Félix Tshisekedi est le nouveau président de la République démocratique du Congo (RDC). Son élection est davantage le fruit de tractations avec le clan de l’ancien président au pouvoir, Joseph Kabila, que du résultat définitif de l’élection présidentielle du 30 décembre 2018. L’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) s’interroge dans cette tribune sur les marges de manœuvres du nouveau président dont la légitimité pose question.
Devant la lourde défaite d’Emmanuel Ramazani Shadary, candidat du clan Joseph Kabila – cf. encadré – l’ancien pouvoir en place n’a pas chercher à maquiller sa défaite en victoire, il a habilement négocié une sortie honorable avec l’opposant le moins hostile en apparence : Félix Tshisekedi.
Alors que les premiers résultats venant de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) – qui avait pu déployer 40 000 observateurs dans les 74 000 bureaux de vote du pays – commençaient à donner vainqueur Martin Fayulu avec plus de 62,11% (16,93% pour Tshisekedi et 16,88% pour Shadary), la CENI – dirigée par un proche de Joseph Kabila – annonce, le 10 janvier 2019, les résultats provisoires. Félix Tshisekedi est donné vainqueur provisoire avec 38,57% des voix tandis que ses adversaires, Fayulu et Shadary obtiendraient respectivement 34,83% et 23,84% des voix. Ces résultats provisoires sont immédiatement contestés par le candidat Fayulu, qui saisit la Cour constitutionnelle. Ses partisans descendent dans les rues pour dénoncer cette mascarade électorale. Les forces de l’ordre répriment avec un usage excessif de la force. Au moins dix personnes sont tuées par balles et plus de vingt-huit autres blessés à Kikwit, Kananga, Goma et Kisangani.
Alors que tous les regards se tournent vers la Cour constitutionnelle qui doit gérer le contentieux présidentiel, la CENI proclame les résultats des législatives, sans avoir reçu tous les résultats. Le Front commun pour le Congo (FCC) – groupement politique du clan de Joseph Kabila – remporte haut la main les législatives avec 337 des 485 sièges. L’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) – le parti de Tshisekedi – ne remporte que 32 sièges… Des résultats pour le moins étonnants s’ils sont comparés aux résultats de la présidentielle dont le vote s’est déroulé le même jour. Le piège s’est refermé.
De nombreuses voix sur la scène internationale – notamment l’Union européenne (UE) et l’Union africaine (UA) – émettent des doutes concernant la victoire définitive de Tshisekedi. Alors que des négociations sont en cours, la Cour constitutionnelle – dont l’indépendance est toute relative vis-à-vis du clan Kabila – prend tout le monde de court : elle rejette les recours de Fayulu et proclame la victoire définitive de Félix Tshisekedi. Son élection est immédiatement saluée par l’Afrique du Sud, le Kenya et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) dont la RDC est membre. C’est la fin des tergiversations. L’élection s’est achevée par « une espèce de compromis à l’africaine » estime le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian L’UE et l’UA lâchent dans les jours qui suivent le candidat Fayulu, au nom de la stabilité, et indiquent êtes prêtes à travailler avec le président élu. La messe est dite. Le 4 mars 2019, les évêques congolais de la CENCO prennent finalement acte des résultats de la présidentielle, tout en rappelant qu’il s’agit d’un « déni de vérité ». Ils appellent les nouvelles autorités à travailler à l’établissement d’un véritable état de droit et de « rompre radicalement avec les antivaleurs des anciens régimes et de donner les assurances concrètes d’une meilleure gouvernance ».
Cela risque d’être difficile car les pro-Kabila du Front commun pour le Congo (FCC), grâce à leur victoire aux législatives, devront composer et diriger le futur gouvernement congolais. Le président Félix Tshisekedi, sans légitimité véritable, est pris au piège de la cohabitation. Son autorité risque d’être bancale durant ses cinq ans de mandat pour entreprendre les nombreuses réformes de fond dont le pays a besoin. Le grand gagnant de ces élections, une nouvelle fois non transparentes, est donc en réalité Joseph Kabila, qui, même s’il n’est plus le président de la République, va vraisemblablement contrôler les leviers les plus importants du pouvoir avec plusieurs ministères régaliens gérés par ses hommes et grâce au contrôle parlementaire de ses députés ultra majoritaires. Quant aux différents services de défense et de sécurité, noyautés depuis des décennies par le clan Kabila, pourront-ils être réformés aussi facilement par le nouveau président ?
En ce début de mandat, Félix Tshisekedi tente de se soustraire du piège Kabila. Alors que le ministère des Affaires étrangères – dirigé par Léonard She Okitundu, un pilier du régime de Joseph Kabila – avait fait fuiter dans plusieurs médias le discours du nouveau président à l’occasion de ses vœux au corps diplomatique, ce dernier, le 15 février, n’a pas demandé la levée des sanctions internationales contre les proches de Joseph Kabila comme ce qui avait été écrit par le ministère des Affaires étrangères. Le 2 mars, Félix Tshisekedi a dévoilé son programme des 100 premiers jours de son mandat. La paix et la sécurité devraient être au centre de ses priorités. Il annonce que tous les détenus politiques seront bientôt libérés et que la sinistre Agence nationale des renseignements (ANR) – qui dépend directement de la présidence – sera réformée afin de lui donner un visage humain. Félix Tshisekedi promet la fin des mauvaises pratiques.
Les nouvelles autorités héritent d’un bilan catastrophique en matière de droits humains. De nombreuses exactions ont été commises en RDC à partir de 1996, notamment à l’occasion de deux conflits régionaux en terre congolaise à la fin des années 90, causant la mort de plusieurs millions de Congolais. Les responsables de ces graves violations des droits humains (forces gouvernementales congolaises et étrangères, rébellions congolaises et étrangères) n’ont jamais été jugés malgré la documentation de ces crimes notamment dans le rapport Mapping des Nations unies. Au contraire, leurs responsables ont souvent été promus à des postes clés au sein des forces de défense et de sécurité congolaises au nom de la paix et de la stabilité. Au milieu des années 2010, au fur et à mesure que le pouvoir de Joseph Kabila a été de plus en plus critiqué par une large majorité de ses concitoyens, les forces de défense et de sécurité congolaises se sont transformées en police politique et la répression est devenu systématique à l’endroit de toute voix contestataire. Les nouvelles autorités seront-elles capables de changer le système de gouvernance mise en place par l’ancien président Joseph Kabila ? Plusieurs mouvements citoyens réclament justice pour toutes les victimes des marches pacifiques organisées ces dernières années
Les attentes des Congolais sont énormes. Ils aspirent à une nouvelle gouvernance, basée sur le respect de leurs droits fondamentaux, la paix, la sécurité et sur un développement homogène du pays au bénéfice de tous.
Dans de nombreuses parties du territoire, l’insécurité perdure. Au Nord-Kivu, la poursuite de la collaboration entre des groupes armés et certains officiers de l’armée congolaise entraîne actuellement une hausse de l’insécurité. Dans la province de Mai-Ndombe, la justice congolaise enquête sur des violences polico-ethniques qui ont causé plusieurs centaines de morts à Yumbi juste avant les élections. Dans le Kasaï, les crimes récents ont fragilisé durablement le vivre ensemble entre communautés. De nombreuses parties du territoire sont laissées à l’abandon par l’Etat. Le défi est énorme.
Malheureusement, la liberté de manœuvre du Président Félix Tshisekedi risque d’être limitée et son pouvoir contrôlé par la majorité parlementaire du Front commun pour le Congo (FCC). Ce mouvement politique – qui a pris naturellement pour autorité morale Joseph Kabila – va avoir cinq ans pour éviter que les acquis obtenus sous les dix-huit ans de règne de Joseph Kabila ne soient retirés aux ex-caciques du pouvoir. Il est fort probable que Joseph Kabila – s’il continue à contrôler la CENI et la Cour constitutionnelle – se présente à l’élection présidentielle de 2023 et reprenne le pouvoir par les urnes à l’issue d’une élection une nouvelle fois peu transparente.
Il faudra donc que l’interprétation de l’article 70 de Constitution – « Le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois » – lui soit favorable. L’écriture de cet article manque de précision sur le fait qu’un ancien président de la République puisse ou pas être candidat à nouveau après une pause d’un mandat. En l’état actuel, la Cour constitutionnelle lui est acquise… En sera-t-il de même dans trois, quatre ou cinq ans ?
De son côté, Martin Fayulu a refusé un poste de député et continue à réclamer la vérité des urnes pour la présidentielle. Il a déposé une requête devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) dans laquelle il revendique 60 % des suffrages. Ses avocats prévoient de saisir d’autres institutions internationales… Mais avec quel espoir ? Jusqu’à ce jour, la CENI n’a toujours pas mis en ligne les résultats détaillés des trois élections qui se sont déroulées en RDC le 30 décembre 2018 (présidentielle, législative, provinciale). Il y a peu de chance que ce soit un jour le cas… Bienvenu en RDC !
Joseph Kabila est arrivé au pouvoir en 2001 à la suite de l’assassinat de son père Laurent-Désiré Kabila, qui avait chassé par les armes le Maréchal Mobutu en 1997. Dans l’impossibilité de se représenter une troisième fois à la présidence de la République du fait d’un blocage constitutionnel, Jospeh Kabila a tenté – à partir de 2014 – de modifier la Constitution afin de se maintenir au pouvoir. Mais la société civile et l’opposition ont fait front commun afin que la Constitution soit respectée et pour que les règles électorales soient maintenues en l’état. Joseph Kabila aurait dû achever son second mandat le 19 décembre 2016. Le 11 mai 2016, la Cour constitutionnelle l’a autorisé à rester en poste le temps du report du scrutin présidentiel. La présidentielle s’est tenue deux années plus tard avec une nouvelle parade de Joseph Kabila et son clan pour rester au pouvoir : Coexister avec un président de façade et gouverner le pays par cohabitation en attendant la prochaine présidentielle de 2023.
Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT)
Félix bizimungu bonobo est un usurpateur de pouvoir. Il finira bientôt très mal
Cher monsieur, cessez de véhiculer les mensonges. Fayulu a gagné des élections selon les médias des multinationales qui cherchent à exploiter le Congo Kinshasa. Fini le temps de manipulation comme vous l’avez fait lors de la guerre médiatique qui a porté mzee Kabila au pouvoir. Le gagnant des élections présidentielles selon l’électorat congolais est au pouvoir.
@Pascal
« Le gagnant des élections présidentielles selon l’électorat congolais est au pouvoir. », dites-vous et en même temps vous prétendez que « Fayulu a gagné des élections selon les médias des multinationales qui cherchent à exploiter le Congo Kinshasa. ».
Une question : donc selon vous, nous devrions croire sur parole la Ceni et la CC parce que ce sont des institutions Congolaises qui par ailleurs n’ont même pas eu ni la dignité ni le courage de respecter les lois auxquelles elles sont soumises – jusqu’à ce jour elles n’ont toujours pas étayé leurs proclamatipns par la publication des chiffres et PV bureau par bureau comme l’exige la loi.
Arrêtez alors vos fantasmes anti-impérialistes, si vous vouliez une preuve de leur inanité, regardez où se trouve celui pour lequel vous semblez avoir voté et aujourd’hui nommé à la tête du pays ? Exactement dans le pays le plus puissant de ceux que vous accusez de manipulation. La vraie défense nécessaire de notre souveraineté c’est autre chose.
Il faut le rappeler encore et encore : des observations neutres et crédibles ont démontré que c’est Fayulu qui a gagné, ce n’est pas Tshisekedi et encore moins Shadarry. Passons maintenant à autre chose, avançons et encore une fois cessez d’ânoner fanatiquement vos fables…
La loi électorale (art. 69-70-71) de la RDC est opposable à la CENI qui doit afficher les résultats des élections de tous les bureaux de vote.
Elle ne le fera sans doute jamais car Led résultats ont été FABRIQUÉS.
Il n’y a qu’à constater la distorsion des résultats entre la présidentielle et les législatives ou provinciales.
L’installation de Félix Tshilombo Tshisekedi à la « présidence » de la RDC est une imposture.
Kabila demeure le maître du temps et des horloges en RDC qui vient de s’installer dans une crise de légitimité sans précédent. Comment voulez-vous voulez que le pays « avance » dans ces conditions?
On peut dire que l’article de Christophe RIGAUD est objectif et pertinent.
Bonne analyse
Cette vérité des urnes sur laquelle les fanatiques ethno-tribalistes de l’UDPS ironisent depuis des semaines n’est pas le combat du seul Martin FAYULU mais de tout le peuple de la RDC.
L’épreuve des faits sera rude pour ceux qui sont subitement frappés du syndrome de Stockholm en applaudissant la coalition (officielle) Kabila-Tshilombo.
Les fanatiques ethno-tribalistes de l’UDPS ne sont pas aveugles, ils savent bien dans leur for intérieur que Félix compte tenu de son inconstance n’a pas été voté par les personnes sérieuses en dehors de 2 Kasaï.
Victoire dans les 11 anciennes provinces :
Equateur, Bandundu, kongo Central, Province Orientale, Kinshasa, Katanga, Sud-Kivu et Nord-Kivu ont voté pour MARTIN FAYULU 8/11
Les 2 Kasaï ont voté pour FELIX TSHISEKEDI 2/11
Maniema a voté pour SHADARY 1/11
Est ce que Félix avec seulement 2 Kasaï peut être gagnant ?
Les fanatiques de l’UDPS savent très bien que Félix a perdu et que MARTIN a gagné parce que sur 11 provinces les résultats étaient ce qui suit :
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MARTIN FAYULU a gagné dans 8 provinces suivantes : Bandundu, Bas-Congo, Equateur, Kinshasa, Katanga, Nord-Kivu, Sud-Kivu et Province Orientale
FELIX TSHILOMBO a gagné seulement dans le Kasaï- oriental et dans le Kasaï occidental
SHADARY a gagné seulement au Maniema
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La sélection présidentielle de la Rdcongo est une honte pour tous congolais qui se respecte. Les lubas en sont conscient. Ils sont lubas avant d’être Congolais. Ce sont les seuls. Les hommes venus d’ailleurs, soutenus par la communauté internationale, le savent et en jouent pour faire éclatée le congo de l’intérieur afin de mieux le balkaniser . Soit ils sont trop stupides et aveugler pour le voir, soit ils voient mais cela n’a pas d’importance pour eux, le ventre d’abord. Ils ne savent pas le traitement qu’on réserve à ceux qui n’ont pas de terre. Ce n’est pas de notre faute si les tutsis se reproduisent bien plus vite que l’espace qui leur ai réserver, à eux de contrôler leur natalité. Ils font la guerre aux bantoues pour leur terre en plein 21e siècle avec la bénédiction des occidentaux. « Ata ndele » avait dit kimbangu…