’optimisme affiché par les autorités lors d’un premier bilan de l’état de siège. Mais il est aussi resté pragmatique sur les difficultés à affronter dans ce type de conflit. « Nous sommes devant une guerre asymétrique, où la cible n’est plus dans un front connu. Mais elle se noie dans la population pour y semer terreur et désolation » a constaté Patrick Muyaya. Il faudra donc davantage qu’un simple petit mois pour régler une guerre larvée qui dure depuis plus de 20 ans. D’ailleurs, le président Tshisekedi a demandé au parlement de prolonger l’état de siège de 15 jours… Un état d’exception qui risque de durer.
Christophe Rigaud – Afrikarabia
Je me demande si les interets que vous benéficiez de l’inaction et de ka guerre ne sont pas mis en difficultés pour écrire un pareil article. Les dégats collatéraux ne mandqueront pas mais la situation s’améliore. Il est triste que tu n’en fasses oas mention. La MONUsco est resté au Congo pendant 20 ans. Pour quel bilan. Ont-ils vraiment la volonté de mettre fin à cette guerre? Où bien les interets qu’ils ont au Congo compte plus que la fin de la guerre et donc la paix. Vous aurez beaucoup de la peine à voler comme il se faisait autrefois.
MDR, je parie ma tête que vous êtes un des « parlementaires débout (sous les manguiers et derrière les buissons) » de Kinshasa/Limete/10eme Rue …