En 2015, « au moins 175 personnes ont été enlevées contre rançon » au Nord-Kivu, dénonce Human Rights Watch (HRW). En cause : la persistance des groupes armés encore très présents à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC).
Deux ans après la fin de la rébellion du M23, l’insécurité règne toujours à l’Est du Congo. Plus de 70 groupes armés sont encore recensés au Nord et au Sud-Kivu – voir notre article. Human Rights Watch (HRW), qui enquête dans la région depuis de nombreuses années, s’inquiète de « la hausse alarmante du nombre de kidnappings ». Une augmentation qui constitue « une grave menace pour la population de l’Est de la RD Congo », selon Ida Sawyer, chercheuse à Human Rights Watch.
« ils frappent, fouettent ou menacent leurs otages de mort »
L’ONG a rencontré 45 ex-otages entre mai et décembre 2015 pour mieux cerner les modes opératoires et les motivations de ces kidnappings. « Les ravisseurs opèrent en général en groupes d’une dizaine d’individus ou plus, et sont souvent lourdement armés de kalachnikovs et autres armes d’assaut militaires. Nombre d’entre eux portent des tenues militaires et semblent appartenir, ou avoir appartenu, à l’un des nombreux groupes armés actifs dans l’est de la RD Congo », explique HRW. Le mode opératoire est identique pour tous les groupes armés : « ils frappent, fouettent ou menacent leurs otages de mort, leur demandant d’appeler leurs proches ou leurs employeurs afin de les persuader de payer pour leur libération ».
Les familles ne préviennent pas la police
Selon les cas, les ravisseurs exigent entre 200 et 30.000 $ par otage. « Un homme a été obligé de vendre sa ferme afin de pouvoir rembourser l’argent emprunté par sa famille pour payer la rançon de sa libération, laissant sa famille sans aucune source de revenu ». Human Rights Watch note que la plupart des familles ne préviennent pas la police « soit parce qu’ils pensaient qu’ils n’obtiendraient aucune aide, soit parce qu’ils craignaient que cela n’empire la situation et ne les expose à d’autres actes d’extorsion de la part des autorités ». Des déclarations inquiétantes selon l’ONG, qui recommande aux autorités congolaises de créer « de toute urgence une unité de police spéciale chargée d’aider à secourir les otages, de mener des enquêtes et des poursuites contre les ravisseurs ».
En 2015, Human Rights Watch a confirmé les enlèvements contre rançon de 172 Congolais et de trois ressortissants étrangers. La grande majorité des cas documentés par HRW ont eu lieu dans le Rutshuru, au Nord-Kivu. « Au moins trois otages ont été tués et un autre est décédé de ses blessures lors d’une tentative d’enlèvement. Un autre otage est toujours porté disparu ». Les témoignages recueillis par Human Rights Watch sont consultables ici.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia