Opposition, Union africaine, communauté internationale… Joseph Kabila est pressé de toutes parts pour quitter le pouvoir et organiser des élections transparentes d’ici la fin de l’année. La France et l’Angola sont récemment montés au créneau pour demander l’application des accords de la Saint-Sylvestre, braquant un peu plus le pouvoir congolais.
Un président qui s’accroche à son fauteuil et des élections déjà reportées deux fois, la crise politique congolaise inquiète de plus en plus. En interne, l’opposition et le Comité laïc de coordination multiplient les manifestations. Mais à l’extérieur aussi, la dégradation de la situation politique préoccupe fortement la communauté internationale et les voisins de la RDC. Les Etats-unis et la Belgique sont en première ligne pour presser le président Kabila de raccrocher les gants, mais c’est maintenant au tour des pays de la région de hausser le ton et de se soucier de la stabilité de leur grand voisin.
Il faut dire qu’en Afrique, la donne a changé à la tête de plusieurs états. En Afrique du Sud, le nouveau président Cyril Ramaphosa incarne désormais une vraie rupture avec le pouvoir en place à Kinshasa. Ancien allié de Joseph Kabila, Jacob Zuma a cédé son fauteuil à un président qui semble maintenant très à l’écoute de l’opposition congolaise. Le meeting du mouvement Ensemble de l’opposant en exil Moïse Katumbi s’est d’ailleurs tenue en Afrique du Sud… au grand dam de Kinshasa. A Luanda, la roue a également tourné pour le pouvoir. Exit Dos Santos et bienvenue à João Lourenço. Le nouveau président angolais tente lui aussi de faire entendre une autre musique à son voisin congolais. Et pour presser Joseph Kabila à passer la main, Luanda joue la carte de l’Union africaine, avec à sa tête… le Rwandais Paul Kagame, dont les relations avec Kinshasa ont toujours été explosives.
Paris entre dans la danse
Dans ce concert de pressions plus ou moins amicales, comme celles du président du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa, qui prône « une sortie honorable » et négociée de Joseph Kabila, la France était plutôt restée discrète. Très active à l’ONU, la France faisait profile bas à l’Union européenne, se démarquant de la Belgique, très critique envers les autorités congolaises. La France, avec l’Espagne, avaient d’ailleurs « minimisé » un communiqué de l’Union européenne après une violente manifestation réprimée dans le sang fin 2017. Paris est alors accusé de se prêter à un double jeu, ménageant Kinshasa autour d’intérêts économiques en RDC. Mais par deux fois, Emmanuel Macron est sorti de son silence pour se positionner clairement sur le dossier congolais.
Lors de la visite de Paul Kagame le 23 mai, le président français avait affirmé soutenir l’initiative prise par le président de l’Union africaine. Déclaration presque anodine, sans autre commentaire, qui avait pourtant déclenché une première salve de critiques de Kinshasa. Le porte-parole du gouvernement Lambert Mende, y avait vu des « propos subliminaux et plein d’ambiguïté », estimant que « personne n’a le droit d’envisager des solutions aux problèmes qui sont les nôtres sans nous ». Discuter avec Kigali constitue visiblement une ligne pour Kinshasa.
Mais le 28 mai, lors de la visite du président angolais João Lourenço à l’Elysée, Emmanuel Macron a nettement précisé sa position. Le président français a demandé l’application de l’accord de la Saint-Sylvestre, qui, « seul, permettra une clarification de la situation politique, sans complaisance, dans le calme ». Les accords du 31 décembre 2016 prévoient que le président Joseph Kabila passe la main, comme l’exige la Constitution, prenne des mesures de décrispation politique et organise des élections crédibles et transparentes.
Luanda enfonce le clou
Le président angolais a été plus explicite sur le sujet et a balayé tout soupçon de conspiration contre la RDC pour tenter de rassurer son voisin congolais. « Le président Kabila doit respecter les accords », mais João Lourenço s’est refusé à dire que « Joseph Kabila doit quitter, nous n’avons pas le droit de le faire ». « Pour le président Kabila c’est un conseil et pas une obligation. S’il n’accepte pas nos conseils, nous n’avons pas de moyen de faire pression sur lui d’une autre manière. Nous ne voulons pas qu’après le mois de décembre, on commence à dire que les élections se sont réalisées dans des conditions pas satisfaisantes », a ajouté le président angolais.
Il n’en fallait pas plus pour faire sortir de ses gonds Lambert Mende qui a dénoncé « ces nouveaux conquistadors (qui) maquillent leur croisade dans une propagande nauséabonde » et de prévenir les pays voisins du Congo : « les pays Africains qui se hasarderont à servir de tête de pont ou de sous-traitants à des stratégies extérieures hostiles à la RDC élaborées ailleurs seront toujours payés en monnaie de singe, en plus de la résistance farouche du peuple congolais à laquelle ils devront s’attendre ».
Joseph Kabila peut (encore) dormir sur ses deux oreilles
Si Kinshasa perd ses nerfs face aux critiques internationales, c’est que pour la première fois depuis le début de la crise pré-électorale congolaise en 2014, les Etats-unis, l’Europe et l’Union africaine parlent d’une même voix et soutiennent une stratégie commune. Mais cette pression sera-t-elle suffisante pour faire bouger les lignes à Kinshasa ? Pas si sûr. Car en fait, il n’y a rien de vraiment neuf dans les positions françaises et angolaises. Le respect de l’accord de la Saint-Sylvestre a déjà été foulé du pied plusieurs fois et notamment avec le report de la présidentielle fin 2017, et ce sans aucune conséquence sur le pouvoir congolais.
La pression internationale a pour effet de crisper un peu plus les autorités congolaises, enfermant Kinshasa dans une dangereuse fuite en avant, dictée par un président bien décidé à ne pas lâcher le pouvoir. Et tant que la situation sécuritaire reste sous contrôle de Kinshasa, Joseph Kabila peut (encore) dormir sur ses deux oreilles. Car malgré les gesticulations, la communauté internationale et les pays voisins ne sont pas encore prêts à intervenir pour faire partir de force le président congolais. Ce qui veut dire que si les élections, encore très hypothétiques, ne sont pas organisées le 23 décembre 2018, comme annoncé, l’opposition ne pourra plus compter que sur elle-même pour dénouer l’interminable crise politique congolaise.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
vous mentez, ce n ‘est pas un travail sérieux de journaliste. L accord politique excepté sur le volet décrispation a été respecté. L accord du 31 décembre 2016 prévoyait le report des élections en cas de consensus entre le cnsa, la ceni et le gouvernement. Cette clause est clairement stipulée dans l’accord. Là vous faites de la propagande
Là encore Monsieur Bruce! C’est des passions qui se déchaînent……..
@bruce
Ainsi donc selon vous « le journaliste n’a pas fait un travail sérieux, il ment, il fait de la propagande, les ‘Accords’ ont été bel et bien respectés »….
Mais répondez donc à une question : « l’Accord prévoyait la cogestion d’une transition entre Majorité et Opposition, ne voyez-vous pas dans le fait que ‘JK’ ait eu besoin pour ce faire de ‘débaucher’ des acteurs jadis de l’opposition normale en leur offrant postes et sommes sonnantes et trébuchantes, un contournement frauduleux et grave de l’Accord ? »
Nous sommes au-delà de presque de deux ans de la date constitutionnelle de la fin du mandat et tel qu’on va de subterfuge politique à stratagème juridique, nous risquons d’épuiser bien plus que la moitié d’un mandat sans élections et donc sans retour au cours normal de la démocratie : « alors qui ‘ment’, qui ‘fait de la propagande’ ? »
S’il vous restait un zeste d’honnêteté intellectuelle et de conscience patriotique au service de vos frères et sœurs Congolais, je parie que votre réponse aurait été moins vénale, moins fanatique…
Je trouve le terme de débauché assez excessif. L accord politique prévoyait que le gouvernement soit dirigé par un membre de l’opposition issus du rassemblement, et que des postes ministériels reviendrait à cette mouvance politique. Accord qui du reste a été béni par l’église catholique et signé par Etienne Tshisekedi lui-même. Souvenez vous que la Cenco, partie médicatrice au dialogue disait en mars 2017 que si l’arrangement particulier faisait face à tant de blocage malgré les 98% des questions réglés cela étaient du à l’inconséquence et l’extrémisme de toutes les parties ; majorité comme opposition. Les questions litigieuses portaient essentiellement sur le nombre de candidat premier-ministrable à présenter au président Kabila et sur la personne devant diriger le Cnsa, qui selon l’accord devait nécessairement être le président du conseil des sages du rassemblement. Le camp Felix et Moise ont souhaité s’engager dans une logique de confrontation avec le pouvoir au seul prétexte que Felix devait impérativement être nommé premier ministre ce qui par ailleurs n’est pas prévu dans l’accord Jamais dans l’accord il a été clairement stipulé que Felix Tshisekedi Tshilombo devait être premier ministre. D’ailleurs la question des modalités de nomination du premier ministre lors du dialogue de la Cenco a été renvoyé à l’arrangement particulier. La mouvance Felix/Moise a organisé une journée ville morte avant la nomination de Bruno Tshibala ensuite une manifestation qui fort malheureusement n’a pas été concluante le 10 avril 2017 avec leur leader Felix qui décide de voyager à l’étranger la veille. Si le pouvoir use de stratagème pour perdurer et ce en oubliant l intérêt supérieur de la nation est juste mais n’oubliant pas de souligner ce qui dans l’opposition lui ont donné cette possibilité, par manque de maturité, vision hémiplégique, manque de compromit et peu de vision stratégique. Tshibala était de l’opposition du rassemblement, il en était même le porte parole et membre du conseil des sages et Olenga Nkoy aussi. Kabila l’a vu, ses adversaires en face n’ont même pas essayé d’envisager une telle hypothèse. Lors du vote de l’arrangement particulier au parlement devant désigner le président du Cnsa, le camp Felix/Moise a décidé de boycotter cette session parlementaire ne souhaitant pas s’associer à ces travaux. Comment reprocher alors de voir un Olenga Nkoy présider cette institution. On ne peut pas souhaiter tout et son contraire. Talleyrand disait le meilleur moyen de renverser un gouvernement c’est d’en faire partie, comme un dicton populaire nous enseigne que le meilleur moyen de détourner un avion c’est d’être dans le cockpit. Le patriote s’attache aussi à décrire la réalité telle qu’il l’a voit et non pas telle qu’il l’espère. Les congolais dans leur ensemble doivent apprendre à éviter les réactions épidermiques et trop émotionnel et commencer à penser les questions nationales au-delà d’eux-mêmes et même parfois contre eux-mêmes. Dans une négociation toutes les parties perdent un peu et gagnent un peu, dans une confrontation il y a toujours un perdant et un gagnant. Et Kabila a battu cette opposition… A titre personnel, je crois à une opposition forte et cohérente pouvant faire contrepoids à un régime investit de tous les pouvoirs mais je me dois aussi de dire le réel tel qu’il se déploie devant nous. Le réel, cher ami c’est quand on se cogne. J’espère que ces deux dernières années aura été riche d’enseignement pour nous tous, mais à lire ce type d’articles, malheureusement j’en doute fortement, nonobstant la qualité d’écriture de M. Rigaud.
Si vous voulez m’entendre dire que l’opposition à ‘JK’ n’est ni plus responsable ni plus experte que le pouvoir; c’est dit…
N’empêche que vous savez bien que c’est ce dernier qui est le principal décideur, il imprime à tout le pays le sens de la marche du pays; c’est dire qu’en l’état d’un pouvoir arbitraire et entêté à se maintenir illégalement – personne n’en doute plus et ‘débaucher’ est bien ce qu’il fait – il reste très hypothétique que quelle qu’eût été la qualité de l’opposition celle-ci aurait pu changer quelque chose….