Une attaque à la bombe dans un restaurant de Beni rappelle que la spirale de la violence ne s’est pas atténuée malgré l’état de siège et l’arrivée des troupes ougandaises dans l’Est du Congo.
8 morts et 20 blessés, c’est le dernier bilan de l’attentat meurtrier qui a endeuillé Beni le jour de Noël. Un kamikaze a fait exploser une bombe artisanale à l’entrée d’un restaurant bondé du centre-ville. L’attaque n’a pas été revendiquée, mais les autorités congolaises accusent les ADF, une rébellion congolaise d’origine ougandaise dont les responsables ont fait allégeance à l’Etat islamique.
En 2016 déjà, 22 civils avait été tués à l’arme blanche lors d’une attaque des ADF, les 24 et 25 décembre. Depuis 2013, l’église catholique a dénombré 6.000 victimes des rebelles congolais. Des massacres à l’infini, dans une région où sévit encore plus d’une centaine de groupes armés, selon le Baromètre sécuritaire du Kivu (KST) qui documente les violences dans l’Est du Congo.
Une pression militaire qui suscite des représailles
Ce nouveau massacre intervient dans un contexte sécuritaire inédit. La province du Nord-Kivu, avec celle de l’Ituri, a été placée en état de siège depuis le mois de mai dernier. Un état d’exception, où les militaires administrent la zone à la place des civils et devaient répondre à la promesse du président Tshisekedi de ramener la paix à l’Est. Mais après 7 mois d’état de siège, la violence n’a pas cessé et 1.300 civils sont morts.
Comme pour signifier l’impuissance de l’armée congolaise à éradiquer les groupes armés, les soldats ougandais ont été autorisés à intervenir sur le territoire congolais par Félix Tshisekedi début décembre. L’objectif affiché est de venir à bout des ADF, le groupe le plus meurtrier de la région. Mais pour l’instant, les victoires des forces congolaises et ougandaises sont bien minces : deux bastions rebelles repris et une trentaine de prisonniers.
L’attaque de Noël à Beni, ville martyre depuis presque 10 ans, est hautement symbolique. Elle rappelle qu’à chaque offensive militaire, qu’à chaque coup de boutoir contre les positions rebelles, les représailles des ADF se portent contre les civils. Une spirale de la violence que les FARDC n’ont jamais réussi à briser pour l’instant.
Un changement de mode opératoire
En rejoignant l’Etat islamique en Afrique centrale en 2019, les ADF tentent un ralliement très opportuniste. Il permet au groupe d’amplifier son importance régional, surtout destiné à impressionner Kinshasa. Les liens opérationnels et financiers n’ont jamais été prouvés entre les ADF et l’Etat islamique même si des connexions sont bien établies entre le groupe rebelle congolais et certains responsables de l’EI en Afrique, notamment en Somalie et au Mozambique – voir notre article.
Si on ne note pas de recrudescence des attaques ADF depuis son allégeance à l’Etat islamique, on remarque tout de même une modification dans le mode opératoire du groupe armé avec l’utilisation d’explosifs pour cibler les civils. C’est le cas de l’attentat du 25 décembre à Beni. Mais le 27 juin, la même méthode avait été utilisée contre une église, toujours à Beni, et avait blessé deux personnes. Et quelques heures plus tard, le porteur d’une autre bombe a été tué dans l’explosion de son engin près d’un bar de la commune de Rwenzori. L’utilisation de « kamikazes » est également une évolution à noter, qui rapproche les ADF des pratiques de l’Etat islamique.
Mettre en oeuvre une large stratégie politique
Si la physionomie des attentats ADF s’est quelque peu modifiée avec l’utilisation de bombes artisanales, les principales attaques contre les civils ou l’armée congolaise sont toujours commises à l’arme blanche ou avec des armes légères. La principale difficulté pour l’armée congolaise, et aujourd’hui ougandaise, est de combattre un ennemi très mobile dans une vaste zone de forêt dense et très difficile d’accès. Les troupes ougandaises ont d’ailleurs dû remettre en état certains axes de communication avant de mener leurs attaques au sol.
Ce nouveau massacre ne fait que rappeler les difficultés d’une guerre asymétrique, qui s’apparente davantage une guérilla qu’à un conflit conventionnel. La solution ne peut être uniquement militaire. Il faudra trouver les interlocuteurs au sein des groupes armés et mettre en oeuvre une large stratégie politique pour dialoguer, démobiliser et réinsérer les ex-rebelles. Mais aussi, et surtout, réorganiser une armée congolaise défaillante et briser le cercle vicieux des désertions-rebellions-réintégrations.
Christophe Rigaud – Afrikarabia
Beni encore et toujours en deuil en plein état de siège et malgré la présence des troupes ougandaises appelées à la rescousse pour suppléer à l’inefficience de notre propre armée.! Quel sort funeste pour nos frères et sœurs du coin indéfiniment condamnés à ne pas souffler même à Noël. Une attaque kamikaze y causé au moins huit morts et plus de 20 blessés, Jusqu’où, jusqu’à quand et que font nos autorités civiles et militaires ???
Une fois de plus l’évidence flagrante d’une impérative et urgente restructuration de notre armée qui seule peut jouer un jour son rôle d’armée républicaine et dissuasive à défendre nos terres et à sécuriser nos frontières. En effet nos morts ne sont pas des dégâts collatéraux comme a osé le dire notre propre Chef de l’État, ce sont nos ressources et nos espaces qui représentent un appât pour les voisins diaboliques qu’il faut arrêter au plus vite !
Il est alors naïf voire inconscient à sortir de ce bourbier en vantant un état de siège improductif depuis 7 mois et à croire que les troupes ougandaises ou rwandaises dont les pays ont des agendas doubles connus de tous viennent faire le travail à notre place, la spirale de la violence à l’Est continue et continuera ainsi faisant ; consultez le décompte affreux de morts, massacres, incendies et déplacés depuis plus de deux décennies.et même depuis l’instauration de ce révoltant état de siège, mais aussi la persistance de cette pléthore de groupes armés dans le coin…
Le nouveau pauvre pouvoir de Tshisekedi arrivé en janvier 2019 avait promis d’y mettre fin mais ne s’y retrouve plus avec en plus une mafia qu’il a découverte dans l’armée qu’il ne peut encore décanter, des commandants politisés et affairistes difficiles à virer. Guerre asymétrique difficile à affronter, pas de miracle, nos autorités civiles et militaires se doivent de rivaliser d’inventivité, de détermination politique et même de financement pour s’y opposer efficacement même si ils doivent user des moyens autres que militaires après avoir ou en même temps qu’ils restructurent les FARDC, passage incontournable. Et encore ‘l’homme qu’il faut à la place qu’il faut’ : ça sert à cela d’avoir un PR, un PM, un gouvernement, un parlement, une autorité judiciaire, une haute administration, un CEM, ses équipes et ses troupes. Rendons donc à César ce qui est à César et non nous résigner à l’impossible ! A bon entendeur………….
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@ Nous ne sommes pas encore sortis de notre tunnel, pourvu qu’une nouvelle volonté politique nous y aide ;
Le Président Tshisekedi est devant un consortium international sans frontières qui dicte sa loi
au monde entier y compris à l’espace depuis l’indépendance officielle de son pays qui est à ses yeux le centre du monde.
A lui donc d’être à la hauteur de cette situation sans fléchir .
Rien à ajouter, tout à fait d’accord avec les deux analyses, ci-dessus. Bravo.