« Les destructions et les souffrances humaines dans le conflit des Kasaï ont pris une ampleur immense » selon le Haut commissariat aux réfugiés qui revient d’une mission à la frontière angolaise.
Après un an de conflit, la crise sécuritaire dans les Kasaï est loin d’être éteinte. Si le décompte de l’Eglise catholique porte toujours à plus de 3.000 morts le bilan des affrontements entre les miliciens Kamuina Nsapu et les forces de sécurité congolaises, le nombre des déplacés internes continue d’augmenter. Début septembre, une équipe du Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR) s’est rendue dans le territoire de Kamonia, à la frontière entre la République démocratique du Congo (RDC) et l’Angola. « Nos collègues ont vu des villages entiers incendiés et des civils dans une situation désastreuse. Les services essentiels ont globalement cessé de fonctionner et un climat d’anarchie règne » a expliqué Cécile Pouilly, porte-parole du HCR.
Dans la région de Kamako, « neuf villages sur dix ont été réduits en cendres » au cours des attaques menées par des groupes armés ou dans les affrontements avec les forces gouvernementales. Toujours selon le HCR, « des groupes armés locaux ont systématiquement détruit ou pillé les postes sanitaires, les écoles et les bâtiments publics. Les enseignants et les infirmiers ont fui ou ont été tués ». Le Haut commissariat attire l’attention sur le sort des enfants séparés de leur famille par les violences. Des centaines d’enfants ont été témoins de l’assassinat de leurs parents. Ces enfants ont été provisoirement placés dans des familles d’accueil, « mais il n’existe aucun système pour assurer un soutien psychosocial à ceux qui sont traumatisés » explique Cécile Pouilly.
1,4 million de déplacés
Les violences dans les Kasaï ont débuté en septembre 2016, un mois après la mort d’un chef traditionnel, Kamuina Nsapu, tué lors d’une opération militaire après s’être révolté contre le pouvoir de Kinshasa. Si les miliciens Kamuina Nsapu se sont livrés à des nombreuses exactions, l’ONU et les ONG internationales accusent les autorités congolaises d’avoir réagit « de manière disproportionnée » par une répression féroce. Plus de cinquante fosses communes ont déjà été découvertes dans les Kasaï. Selon le HCR, le conflit s’est désormais répandu dans 9 des 26 provinces de République démocratique du Congo, et « environ 1,4 million de personnes auraient été déplacées. »
Le HCR a également dénombré 33.000 Congolais qui ont trouvé refuge en Angola depuis avril 2017. Certaines zones du centre des Kasaï sont aujourd’hui sous le contrôle des forces de sécurité congolaises, « mais le retour à la paix demeure précaire. » Et l’aide aux populations locales devient de plus en plus délicate. « Nous manquons de ressources pour la réponse urgente à plus grande échelle, estime le HCR. Sur les 102,5 millions de dollars nécessaires pour la situation en RDC et la réponse en Angola, seuls 17% ont été reçus jusqu’à présent. »
Christophe RIGAUD – Afrikarabia