Nouveau rendez-vous manqué ce week-end pour la formation très attendue du gouvernement congolais. La liste présentée par le premier ministre Sylvestre Ilunga a été rejetée une deuxième fois par le président Tshisekedi.
Tout paraissait pourtant bien huilé. Dès samedi, l’annonce de la composition du premier gouvernement de l’ère Tshisekedi semblait acquise. Le car de la RTNC, la télévision nationale, avait été réquisitionné pour couvrir en direct la remise de la liste gouvernementale par le premier ministre chez le président Tshisekedi. Avec forces photos et vidéos, le compte Twitter de la présidence congolaise avait relayé l’arrivée de Sylvestre Ilunga dans l’anti-chambre du bureau présidentiel, jusqu’à ce que… patatra… le premier ministre ressorte devant le presse quelques minutes plus tard pour avouer que sa liste avait été une nouvelle fois rejetée par Félix Tshisekedi.
Mi-août, un premier casting ministériel avait déjà été retoqué par le président congolais par manque de femmes. Cette fois-ci, officiellement, la liste est refusée pour cause de non représentativité des provinces dans l’équipe gouvernementale, et pour l’absence « d’une structure » s’occupant des personnes handicapées. Dimanche soir, le premier ministre Ilunga avait promis de revenir avec une nouvelle mouture de son gouvernement, mais en fin de soirée, Sylvestre Ilunga n’avait toujours pas fait son apparition à la cité de l’Union africaine… les derniers « réglages » nécessiteront donc encore un peu de patience.
Des noms qui coincent
En fait, c’est une cuisine beaucoup plus complexe qui a fait de la formation du gouvernement congolais un interminable feuilleton de plusieurs semaines dont seule la politique congolaise est capable. Les derniers blocages reposaient sur une liste de quelques noms de ministres imposés par Joseph Kabila et dont Félix Tshisekedi ne voulait pas. Notamment sur la présence, ou non, du dissident Modeste Bahati, en délicatesse avec Joseph Kabila, et dont l’actuel président voudrait bien se faire un allié.
Il y avait ensuite le nom du très sulfureux Kalev Mutond, ancien patron des renseignements congolais qui faisait office de police politique, et que le FCC voulait imposer au ministère de la Défense. Le hic, c’est que ce proche de Joseph Kabila était sous sanctions de l’Union européenne et des Etats-unis… une ligne rouge pour Félix Tshisekedi. Enfin, le nom de l’homme d’affaires Moïse Ekanga était proposé pour le très stratégique ministère des Mines. Ce proche de l’ancien président Kabila a été en charge des très controversés « contrats chinois » pendant de longues années. Là encore, Félix Tshisekedi a bloqué.
Etrange duo Tshisekedi-Kabila
Derrière les atermoiements et les difficultés de composition de l’exécutif congolais se cache une guerre de tranchées dangereuse entre le FCC de Joseph Kabila et CACH de Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe, une alliance contre nature que tout oppose. La leçon de ces ratés en cascade démontre qu’il n’y a visiblement aucune concertations entre le président Tshisekedi et son premier ministre ; mais surtout que Sylvestre Ilunga ne semble pas avoir la main sur la composition de sa propre équipe ministérielle. Ce n’est apparemment pas le premier ministre qui décide, mais le duo Tshisekedi-Kabila. Un étrange couple, d’accord sur rien, qui paralyse la politique congolaise depuis plus de 7 mois.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia