Très remonté contre l’interdiction du film qui lui est consacré, le célèbre gynécologue congolais dénonce violemment la « censure » dont est victime le documentaire « L’Homme qui répare les femmes ». Plus politique, il fustige également « le climat d’oppression » qui règne en RDC.
Le très beau documentaire de Thierry Michel et Colette Braeckman « L’Homme qui répare les femmes » ne pourra pas être projeté en République démocratique du Congo (RDC). Ce film consacré au combat du très charismatique docteur Denis Mukwege en faveur des victimes de viols a en effet été interdit de diffusion par les autorités congolaises. Le gouvernement de Kinshasa affirme que le film « véhicule des accusations infondées contre les Forces armées congolaises (FARDC) ». Le Ministre de la Communication et des Médias, Lambert Mende, explique que contrairement à ce qui est montré dans le film « des déclarations de femmes victimes de sévices sexuels enregistrées par les réalisateurs, ont reconnus avoir été sauvés par les mêmes FARDC ». Si Lambert Mende « soutient les interventions salutaires du docteur Denis Mukwege en faveur des victimes » il ne peut tolérer « que cette sensibilisation ne devienne un outil de désinformation ». Ce qui dérange en fait Kinshasa, c’est la relative impunité dont bénéficie les auteurs de viols : groupes armés et armée régulière confondus… ce montre très bien le film de Thierry Michel et Colette Braeckman.
« Censure »
Le film devait être projeté les 8 et 9 septembre à Kinshasa, avant d’être montré aux femmes victimes de viols à Bukavu. Le docteur Denis Mukwege n’a pas tardé à réagir à l’interdiction du film. Et la charge est violente à l’encontre du gouvernement congolais. Le célèbre gynécologue dénonce une « censure » qui « met en évidence la volonté du gouvernement de refuser au peuple congolais son droit d’accès à l’information ». La critique est ensuite plus politique. Mukwege fustige « un climat d’oppression, de dégradation de la situation des droits humains et de rétrécissement de l’espace des libertés fondamentales ». Le docteur fait référence aux manifestations contre la révision constitutionnelle de janvier 2015 « où une répression sanglante s’accompagnait du musèlement de la presse libre, de la coupure délibérée de l’Internet, du blocage des réseaux sociaux, du brouillage des faisceaux des radios et des télévisions tels que RFI ».
Une popularité qui dérange
La célébrité soudaine du docteur Mukwege, plusieurs fois honoré à l’étranger et décoré du prestigieux prix Sakharov du Parlement européen, n’a jamais été très apprécié par le pouvoir en place à Kinshasa. Alors que la tension politique s’accentue en RDC et que l’opposition craint que Joseph Kabila ne cherche à s’accrocher au pouvoir, la popularité du docteur Mukwege a toujours été vécu comme « faisant de l’ombre » au président congolais. Denis Mukwege a toujours réfuté toute velléité d’entreprendre une carrière politique, mais certaines langues (bonnes ou mauvaises) ont toujours fait courir la rumeur d’une possible candidature du docteur de Bukavu.
Tentative d’assassinat
Depuis sa récente popularité, les pressions se sont accentuées sur Denis Mukwege. Il a échappé à une tentative d’assassinat en 2012, avant de se réfugier à l’étranger quelques mois et les comptes financiers de son hôpital de Panzi ont été saisi en vue d’un redressement fiscal. Ses proches dénonçaient alors « une tentative d’intimidation ». Dans l’interdiction du film qui lui est consacré, ce que ne comprend pas le docteur Mukwege, c’est « que les témoignages des femmes et des acteurs de la société civile (…) puissent inquiéter outre mesure les autorités qui ont pris la décision de l’interdire ». Des mesures « liberticides (…) qui n’honorent en rien les responsables qui les ont prises, pas plus qu’elles ne contribuent à l’amélioration de l’image du pays ».
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Que les autorités instruisent les agents commis à cet effet de laisser voir à la population le film sisdit.
Ce n’est pas en interdisant le film que Lambert Mende sauve l’image de son pays. Comme dans ses habitudes, il ne fait que ternir l’image de son vénéré président Kabila. De toute façon, ce film sera à Kinshasa sous peu à travers d’autres canaux, notamment les ambulants qui le vendront sur CD. Et c’est à ce moment que la popularité du film va aller crescendo tant en RDC que dans les pays limitrophes. Un son de cloche contraire aux chantres du régime est toujours mal accueilli en RDC:emprisonnement, assassinat, empoisonnement, intimidations,etc.
Qui veut noyer son chien, l’accuse d’être enragé. L’un des rares compatriotes qui fait la fierté de notre pays et qui redore l’image du pays à l’étranger (Dr Denis Mukwege) est combattu par ceux-là qui sont censés l’encourager. Notre gouvernement devrait donner un prix à ce film et subventionner l’hôpital de Panzi, au lieu de diaboliser le travail des dignes fils et ami(es) de notre pays. Merci à Mr Thierry Michel et Colette Brackman pour leur engagement à faire connaître la « RDC d’en-bas ».