Face au blocage institutionnel pour la désignation du futur président de la Commission électorale (CENI), le défenseur des droits de l’homme, Paul Nsapu, s’est porté candidat et plaide pour une institution « non politisée et non partisane ».
La Commission électorale congolaise (CENI) est toujours en quête de son président. La désignation de Ronsard Malonda par l’Assemblée nationale début juillet avait soulevé une levée de bouclier dans l’opposition, mais aussi du côté de l’UDPS, le parti présidentiel. De nombreuses manifestations anti-Malonda ont été organisées aux quatre coins du Congo, accusant le prétendant à la présidence de la CENI d’être trop proche du FCC de Joseph Kabila et d’être co-responsable des élections chaotiques de 2011 et 2018.
Face au vent de colère, le président Félix Tshisekedi a refusé d’entériner la nomination du président de la CENI, affirmant que sa désignation par les autorités religieuses avait été entachée d’irrégularités et contestée par l’Église catholique et l’Église du Christ au Congo (ECC). Depuis, le processus est bloqué et la CENI n’a toujours pas de président, à trois ans de la prochaine présidentielle. Pour l’opposition congolaise, mais aussi pour la société civile, une réforme en profondeur de la centrale électorale est indispensable afin de garantir des élections crédibles et transparentes lors du prochain scrutin de 2023.
Une réforme pour « éviter les erreurs du passé »
Mais en plus d’un toilettage complet de la CENI, nombreux sont ceux qui plaident pour une présidence plus consensuelle. En coulisse, certains voudraient voir relancer le processus de désignation par le président Tshisekedi. Depuis quelques semaines, Paul Nsapu, président le Ligue des Electeurs (LE) et vice-président de la Fédération des ligues des droits de l’homme (FIDH), s’est porté candidat pour présider la Commission électorale. Fort de son expertise en matière de défense des droits humains et après avoir formé plus de 50.000 observateurs électoraux, Paul Nsapu a entamé une tournée face à la diaspora congolaise en Europe pour expliquer son projet.
A Paris ce week-end, Paul Nsapu s’est appliqué à faire de la pédagogie pour présenter sa réforme de la Commission électorale. C’est le docteur en droit public Martin Mulumba qui a dressé le bilan peu flatteur de la centrale électorale congolaise dont les trois derniers scrutins de 2006, 2011 et 2018 ont tous été contestés et entachés de nombreuses irrégularités. Martin Mulumba a pointé de nombreuses réformes à mettre en place pour « éviter les erreurs du passé et le chaos permanent ». Il plaide pour un recensement complet de la population, qui n’a pas été fait depuis 1984, mais aussi pour le retour d’une présidentielle à deux tours pour « assurer une légitimité populaire au président élu », et enfin demande à ce que les Congolais de l’étranger puissent prendre part au vote.
Pour une CENI apolitique
Le principal point noir de la Commission électorale actuelle, c’est « sa dépendance au pouvoir politique ». Paul Nsapu prône « une CENI non politisée et non partisane » qui doit s’appuyer sur la société civile. Le président de la Ligue des Electeurs estime que l’exemple sénégalais, où la Commission électorale est essentiellement composée de membres issus de la société civile, permet que « le choix des Sénégalais soit respecté ». Pour Paul Nsapu, « les politiques ne doivent plus contrôler la CENI au Congo. On ne peut pas être juge et partie ». Selon lui, « la société civile doit piloter la nouvelle CENI », car le modèle congolais actuel, « n’est pas propice à l’indépendance de l’institution ».
Un nouveau processus de désignation du président de la CENI est-il possible ? Rien n’est moins sûr. Paul Nsapu estime que seul le président Tshisekedi a la légitimité pour relancer un processus de désignation. Si l’Église catholique et l’Église du Christ au Congo pourraient être tentées de suivre une telle initiative, la balle est également dans le camp de l’Assemblée nationale, sans qui, rien n’est possible. Le hic, c’est que l’Assemblée est largement dominée par le FCC de l’ancien président Joseph Kabila. Un FCC qui a porté à bout de bras la candidature de Ronsard Malonda, et l’a même défendu jusque dans la rue, en faisant manifester ses partisans.
Deux hommes, censés être « partenaires » au sein de la même coalition gouvernementale, détiennent la solution à ce bloquage institutionnel : Félix Tshisekedi et Joseph Kabila. L’actuel et l’ancien président doivent désormais s’accorder pour savoir qui présidera la Commission électorale. Mais pas sûr que chacun des deux coalisés veulent laisser l’autre contrôler la très stratégique institution qui a toujours fait la pluie et le beau temps sur les élections congolaises.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Un article intéressant !
Je suis fier d’avoir un compatriote comme Paul Nsapu, un homme courageux, intègre et de forte conviction. Hélas, ses qualités constituent un grand handicap dans le paysage politique congolais connu pour être pourri, corrompu, impitoyable et exécrable C’est pourtant l’homme qu il faut à la CENI. Un homme de cet acabit se compte sur le doigt d’une seule main au RDC