Plus de 350 anciens rebelles du M23 ont été amnistiés la semaine dernière par Kinshasa qui égraine depuis maintenant 16 mois les listes de bénéficiaires. Un geste insuffisant pour l’ex-rébellion qui revendique toujours plus de 3.000 demandes d’amnisties.
Il s’agit de la plus importante liste d’amnisties d’anciens rebelles du M23 publiée depuis la loi de février 2014 en République démocratique du Congo (RDC). Plus de 350 ex-M23 sont présents sur les dernières listes d’amnisties annoncée par le gouvernement congolais – télécharger la liste ici (1) Une amnistie attribuée en échange d’un « acte d’engagement à ne pas récidiver » sur la voie de la rébellion. Selon les autorités congolaises, 220 anciens M23 amnistiés se trouvent actuellement en Ouganda et 122 autres au Rwanda. Une trentaine sont incarcérés à la prison centrale de Kinshasa et quatre sont encore en détention à Goma, à l’Est du pays, l’ancien fief du M23.
Plus de 3.000 actes d’engagement
Le nombre d’ex-M23 présents dans les pays voisins reste assez flou. 1.300 seraient présents en Ouganda et 600 au Rwanda. Mais selon les sources, ils pourraient être plus nombreux. Depuis la promulgation de la loi d’amnistie en février 2014, les ex-rebelles dénoncent régulièrement le faible nombre d’amnisties prononcé par Kinshasa. Jusque là, seuls 31 membres du M23 avaient bénéficié de cette loi, alors que 3.657 signataires (de la branche civile ou militaire) avaient paraphé l’acte d’engagement. Avec cette nouvelle vague d’amnisties, on est encore loin du compte, selon l’ex-rébellion. Pour Rigobert Amani Kabasha, porte-parole du mouvement, il s’agit « d’effets d’annonce (…) et de publicité ». « Les personnes concernées ne sont pas informées et certaines, amnistiées ou non continuent de croupir dans les geôles du pays ». Le porte-parole du gouvernement a tenu à rassurer les nouveaux bénéficiaires de l’amnistie en déclarant que « ceux qui sont en prison devraient être libérés jeudi, aux termes d’arrêtés signés par le ministre de la Justice ».
Processus de paix « en panne »
Pour justifier le faible nombre d’amnistie au sein des ex-M23, les autorités congolaises affirment que « le génocide, les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, le terrorisme, la torture, les violences sexuelles (…) sont exclus de la loi d’amnistie ». Aucun militaire rebelle de haut rang n’a encore été amnistié jusque là. Mais l’amnistie ne constitue pas l’unique engagement des déclarations de paix signées entre le gouvernement et la rébellion après la défaite du M23 fin 2013. Et là non plus le compte n’y est pas. Selon les anciens rebelles, « l’amnistie est le seul point en cours de traitement (par Kinshasa, ndrl) en 16 mois ». Dix autres engagements avaient été paraphés à Nairobi : la transformation du M23 entre parti politique, le rapatriement des anciens rebelles au Congo… Sur ces points, aucune avancée n’est encore visible. Dans un communiqué du 1er mai 2015, l’ancienne rébellion prévient : « le processus de paix, issus du dialogue de Kampala est en panne par le fait du gouvernement, qui, de ce fait, en assumera les conséquences ». Dernière incertitude sur le processus d’amnisties lancé par le gouvernement : jusqu’à quand durera-t-il ? Visiblement les autorités congolaises se donnent du temps pour distiller les noms des bénéficiaires, au gré de l’évolution de la situation sécuritaire et des perspectives de déstabilisations potentielles à l’Est.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
(1) A la suite de la publication de cet article, le responsable pour l’Europe du M23 affirme que « la liste publiée est totalement mensongère et n’est qu’une compilation des anciennes listes d’amnistie. Sur les 350, notre mouvement n’y reconnaît que 68 de ses membres déjà amnistiés précédemment ».
Cette prétendue nouvelle liste publiée par le ministre de la justice et relayé par le porte parole du gouvernement est loin d’être vrai et sincère. Ce n’est qu »une compilation des anciennes listes d’amnistie et pas une nouvelle vague ou liste. A vrai dire l’effet d’annonce de cette information distillée par le gouvernement est juste une diversion face à son non respect de ses engagements.
Je crois que c’est encore une diversion car ce n’est pas la première fois que le gouvernement établi ce genre de liste. J’ai une connaissance qui est entrain de trimer à la Kasapa malgré qu’il figurait sur une des nombreuses listes amnistiés déjà publiées.
Bonjour,
Qu’il plaise aux autorités de la RD CONGO de trouver une solution définitive afin d’avoir la paix dans toute l’étendu de la République. La guerre n’est pas bonne, et trempe la population dans les malheurs.
Que Dieu bénit notre RD CONGO.
C’est bien plus complexe que le discours conformiste ! Le processus de paix en panne du fait du Gouvernement Congolais sans doute mais la paix à l’Est ne se résout-elle seule que par le règlement entre M23 et Gouvernement ? La preuve, entre-temps au Nord et Sud Kivu et même dans l’Ituri il y’a encore des morts et ne parlons pas de la question des FDLR… Le M23, semble-t-il, défait n’y est-il pour rien ? Les rumeurs d’une nouvelle force rebelle à partir du Rwanda et de l’Ouganda sont-elles infondées et les menaces à peine voilées du M23, « le Gouvernement Congolais en assumera les conséquences » sont-elles des paroles en l’air acceptables d’un mouvement rebelle ?
Ailleurs pourquoi semble-t-on n’exiger qu’amnisties aux rebelles et pas de condamnations parmi le nombre toujours croissant de ceux qui ont fui au Rwanda et en Ouganda ?
Les rebelles n’auraient-ils que des droits et pas de devoirs en raison du traité de paix ?
Pourquoi le Gouvernement traîne-t-il les pieds à appliquer toutes les déclarations signées à Nairobi si la paix devrait en être le fruit ! On connait sa mauvaise gouvernance mais n’y a-t-il que cela ?
Moi je crois que c’est d’abord parce que le traité signé est un piège pour lui, les engagements y consentis lui ont été extorqués presque de force, les accomplir toutes aujourd’hui l’affaiblit quelque part : amnistier tant de rebelles qui ont tué, déstabilisé le pays avec l’aide du Rwanda et de l’Ouganda n’est pas anodin même si ce Gouvernement se doit de respecter sa parole…
Trop de non-dits, trop de contentieux tus, trop de complicités rwando-ougandaises, la paix complète ne peut être obtenue que si ces voisins font aussi preuve de bonne volonté, de sincérité et de transparence dans leur gestion, ce qui n’est pas le cas ! Quid par exemple de ces meurtres à Beni et ailleurs qui se poursuivent dans tout l’Est; quelle aide efficace nous apporte la Monusco pourtant venue pour cela, quelle est la part du Rwanda et de l’Ouganda dont on connait les velléités tenaces de balkanisation dans l’insécurité à l’Est, etc, etc… ?