Une lettre ouverte du Pakar, un parti politique katangais, alerte les notables de la riche province minière de la « mort programmée » de la Gécamines, un des fleurons de l’industrie congolaise. En cause : la mégestion de l’équipe dirigeante.
« Rien ne va plus à la Gécamines » dénoncent les Patriotes katangais aile radicale (Pakar) dans trois lettres envoyées en mars, avril et mai 2015 à des personnalités de Lubumbashi, la capitale du cuivre. Presque un an après le limogeage de son directeur général, le géant minier semble toujours naviguer toujours à vue, entre opacité et corruption. Après le renvoi du directeur de la Gécamines, Ahmed Kalej Nkand, pour des motifs essentiellement politiques – voir notre article, Albert Yuma, le tout puissant président de la société minière, avait annoncé un ambitieux programme de production sur 16 mois. Un plan de développement qui semble toujours au point mort, selon le Pakar.
Plan de relance en panne
Le constat de ce parti politique katangais est sans appel pour la gestion de l’entreprise minière : « une production quasi nulle, des unités à l’arrêt comme dans le concentrateur de Kambove, des contrats toujours aussi opaques, des finances dans le rouge et une situation sociale calamiteuse ( accumulation d’arriérés de salaire, mise à la retraite sans paiement, travailleurs clochardisés…) ». Le programme de relance de la Gécamines prévoyait une production totale de 51.000 tonnes de cuivre, soit une moyenne de 3.000 tonnes par mois. 34 millions de dollars ont été prévus pour financer le projet. Mais selon le Pakar, ce programme « mal conçu et mal ficelé était juste fait pour les besoins de consommation de la Présidence de la République. Huit mois après le lancement de ce programme, la production ne dépassait pas 7.200 tonnes, contre les 23.500 tonnes prévues. Seulement 28% du programme avaient été réalisés. Le programme d’Albert Yuma s’achemine vers un échec ». Deux projets de construction avaient été mis sur pied pour soutenir ce programme : l’un à Kanfundwa et l’autre à Shituru. Ces deux modules devaient contribuer à la production à hauteur de 15.200 tonnes de cuivre. Pour le moment, il ne sont toujours pas encore opérationnels.
Gabegie financière
Le rapport du Pakar dénonce les pratiques peu orthodoxes de la Gécamines avec certains de ses fournisseurs. Parmi les exemples cités, celui de TCB (Technology Business Company) qui a été payé de 600.000 dollars pour l’achat de pièces de rechange pour réhabiliter le concentrateur de Kambove. Visiblement, ce fournisseur n’avait jamais passé un si gros contrat avec la Gécamines. Le Directeur financier avait alors refusé de payer à l’avance ce fournisseur dont « la notoriété et le professionnalisme n’étaient pas encore prouvés ». Mais la somme a tout de même été décaissée par la Direction générale (DG), pendant un déplacement du Directeur financier. Selon le rapport : « non seulement le fournisseur a livré des pièces de rechange d’occasion récupérés dans un concentrateur de Zambie », mais surtout ces pièces se sont révélées non conformes. Résultats : le concentrateur de Kambove est à l’arrêt et continue à connaître des problèmes, « malgré les sommes énormes dépensées ». Dans cette affaire, le Pakar pointe la proximité entre le fournisseur et le DG par intérim, Jacques Kamenga Tshimwanga, « tous deux originaires du Bandundu ». Les nombreux concentrateurs de la région gérés par d’autres compagnies (Boss Mining, KCC ou CMSK), « fonctionnent eux parfaitement » souligne le parti politique.
« Gouvernance autoritaire »
Qu’est-ce qui ne va pas à la Gécamines ? Les anciennes sociétés d’Etat sont devenues petits à petits des sociétés commerciales, gérées comme des entreprises privées avec pour objectif la productivité et la rentabilité. Problème à la Gécamines : « la productivité est chancelante et la rentabilité nulle » affirme le Pakar. En cause : les deux organes qui gèrent la société minière : le Conseil d’administration (CA) et la Direction générale (DG). Pour le Pakar, la cause de ces dysfonctionnements est à cherché du côté de la gouvernance de la société minière. « Depuis un certain temps toutes les décisions ne sont plus prises de manière collégiales, mais unilatérales par le président du Conseil d’administration, Albert Yuma ». Le document dénonce une présidence autoritaire qui peut « chasser ou réprimander à son bon vouloir ». Certains contrats seraient négociés par le président sous en référer aux autres membres du Conseil d’administration. La Gécamines serait donc gérée depuis Kinshasa et le rôle de Directeur général, réduit à celui d’un simple « garçon de courses ». De plus, le DG par intérim, Jacques Kamenga Tshimwanga, aurait peu de compétences dans le domaine minier.
Sur les traces de la MIBA ?
Pour apporter un éclairage plus tempéré à la charge du Pakar contre la gouvernance de la Gécamines, il faut aller chercher du côté de l’animosité quasi ancestrale entre « les Katangais » et « ceux de Kinshasa ». « Qu’avons-nous fait, nous Katangais, pour mériter un tel DG à la tête de notre Gécamines ? Il ne rate pas une occasion pour tirer à boulets rouges sur les Katangais » tempête le Pakar. En creux, il faut y voir la violente lutte d’influence au sein du « clan des Katangais », proche de l’actuel chef de l’Etat, Joseph Kabila – voir notre article. Ce dernier vient en effet de jouer « un mauvais coup » au Katanga, en accélérant à marche forcée la décentralisation du pays, découpant la riche province minière en quatre nouvelles entités – voir notre article. Un contexte qui n’enlève rien des inquiétudes du Pakar, recoupées et relayées pour de nombreuses ONG locales et internationales sur la mégestion de la Gécamines. Le Pakar tire la sonnette d’alarme et demande « un audit indépendant » pour y voir plus clair sur la situation de l’entreprise minière. « Si rien n’est fait, la Gécamines risque de connaître le même sort que la MIBA, aujourd’hui à l’arrêt » prévient en conclusion le Pakar.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Dommage ! Que les autorités de la RDC prennent à coeur le souci du peuple.
C’est vraiment dommage que la GECAMINES puisse se retrouver dans une telle situation si lamentable
Il faut trouver les causes qui sont à la base de cette « mort programmée »
Théophile NKIALULENDO Ponda
Il faut savoir situer ce problème de la Gécamines et je pense qu’il faut éviter de personnaliser le problème Gécamines. Monsieur Jacques Kamenga qui est là ne vaut-il pas mieux que ces prédécesseurs tous originaires du Katanga. C’est depuis 1991 que la Gécamines est aux mains de nos frères katangais et que n’a-t-on pas connu comme misère. Les 48 mois d’arriérés de salaire que les agents ont connu et qui ont été payés par Monsieur Paul Fortin sont l’oeuvre de qui ? N’est ce pas de nos frères qui se sont succédé à la tête de cette entreprise et ce ne sont pas les 2 années de Kamenga qui ont mis la Gécamines par terre. C’est facile d’accuser et de critiquer mais souvent nous avons tendance à oublier volontairement ou involontairement le passé même proche. Donc le problème de la Gécamines n’est pas Kamenga. Lui au moins il y a certains mérites qu’on peut lui attribuer : valorisation des décomptes finals (N.B. avant l’arrivée de l’équipe Kalej et Kamenga, un ouvrier qui a travaillé à la Gécamines pendant 40 ans, avait un décompte final qui pouvait varier de 4.000 $US (quatre mille) à 6.000 $US (six mille), chiffres vérifiables dans les archives Gécamines et c’est avec à la tête des dirigeants originaires du Katanga comme moi. Et celui qui veut faire des enquêtes peut mener des investigations auprès des Services Administratifs de la GCM (DSA) pour s’en rendre compte. Je connais des pensionnés de 1999, 2000 jusque 2009 qui n’ont jamais touché leur décompte final. C’était avec quel dirigeant ? Aujourd’hui, l’ouvrier qui part en pension peut toucher, 14.000 $US à 20.000 $ (chiffres vérifiables) et c’est ce monsieur que vous voulez accuser gratuitement. Je donne un autre exemple : il y a quelques années, pour enterrer un agent Gécamines, c’était un calvaire pour la famille mais ce monsieur a décidé unilatéralement que quand un agent meurt, la Gécamines débourse 2.000 $US pour les ouvriers et 3.500 $US pour les cadres et 5.000 $ pour les directeurs. N’est-ce pas des choses louables qu’on peut mettre à son actif. Le mal de la Gécamines est profond et n’importe qui qu’on mettra à la tête de cette société ne fera rien aussi longtemps que le gouvernement a encore la main mise sur cette société d’Etat.
Pour compléter mon commentaire, nous devons éviter de verser dans le tribalisme qui est un vice et nous devons nous rattacher à des vrais valeurs qui peuvent contribuer au développement de notre province et de notre pays : UN HOMME QU’IL FAUT A LA PLACE QU’IL FAUT SANS DISCRIMINATION ET TOUT IRA MIEUX MAIS QUAND ON MET EN PLACE DES STRUCTURES NON OBJECTIVES POUR DIRIGER VOILA LA CONSEQUENCE : TOUTES LES ENTREPRISES DE L’ETAT SONT PAR TERRE N’EN DEPLAISE AUX TRIBALISTES. P.S. Je suis un chrétien et serviteur de Dieu c’est pour cela je m’insurge contre toute discrimination et le tribalisme en est un.