Un rapport de Global Witness met en lumière l’exportation clandestine d’or par une entreprise chinoise dans le territoire de Shabunda. Selon l’ONG, plusieurs millions de dollars de recettes fiscales échapperaient à l’Etat congolais, alors qu’une partie du trafic financerait également certains groupes armés.
Chaque année 17 millions de dollars d’or sortiraient illégalement des mines de Shabunda, un territoire de l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), à destination de Dubaï. Une enquête de Global Witness révèle qu’une entreprise chinoise, Kun Hou Mining, serait au coeur de ce trafic. Selon l’ONG, une partie de l’or extraite par l’entreprise chinoise se volatiliserait chaque année, probablement vers Dubaï, privant les services fiscaux congolais de plusieurs millions de dollars. Une manne financière qui aurait pu servir à sortir la région de la pauvreté, note Global Witness, qui précise qu’en 2014, « le seul hôpital de la ville a enregistré 535 cas de malnutrition ».
Soutien aux groupes armés
La région de Shabunda a connu une véritable ruée vers l’or ces dernières années. Une course au profit s’est alors engagée entre mineurs artisanaux et entreprises internationales. Une concurrence aigüe dans une région où règne une soixantaine de groupes armés. Dans son rapport, Global Witness soupçonne Kun Hou Mining de financer certains de ces groupes. L’ONG affirme que l’entreprise chinoise a remis aux Raïa Mutomboki « au moins deux fusils d’assaut AK-47 et 4.000 dollars en espèces ». Un soutien qui permettrait à l’entreprise chinoise d’avoir accès aux zones d’extractions. Selon l’enquête « les autorités locales ont aussi collaboré avec les Raïa Mutomboki, s’accordant sur le partage des recettes fiscales. Les taxes perçues par les autorités semblent s’être volatilisées » dénonce également Global Witness.
Prédation et corruption
Sophia Pickles, la responsable de campagne de l’ONG, demande « que le gouvernement congolais applique ses propres lois pour veiller à ce que les entreprises dans son secteur aurifère ne produisent ou ne vendent pas d’or qui a servi à financer des groupes armés. » L’enquête démontre que l’or exporté par Kun Hou Mining vers Dubaï, l’est tout à fait… officiellement ! Des autorités minières auraient masqué la provenance de l’or de Shabunda « indiquant qu’il provenait de mines artisanales du Sud-Kivu opérant légalement ». Sophie Pickles exige que tous les acteurs de la filière minière prennent leurs responsabilités : « Il incombe aux États de s’assurer que les entreprises ne causent aucun préjudice, y compris en vérifiant que les chaînes d’approvisionnement n’ont aucun lien avec le conflit et les violations des droits de l’homme ; la République démocratique du Congo et les Émirats Arabes Unis ont failli à leurs responsabilités à cet égard. »
Christophe RIGAUD – Afrikarabia