Le patron de la Monusco quittera ses fonctions le 31 octobre 2015 après deux ans passés à la tête la mission de l’ONU en République démocratique du Congo (RDC). Un départ qui intervient dans un climat politique tendu, alors que les retards se multiplient dans l’organisation des prochaines élections. Le moment est-il mal choisi ?
On l’avait presque oublié, mais le mandat du représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en RDC touche (déjà) à sa fin. Martin Kobler, également patron de la plus importante mission de casques bleus dans le monde, avec 20.000 hommes, quittera le Congo le 31 octobre prochain. Arrivé en juillet 2013 en plein conflit entre la rébellion du M23 et l’armée congolaise, Martin Kobler s’était très vite coulé dans la fonction, faisant rapidement oublié le bilan très mitigé de son prédécesseur, Roger Meece.
Des réussites
Le début du mandat de Martin Kobler a été marqué par un retour en force des casques bleus dans l’Est du pays, en conflit permanent depuis plus de 20 ans. Pendant de nombreuses années, la Monuc, puis la Monusco, n’avait pas brillé sur le terrain militaire. « Impuissance » et « passivité » étaient alors les deux vocables les plus utilisés pour définir l’action (ou plutôt l’inaction) de l’ONU en RDC. A son actif, Martin Kobler aura donc réussi à mettre en musique la fameuse la Brigade d’intervention de la Monusco pour contrer la mainmise des rebelles du M23 au Nord-Kivu. Contrairement aux autres troupes onusiennes, la Brigade était dotée d’un nouveau mandat plus offensif, lui permettant d’utiliser la force pour venir à bout du M23, en appuyant l’armée congolaise. La Brigade a donc été un double succès : elle a permis de vaincre militairement le M23 en novembre 2013 et de redonner un éphémère soupçon de crédibilité aux casques bleus et à l’armée régulière.
Des groupes armés persistants
Mais le succès militaire sur le M23, cache mal une situation sécuritaire plus complexe et plus volatile dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Une trentaine d’autres groupes armés sévissent toujours dans cette zone, malgré la présence des casques bleus. Au Nord du Katanga, Martin Kobler a eu du mal à juguler les exactions des Bakata Katanga dans ce qu’on appelle encore le « triangle de la mort » entre Manono, Mitwaba et Pweto. Le désarmement d’une autre milice, les FDLR, s’est également avéré « trop timide ». Seuls 350 rebelles sur les 3.000 estimés se sont rendus. Les relations avec l’armée congolaise se sont également dégradées. La Monusco accusant (avec justesse) certains gradés congolais d’exactions et de trafics. Depuis, la coopération militaire entre l’ONU et l’armée régulière (FARDC) est au point mort.
Timides pressions sur Kinshasa
Sur le plan politique, Martin Kobler a su jouer l’équilibriste qui permet à la fois de pouvoir mettre la pression sur les autorités au sujet les droits de l’homme, des arrestations arbitraires, ou de la répression policière… sans rompre le dialogue avec Kinshasa. Sur le plan intérieur, le rôle du représentant spécial du secrétaire général des Nations unies est resté très réduit… au risque de l’ingérence. Et ce sont évidemment toutes les limites de la fonction de Martin Kobler, qui n’a pas su éviter les arrestations en masse d’opposants politiques, la censure des médias ou la violente répression des manifestations de janvier 2015 par les services de sécurité congolais.
Moment mal choisi ?
Si le départ de Martin Kobler n’est pas une surprise, le chef de l’ONU quitte le Congo à un moment charnière de son histoire. Le président Joseph Kabila, en place depuis 2001, doit quitter le pouvoir fin 2016. Selon la Constitution, le président congolais ne peut en effet pas briguer de troisième mandat. Mais Joseph Kabila laisse planer le doute sur ses réelles intentions. L’opposition craint qu’il ne cherche par tous les moyens à se maintenir au pouvoir au-delà du délai constitutionnel de 2016 en faisant « glisser » le calendrier électoral. Martin Kobler part, alors que justement les retards s’accumulent concernant l’organisation des prochains scrutins de 2015 et 2016. L’ONU a toujours joué un rôle-clé dans la préparation des élections de 2006 et 2011. Cette dernière, s’était d’ailleurs terminée par des fraudes massives. Est-ce le bon moment pour partir ? Certainement pas. L’ONU a d’ailleurs demandé à la Monusco de « veiller à la transparence et à la crédibilité du processus électoral ». Il y aura donc du pain sur la planche pour le nouveau représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en RDC. L’adjoint de Martin Kobler, l’Américain David Gressly pourrait d’ailleurs lui succéder.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Bonjour,
Il y a certains points qui ne sont pas clairs dans votre article. La MONUSCO ex MONUC est une institution. Les hommes passent et elle reste. Le départ de Martin ne l’affectera a rien comme celui de Roger Meece ne l’a affecté a rien.
M. Kobler a fait son travail qui n’était que la continuité de celui de Roger Meece. C’est exactement Roger Meece qui avait planifie, en collaboration avec le gouvernement congolais, le départ du M23 en mettant en place le FIB (Brigade d’Intervention). Et cela après des études et expériences.
La réussite des opérations militaires se prépare et cela demande du temps. Et pendant la préparation il faut un silence, c’est ce que beaucoup appellent « l,INACTION » ou « l’INCOPETENCE » de la MONUSCO. La MONUSCO a pour mission d’accompagner le gouvernement à neutraliser les groupes armes. Mais pas a n’importe quel prix car pour la MONUSCO, un mort de plus est de trop et ne devrait pas être souhaite. Voila pourquoi il faut du temps pour étudier et comprendre tous ces phénomènes et aider à apporter une paix durable.
Merci
Philippe