Le nouveau président fraîchement élu de l’UDPS a tenu son premier meeting à Kinshasa ce mardi. Une mobilisation réussie qui renforce le leadership de Félix Tshisekedi sur l’opposition.
L’UDPS a retrouvé un leader. Un peu plus d’un an après la mort de l’opposant historique Etienne Tshisekedi, son fils, Félix, reprend le flambeau. Le parti d’opposition a pu réunir ce mardi plusieurs milliers de sympathisants à Kinshasa pour venir applaudir le premier meeting de Félix Tshisekedi depuis son élection à la tête de l’UDPS. Félix Tshisekedi se retrouve ainsi propulser sur le devant la scène en possible leader de l’opposition congolaise.
Une « renaissance » de l’UDPS réussie grâce à plusieurs petits coups de pouce du pouvoir. La justice congolaise a tout d’abord tranché en faveur de Félix Tshisekedi dans la bataille qui l’opposait à une autre aile du parti, représentée par le Premier ministre Bruno Tshibala, qui revendiquait le nom de l’UDPS. Second coup de pouce : le gouverneur de Kinshasa, André Kimbuta, a fini par autoriser la tenue du meeting, alors que toutes les manifestations de l’opposition étaient systématiquement interdites depuis septembre 2016.
Premier ministre, non… président, oui !
Avec le récent accord pour le retour du corps d’Etienne Tshisekedi au pays, négocié entre la famille et les autorités congolaises, certaines mauvaises langues ont vu dans ces gestes de mansuétudes de Kinshasa en faveur de Félix Tshisekedi, la volonté de débaucher le fils d’Etienne Tshisekedi pour lui proposer le poste de Premier ministre et ainsi valider le maintien au pouvoir de Joseph Kabila et un nouveau glissement du calendrier électoral. Mais le meeting de la place Sainte-Thérèse de ce mardi a permis au nouveau président de l’UDPS de couper court à toutes les rumeurs, et de se positionner pour la prochaine présidentielle.
Félix Tshisekedi a affirmé ne pas avoir « marchandé le retour de la dépouille de son prédécesseur ». « Vous m’avez élu à plus de 98% président de l’UDPS et m’avez demandé de me présenter à l’élection présidentielle. Ce n’est pas pour être encore candidat Premier ministre ». Le patron de l’UDPS, soutenu en tribune par des membres du MLC de Jean-Pierre Bemba, prend donc date pour la prochaine présidentielle de décembre, même si la date reste encore très incertaine.
Félix Tshisekedi en a aussi profité pour fustiger la « machine à voter » que souhaite mettre en place la Commission électorale (CENI), un appareil qualifié de « machine à tricher ». Autre inquiétude du président de l’UDPS : le fichier électoral que vient de publier la CENI. Un fichier « corrompu qui mérite un audit sérieux par l’OIF (Organisation Internationale de la Francophonie) et des experts locaux. Il pourrait y avoir encore environ 8 millions de doublons encore présents dans le fichier », a dénoncé Félix Tshisekedi.
Leader naturel de l’opposition ?
Avec ce meeting test de Kinshasa, le successeur d’Etienne Tshisekedi a donc pris une longueur d’avance sur les autres leaders de l’opposition. Moïse Katumbi est toujours coincé en exil forcé en Europe, même s’il annonce son retour pour le mois de juin, et les autres candidats, déclarés ou non, n’ont pas encore débuté leur campagne. Félix Tshisekedi se retrouve donc dans une dynamique positive pour s’imposer. L’avenir dira si Moïse Katumbi pourra réellement revenir au pays sans passer par la case prison et pourra ensuite se présenter à la présidentielle. Pour l’instant, les affaires judiciaires de l’ancien gouverneur du Katanga, cumulées avec son problème de double nationalité rendent sa candidature très hypothétique.
Dans ce cas, c’est un boulevard qui s’ouvrirait devant Félix Tshisekedi qui deviendrait alors le leader naturel de l’opposition. Reste à savoir sur le nouveau patron de l’UDPS aura les épaules assez solides pour rassembler dans son propre camps et s’accommoder avec les autres ténors de l’opposition comme Vital Kamerhe, Martin Fayulu, mais aussi avec les responsables du mouvement « Ensemble » de Moïse Katumbi.
Donnée pour moribonde après la mort d’Etienne Tshisekedi et les nombreux débauchages, l’UDPS semble renaitre de ses cendres. Et afin de reconstituer un socle de cadres solides au sein du parti, Félix Tshisekedi a décidé de réintégrer l’ensemble des députés UDPS, exclus en 2011 pour avoir siégé dans une assemblée jugée illégitime après la réélection contestée de Joseph Kabila. Un geste d’ouverture qui lance la reconstruction de l’UDPS qui compte bien peser dans le prochain scrutin électoral… avec ou sans soutien financier extérieur. Félix Tshisekedi a d’ailleurs demandé à ses militants de se tenir prêt à mettre la main à la poche pour financer la prochaine campagne électorale.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia