Joseph Kabila joue la normalisation avec la nomination d’Augustin Matata Ponyo comme nouveau Premier ministre de la République démocratique du Congo (RDC). 5 mois après des élections contestées, l’arrivée de Matata Ponyo à la primature vise avant tout à rassurer les bailleurs de la RDC. Ce technocrate de 47 ans constitue le nouvel atout économique de Joseph Kabila et disposera d’une importante marge de manoeuvre à la tête de son gouvernement.
Le « survivant » Augustin Matata Ponyo revient de loin. Le 12 février 2012, Matata Ponyo était ministre des finances de RDCet se trouvait à bord de l’avion Katanga Express qui s’est brisé dans un ravin sur la piste de l’aéroport de Bukavu. L’accident fait 6 morts, dont l’éminence grise de Joseph Kabila, Augutin Katumba Mwanke. Depuis ce jour, son nom était de plus en plus souvent cité au Palais pour la primature. Car, au-delà de sa nouvel aura de « survivant », Matata Ponyo possède plusieurs atouts pour la président Kabila.
Après un cycle électorale calamiteux, entaché de nombreuses irrégularités, Joseph Kabila se devait de rassurer la communauté internationale et principalement les multiples bailleurs de la RDC. Le pays vit en effet depuis plus de 15 ans sous perfusion de l’aide internationale. Augustin Matata Ponyo a l’avantage de connaître parfaitement les grands équilibres macroéconomiques, ainsi que les principales institutions internationales. Formé en économie monétaire et internationale à l’Université de Kinshasa, où il a été professeur assistant, il a ensuite suivi une carrière au sein de la Banque Centrale du Congo (BCC) et a été plusieurs fois conseiller économique du ministère des finances.
Arrivé au poste de Ministre de finances en 2010, Matata Ponyo stabilise l’économie nationale et obtient une réduction de la dette de la RDC de 12,3 milliards de dollars. Un tour de force dont les Congolais ne verront pas vraiment les effets : les prix augmentent, les salaires stagnent et 80% de la population vit toujours avec moins de 2 dollars par jour.
Sur le plan politique, le choix d’Augustin Matata Ponyo à la primature constitue un compromis intéressant pour le président Kabila. Entre les « purs et durs » du PPRD (le parti présidentiel) et « l’ouverture » à l’opposition (dont Kabila ne voulait pas), le choix d’un « techno » s’imposait. Avec Matata Ponyo, Kabila joue l’apaisement avec la communauté internationale et pourra toujours « débaucher » quelques personnalités issues de l’opposition dans le nouveau gouvernement pour afficher une « ouverture » de façade. Dernier élément concernant le nouveau premier ministre congolais : Matata Ponyo sera sûrement le premier à ce poste à disposer d’une marge de manoeuvre aussi importante à la tête du gouvernement congolais (depuis Gizenga et Muzito)… encore faudra-il qu’il en fasse quelque chose ?
Christophe RIGAUD