La police congolaise a empêché l’opposant Etienne Tshisekedi de tenir son rassemblement ce samedi, alors que toute les manifestations ont été interdites par les autorités congolaises. Un meeting avorté que l’opposition refuse de considérer comme un échec.
A la place du meeting du Rassemblement de l’opposition devant le stade des Martyrs, c’est un bien curieux match de football qui se déroulait ce samedi devant l’esplanade Triomphale. Deux équipes de policiers « en civil» s’affrontaient à l’endroit même où l’opposant Etienne Tshisekedi devait prendre la parole. Mais le meeting, interdit depuis plusieurs jours par le gouverneur de Kinshasa, n’a pas eu lieu. Ce samedi 5 novembre, la police congolaise avait pour mission « de disperser tout attroupement de plus de dix personnes. » Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le mot d’ordre a été respecté. Dès les premières heures de la matinée, le boulevard Triomphal et ses alentours a été bouclé par les jeeps de la police et d’importantes forces de sécurité. Conséquence, aucun manifestant n’a pu s’en approcher.
Le responsable de la jeunesse de l’UDPS arrêté
Le deuxième point de fixation de la capitale était le quartier de Limete autour de la maison d’Etienne Tshisekedi où des dizaines de sympathisants avaient prévu de se retrouver. Cette fois, la police a dû utiliser les gaz lacrymogènes pour disperser les militants. Une personne a été blessée dans ces échauffourées et plusieurs manifestants ont été arrêtés, dont un des responsables des jeunes de l’UDPS. « Mokato » est en effet accusé par les autorités d’avoir participé à des pillages d’armes et aux violences des 19 et 20 septembre 2016. En fin de matinée, le secrétaire général de l’UDPS, Jean-Marc Kabund, affirmait vouloir organiser le meeting dans un autre point de la capitale… en vain. Le dispositif policier et la faible mobilisation des manifestants a empêché tout nouveau rassemblement, à l’exception de quelques pneus brûlés signalés dans le quartier de Selembao.
RFI et Radio Okapi réduites au silence
Comme c’est devenu l’habitude depuis deux ans, à chaque journée de mobilisation de l’opposition, le signal de Radio France Internationale (RFI), la station la plus écoutée à Kinshasa, a été coupée, obligeant la population à se brancher sur la fréquence de Brazzaville, émettant depuis l’autre côté du fleuve. Mais cette fois-ci la censure s’est aussi abattue sur la radio onusienne Okapi, financée par les Nations unies, dont les émissions ont été brouillées pour la première fois dans la capitale. Preuve que cette journée de samedi était redoutée par les autorités congolaises. L’ONU a regretté le brouillage de sa station ainsi que la coupure de l’émetteur de RFI et a dénoncé une nouvelle fois l’interdiction de manifester décrétée par les autorités congolaises, « les libertés de manifestation, de réunion et d’expression étant les conditions indispensables pour une démocratie. »
Coup dur pour l’opposition
Pour la police congolaise, la journée de samedi est « une réussite ». Une journée « sans meeting, sans blessé et sans mort » s’est félicité son porte-parole le colonel Mwanamputu au micro de France 24. Il faut dire que les autres mobilisations autorisées avaient été réprimées dans la violence, notamment en septembre 2016 où une cinquantaine de morts était à déplorer. Du côté de l’opposition, on se refuse de parler d’échec après ce meeting avorté. Mais c’est pourtant un vrai coup dur pour les opposants à Joseph Kabila. C’est en effet la première fois qu’un meeting est interdit et que la police parvient à en empêcher la tenue. Une situation inédite qui sonne comme une petite victoire pour le pouvoir en place à Kinshasa, mais surtout pour Joseph Kabila empêtré dans une crise politique profonde.
Faible mobilisation
Première satisfaction pour le président congolais : la police a pu quadrillé efficacement la capitale pour éviter le rassemblement. Deuxième satisfaction : la capacité de mobilisation de l’opposition semble connaître un vrai trou d’air. Après les violences de septembre, la journée ville morte qui a suivi a été faiblement respectée et les manifestants de ce samedi, même empêchés par la police, étaient bien peu nombreux et essentiellement concentrés dans le quartier de Limete. Selon l’AFP, à 8h15, il n’y avait qu’une soixantaine de jeunes dans la rue devant le siège de l’UDPS au moment où la police a décidé de les disperser. Pour expliqué l’absence de mobilisation, l’opposition dénonce une répression grandissante et meurtrière qui décourage les Congolais à descendre dans la rue.
Une nouvelle stratégie pour le 19 novembre ?
Pourtant, la contestation n’est-elle pas en train de s’essouffler ? Il est encore trop tôt pour le dire. Le Rassemblement a annoncé le report de son meeting de samedi pour le 19 novembre, un mois avant la fin du mandat de Joseph Kabila. Face à une très probable nouvelle interdiction de manifester, le Rassemblement devra sans doute trouver une autre stratégie pour mobiliser ses militants dans la rue et se faire entendre. L’opposition ne peut pas se permettre un nouvel échec. Car le Rassemblement compte sur la rue pour faire plier Joseph Kabila et l’obliger à quitter le pouvoir au soir du 19 décembre 2016. De son côté, le président Kabila espère bien que la nomination d’un nouveau gouvernement intérimaire et l’essoufflement des mobilisations de rues lui permettra de passer sans encombre la date fatidique du 20 décembre et rester dans son fauteuil jusqu’aux prochaines élections… au plus tôt fixées fin avril 2018.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Mr Christophe, etes vous convaincu que les opposants congolais , ainsi que leur chef acceptent l’organisaation des elections dans ce pays ????je gardes mes doutes la-dessus compte-tenu des strategie de choix du rassemblement. Refus du dialogue, refus de loi et ordres, bref refus total de l’autorite etablie. Est il possible d’obtenir un quelconque dialogue inclusif avec un des partenaires qui refuse son inclusion ? Soyez rationel Mr Christophe, eclairez nous la dessus.
Pour le moment, vous avez raison : l’intransigeance de l’opposition n’a pas encore payé.