A moins de deux mois de l’élection présidentielle, l’opposition a manifesté ce vendredi contre la machine à voter et le fichier électoral, mais sans l’UDPS. Ce qui fragilise un peu plus l’unité d’une opposition au bord de l’implosion.
Le camp présidentiel n’en espérait pas tant. L’utilisation de la machine à voter, que conteste l’opposition, provoque d’importantes divergences, au point de fissurer la fragile unité qui semblait régner au sein de l’opposition. Si l’ensemble des opposants, candidats ou non à la présidentielle, sont unanimes pour rejeter en bloc la machine à voter, source de possibles fraudes, l’attitude à adopter face à son utilisation ne fait pas l’unanimité. Une division de plus au sein d’une opposition déjà dispersée.
« Trahison »
Dernière exemple des tensions créées par la machine à voter : la manifestation du vendredi 26 octobre. Cette marche de contestation a justement été placée sous le signe du refus de la machine à voter et du nettoyage du fichier électoral qui contiendrait 6 millions d’électeurs sans empreintes digitales. Si le MLC de Jean-Pierre Bemba, Ensemble de Moïse Katumbi, l’UNC de Vital Kamerhe, l’Ecidé de Martin Fayulu étaient tous présents… l’UDPS de Félix Tshisekedi n’a pas appelé à manifester. Le parti d’opposition a même annoncé vouloir aller aux élections « avec ou sans la machine à voter », en contradiction avec le mot d’ordre général. La manifestation s’est déroulée dans le calme vendredi, mais sans l’UDPS. Certains manifestants, en colère, ont dénoncé « la trahison » en passant devant son siège de Limete à Kinshasa.
Surveiller le scrutin plutôt que boycotter
Félix Tshisekedi a bien pris soin de ne pas se prononcer sur la question de la machine à voter, mais ses lieutenants se sont chargés de délivrer les arguments de l’UDPS. Pour le parti, le piège de la machine à voter, imposé par le pouvoir, est de faire boycotter le scrutin par l’opposition, ce qui ferait automatiquement gagner Emmanuel Ramazani Shadary, le candidat du président Joseph Kabila. L’UDPS pense au contraire qu’il faut participer aux élections et en surveiller le bon déroulement, dont l’utilisation des machines à voter. Si l’explication s’entend, d’autres raisons ont provoqué le schisme au sein de l’opposition. A commencer par la désignation d’un candidat commun à la présidentiel, seul capable de battre le candidat du pouvoir dans un scrutin à tour unique.
Les recalés du scrutin tentés par le boycott
Dans ce débat autour du candidat commun, deux grains de sable sont venus gripper la mécanique de l’union. Sur les sept leaders de l’opposition, candidats à la présidentielle, trois poids lourds se sont vus invalidés, et un a été empêché de déposer sa candidature. Les trois « recalés » aux élections (Jean-Pierre Bemba, Moïse Katumbi et Adolphe Muzito) n’ont donc plus vraiment intérêts à ce que le scrutin se tiennent en décembre… sans eux. Ils pourraient donc être tentés d’annoncer un boycott des élections, afin de mieux revenir dans la course, plus tard. Mais pour les « qualifiés », Félix Tshisekedi, Vital Kamerhe, Martin Fayulu… la présidentielle de décembre est cruciale. Elle leur offre d’abord l’occasion unique d’être le possible candidat commun de l’opposition, ensuite elle leur permet de concourir sans les deux poids lourds que sont Bemba et Katumbi, et surtout elle servira à chacun de mesurer son poids électoral.
Tapis rouge pour le « dauphin »
On voit donc que la machine à voter imposée par surprise par la Commission électorale (CENI) en plein été 2017, aura fini par atomiser le semblant d’unité de l’opposition congolaise. Avec des agendas aussi divergents, Bemba, Katumbi, Tshisekedi et Kamerhe auront bien du mal à s’accorder sur une candidature unique et consensuelle. En renonçant à manifester aux côtés des autres partis d’opposition, l’UDPS met donc un dernier coup de pression sur les autres leaders, alors qu’un communiqué commun annonce que la désignation du candidat unique sera annoncée avant le 15 novembre. Félix Tshisekedi semble envoyer un message très clair : j’irai aux élections avec ou sans vous. L’UDPS a d’ailleurs plusieurs fois fait savoir qu’elle ne soutiendrait qu’un seul candidat : Félix Tshisekedi. Reste à savoir si la nomination d’un candidat unique changera la donne. Si ce n’est pas Félix Tshisekedi, il est fort à parier qu’il y aura plusieurs opposants en lice à la présidentielle… déroulant ainsi un tapis rouge au « dauphin » de Joseph Kabila.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
les mensonges ne paient pas a la longue. l’opposition de la rdc a utilise cet outil a outrance, grace a africarabia. Ellel n’a jamais ete prete pour les elections……
@Kishabongo
Ne croyez-vous pas que si le processus s’annonçait transparent et équitable, ni vous, ni moi, ni surtout l’opposition politique ne se poserait la question de sa participation ni de sa préparation ? Un élémentaire décryptage de la situation montre que le pouvoir abuse des moyens de l’État et bien plus pour déstabiliser arbitrairement l’opposition, alors les mensonges sont bien ailleurs que vous les voyez. C’est plutôt de bon sens qu’ils n’acceptent d’aller en victimes consentantes à l’abattoir. Cela étant malgré leurs faiblesses propres et subies, vous voyez bien que le boycott n’est pas leur décision finale et que cette opposition est bel et bien décidée à aller aux élections même divisée. Mais c’est là une autre paire de manches…
Qui doute encore d’un président hors mandat à Kinshasa qui n’entend guère se soumettre au jeu démocratique normal mais à celui frauduleux qu’il a concocté pour permettre la persévérance de son système via son dauphin ? Hélas l’opposition en face n’a en fait jamais fait preuve d’une existence solide et efficace, à l’image de toute la médiocre classe politique de notre pays, davantage habituée à se servir dans l’immédiat plutôt qu’habitée d’une vision long-terme et engagée dans des actions pour un avenir garanti du pays. A se demander si elle a jamais pris conscience de sa fonction de contre-pouvoir légal.
Depuis peu à la veille de ces scrutins cruciaux, elle clame à raison la nécessité de son unité pour mieux faire face à un adversaire pervers et puissant, elle n’en a pas pourtant réussi (pas encore) à vraiment la matérialiser.
Question néanmoins : la récente et soudaine désolidarisation de l’Udps est-elle en résonance avec cette quasi structurelle irresponsabilité de nos politiciens ou procède-t-elle aussi d’autres explications ?
Que veut exactement l’Udps lorsque contrairement à son discours d’il y’a encore quelques jours elle annonce en catastrophe sa décision d’aller aux élections machine à voter ou pas, – en fait un véritable ordinateur non seulement interdit par la loi en cours mais aussi dont l’élémentaire maniement numérique est un casse-tête prévisible pour nombre d’usagers Congolais et donc source de magouilles ? De plus en faisant « cavalier seul », l’Udps n’en continue pas moins de ‘rejeter la machine et cie’ – un arsenal préparé pour fausser les résultats du vote au profit du pouvoir – en même temps qu’elle signe encore les mêmes textes avec les autres qui eux de leur côté n’entendent pas non plus boycotter les prochains scrutins.
Ainsi donc les différents groupes de cette opposition fondent leurs projets sur des exigences identiques mais n’adoptent pas les mêmes modalités notamment le même calendrier pour les mettre en œuvre. Et ici l’Udps fait de plus faux bond aux autres en ne participant pas à la marche…
Le moins qu’on puisse déduire de tout ça est que l’Udps veut y signifier sa ‘singularité’ mais pour quels intérêts propres à terme foncièrement différents de ceux des autres partis de l’opposition ?
Sans conteste l’Udps veut imposer sa suprématie de première force de l’opposition au calendrier et en volume mais « objectivement la voie qu’elle emprunte ici défend-elle mieux ses intérêts » ? Il y’a un moment où les rivalités tout a fait légitimes ne profitent que lorsqu’on les apprivoise tant bien que mal…
Voilà, à mon avis, le nœud autour duquel tourne cette affaire de contre-pouvoir manquant à l’opposition particulièrement en ces temps de soudaine sortie de route de l’Udps !
Selon moi, à ce stade, le problème, on le perçoit vite, n’est pas que l’Udps ait tort d’attester qu’il faudra bien au besoin aller aux élections même avec la machine, ses rivaux ne veulent pas non plus les boycotter ou du moins personne ne veut endosser la responsabilité d’un éventuel capotage du processus ou coupable d’une « chaise vide » dont elle ne peut maîtriser les conséquences ; le problème est que, au-delà d’une simple gesticulation de positionnement, l’Udps est en vérité quasiment incapable de gagner seule sans l’appui des autres forces de l’opposition, sauf alors à « collaborer » avec le régime. Où sont alors ses intérêts qu’elle prétend poursuivre ici ?
On aura donc compris que le mobile à la genèse de ce changement de cap de l’Udps tient à un choix stratégique né de l’impossibilité d’imposer son leadership et son leader à ses conditions, inacceptable pour elle, mais tient en même temps à cet endémique échec de nos politiciens, d’une gouvernance qui a davantage affamé et tué que construit une Nation gagnante. Certes la machine à voter, comme dit ici, est « cette arme de division massive de l’opposition » apprêtée par ce pouvoir, mais elle est aussi et d’abord « l’expression douloureuse, disais-je, de notre descente incessante en enfer, de ces gouvernements successifs défaillants ». Aujourd’hui comme hier ces fautes exigent des patriotes Congolais et des étrangers de bonne volonté une active et virulente dénonciation faute d’être coupables de non-assistance à peuple en danger d’extermination nationale et humaine. Comme dit aussi un autre, « personne ne pourra dire demain « je ne savais pas »…
C’est ce surréaliste château de carte prompt à s’écrouler dangereusement devant nous, il ne peut nous laisser spectateur passif ; puissent ces mêmes Congolais qui sont descendus spontanément dans les rues de nos villes pour protester contre l’usage de cette machine à voter, continuer à appeler nos politiciens enfin à des actions véritablement efficientes de libération…
PS
Était-il peut-être nécessaire de rappeler, selon moi bien sûr, que l’Udps non seulement a peu de chances de gagner seule sans l’appui des autres de l’opposition mais aussi que son initiative fragilise l’opposition et démobilise ses troupes. Encore une fois pour quels intérêts propres ? Fussent-ils se compter en sensibles espèces sonnantes et trébuchantes, je crains qu’à côté, sa notoriété n’en grandisse pas autant, au contraire, certains l’accusent déjà (trop vite et trop fort à mon avis) de trahison. Pour si peu alors à terme, tenterais-je de conclure.
N’empêche que sur ce tableau noir de rivalités et trahisons on peut encore inscrire l’espoir, l’optimisme : je crois en effet que mieux que leurs troupes, beaucoup parmi les différents leaders de l’opposition (même à l’Udps) ont compris la nécessité de l’unité et ainsi une candidature commune continue à être d’actualité…
Let us wait and see !!!