L’ancien chef de guerre Bosco Ntaganda a été reconnu coupable de crimes de guerre et crimes contre l’humanité par la Cour pénale internationale pour des exactions commises en 2002 et 2003 en Ituri, une région encore secouée par des violences. Mais d’autres crimes restent encore impunis.
Dix-huit chefs d’accusation ont été retenus à l’encontre de Bosco Ntaganda, l’ex-chef rebelle, pour des exactions commises en 2002 et 2003 en Ituri. Une culpabilité qui ne fait aucun doute pour la Cour pénale internationale (CPI). Le juge Robert Fremr a égrené la longue liste des crimes retenus contre l’ancien chef de guerre : massacres à caractère ethnique, actes de torture, viols, recrutement généralisé d’enfants-soldats, dont certains âgés de 7 ans seulement… Selon le jugement, « Bosco Ntaganda donnait les ordres directs de prendre pour cible et de tuer des civils, et approuvait le comportement criminel de ses soldats. »
Guerres sans fin
Le parcours de Bosco Ntaganda constitue à lui seul un effrayant condensé des guerres qui ont secoué l’Afrique centrale depuis la fin des années 1990. Né au Rwanda en 1973, Bosco Ntaganda commence sa carrière militaire dans le Front patriotique rwandais (FPR), un groupe rebelle tutsi rwandais, basé en Ouganda, qui a mis fin au génocide de 1994. Ntaganda participe ensuite à l’invasion du Congo (Zaïre à l’époque) par le Rwanda en 1996, et rejoint la rébellion du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) en 1998 lors de la « deuxième guerre du Congo ». C’est alors qu’il s’allie avec l’Union des patriotes congolais (UPC) en 2002. Un groupe armé qui prétendait défendre les intérêts du groupe ethnique Hema en l’Ituri.
Général et rebelle
Bosco Ntaganda devient alors chef des opérations militaires sous les ordres du chef de l’UPC, Thomas Lubanga, condamné en 2012 à 14 ans de prison par la CPI pour crimes de guerre. C’est pendant cette période, entre 2002 et 2003, que la justice internationale accuse Ntaganda d’être impliqué dans de nombreuses exactions. Un premier mandat d’arrêt est émis par la CPI en 2006, mais Ntaganda n’est guère inquiété par la justice puisqu’il devient général de l’armée régulière congolaise (FARDC) de 2007 à 2012. A cette date, Ntaganda reprend le chemin de la rébellion en participant à la fondation du M23, un groupe armé soutenu par le Rwanda. Le mouvement rebelle est vaincu en 2013, et Ntaganda se rend à la CPI après s’être réfugié à l’ambassade des Etats-unis au Rwanda.
L’Ituri encore en conflit
Pour sa défense, l’ancien chef de guerre a déclaré qu’il ne faut pas confondre « rebelle révolutionnaire avec un criminel ». Un argument qui a peu convaincu les ONG et la société civile congolaise qui salue la culpabilité reconnue de Bosco Ntaganda « enfin jugé » selon Ida Sawyer, la responsable d’Human Rigths Watch pour l’Afrique, qui salue « une grande victoire pour la justice et les victimes ». Mais cette victoire a un goût un peu amer, alors que 20 ans après les exactions de Bosco Ntaganda et de son groupe armé, l’Ituri est de nouveau le théâtre d’affrontements interethniques violents. Comme au temps de l’UPC de Ntaganda, les communautés Hema et Lendu se déchirent encore aujourd’hui sur fond d’instrumentalisation politique et de conflits fonciers. Les récents massacres de juin dernier en Ituri ont fait au moins 160 morts et plus de 300.000 déplacés. L’histoire semble donc se répéter à l’infini en République démocratique du Congo (RDC), et en Ituri beaucoup dénoncent l’impunité dont jouissent certains anciens chef de guerre pour expliquer les conflits à répétition dans cette région riche en or et en pétrole.
Des rebelles qui courent toujours
Au Congo, les anciens miliciens, encore en activité ou reconvertis dans l’armée régulière, sont encore nombreux. La CPI a notamment émis un mandat d’arrêt à l’encontre du général Sylvestre Mudacumura, un commandant militaire d’un autre groupe armé, majoritairement composé de Hutus rwandais et encore actif en RDC, le Front démocratique pour la libération du Rwanda (FDLR). Mais le rebelle est toujours en fuite et « des atrocités continuent d’être perpétrées, notamment dans l’Est du pays » dénonce la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH). « La CPI n’ayant plus d’enquête active en RDC, cela signifie que la situation n’est hélas plus considérée comme une priorité, compte tenu principalement des ressources limitées de la Cour » s’inquiète la FIDH.
Quid de « Tango Four » ?
L’actuel chef d‘état-major adjoint de l’armée congolaise est lui aussi dans la ligne de mire des ONG internationales. Human Rights Watch accuse le général Gabriel Amisi, alias « Tango Four », d’avoir commis de graves atrocités en 2002 à Kisangani, en tant que numéro 2 d’un mouvement rebelle. Mais là encore, l’intégration de cet ex-rebelle au plus haute fonction de l’armée régulière empêche pour l’instant la justice de faire son travail – voir notre article. L’ONG s’en remet maintenant à l’actuel chef de l‘État congolais, Félix Tshisekedi, pour qu’il démette le général de son poste afin d’être enfin jugé. Mais pour l’instant, cette demande est restée lettre morte. Et si de nombreux fantômes des guerres congolaises planent encore sans être inquiétés par la justice, les organisations des droits de l’homme s’en remettent à la CPI pour qu’elle montre l’exemple en condamnant lourdement Bosco Ntaganda. Pour l’heure, la CPI n’a pas prononcé de peine contre l’ex-milicien… elle le sera au cours d’une prochaine audience qui n’a pas encore été fixée.
Christophe Rigaud – Afrikarabia
Je répondais ailleurs à quelqu’un qui réduisait le conflit d »Ituri aux Hema comme seules victimes que c’était là une simplification dangereuse de la réalité qui risquait de remettre le feu de cette tragédie en ne désignant comme coupable qu’un camp. La paix exige de prendre la réalité comme elle est : une instrumentalisation politique des différends fonciers par des seigneurs de guerre locaux et étrangers et le Rwanda comme l’Ouganda en sont les premiers tireurs de ficelles sans oublier des complices et acteurs Congolais.
C’est pour dire que les leaders auto-proclamés des Hema comme des Lendu sont tous coupables. La preuve : Ntanganda qui vient d’être condamné à la CPI comme Katanga qui l’a été avant lui sont des Hema tandis que Ngundjolo qui l’a aussi été est Lendu.
Ainsi la paix et la stabilité en ‘Ituri exige de poursuivre les coupables à quelque bord ethnique ils appartiennent comme d’ailleurs les autres vautours tapis au sein des pouvoirs Congolais, rwandais et ougandais;
Ntaganda n’est aucunement pas congolais. Il est rwandais a 100%, a moins que quelqu’un me prouve que les Hemas ONT COMME DIALECTE LE KINYARWANDA qui est la langue officielle du Rwanda, en laquelle le Terminator NTAGANDA avait decide de s’exprimer a la CPI
RECTIFICATIF
En fait Mathieu Ngudjolo qui a été poursuivi des charges de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité à la CPI a été acquitté pour insuffisance des preuves mais ce n’est pour autant que ses crimes et ceux du Front des nationalistes et intégrationnistes (FNI) dont il était le leader ont été inexistants dans ce conflit; L’accusation n’a seulement pas présenté des preuves suffisantes pour qu’il soit condamné à l’issue de son procès. A tort ou à raison les autorités Congolaises ne l’ont pas lavé de tout soupçon et à ma connaissance le détiennent encore en détention ; normalement un autre procès l’y attend…
+ « … le MAINTIENNENT encore en détention… » ; désolé !
Une phrase très importante pour les étudiants qui préparent un PhD ou un mémoire ou une publication scientifique ou un présentation orale à un Congrès scientifique. La ligne 13: « Ntaganda participe ensuite à l’invasion du Congo (Zaïre à l’époque) par le Rwanda en 1996 ».
Ce mot INVASION a été utilisé dans nos forum de la Diaspora et est aujourd’hui RECONNU. C’est une très grande avancée.
Un bel article, bien documenté: BRAVO