La divulgation d’un projet de loi sur les modalités d’organisation d’un référendum fait craindre une possible modification de la Constitution permettant au président Joseph Kabila de se représenter en 2016.
Le texte qui a fuité sur les réseaux sociaux est une proposition de loi portée par deux députés de la majorité présidentielle : Lucain Kasongo et Simplice Ilunga – voir le document ci-dessus. Ce dernier venant d’être opportunément nommé ministre des transports lors du récent remaniement gouvernemental. Du côté de la majorité présidentielle, on explique que la Constitution actuelle n’autorisant pas à la RDC d’organiser facilement des référendums, ce texte, permettrait de consulter les Congolais sur de nombreux sujets. Mais pour l’opposition congolaise, l’organisation d’un référendum pourrait être un subterfuge pour modifier la Constitution et autoriser le président Joseph Kabila à briguer un troisième mandat. Une modification du texte fondamental qui résonne particulièrement ce week-end à Kinshasa, alors que dans la capitale voisine, Brazzaville, une importante manifestation se déroule à pour empêcher le président Sassou Nguesso de « tripatouiller la Constitution » pour s’accrocher au pouvoir.
Ballon d’essai
Pour le moment, nous ne savons évidemment pas si le texte sera adopté et quel sera le contenu du référendum. Si l’article 220 de la Constitution, qui interdit au président de briguer plus de deux mandats consécutifs, est verrouillé, un référendum pourrait proposé de réécrire une nouvelle Constitution, faisant ainsi table rase du passé. Sur Twitter, les opposants au troisième mandat de Joseph Kabila se sont rapidement manifestés, et notamment le fameux G7, qui rassemble les frondeurs de la majorité présidentielle et qui affirme qu’avec ce projet de référendum « le peuple Congolais n’est pas dupe ». Vital Kamerhe, le leader de l’UNC a décidé d’interpelé directement le Premier ministre sur le réseau social : « rappelons au peuple de la #RDC l’art 218 : deux députés ne peuvent initier le référendum constitutionnel. L’objet du référendum doit être précis », avant de demander « une clarification » à Augustin Matata Ponyo. La réponse, cinglante, ne s’est pas faite attendre : « c’est mieux d’adresser la requête à l’Assemblée nationale d’où est venu le projet de texte ! ». Plus ironique, un internaute se demandait « comment le gouvernement pouvait vouloir organiser un référendum, alors qu’il n’avait pas l’argent pour organiser les élections ? ». Le calendrier électoral est en effet particulièrement malmené actuellement. Par manque de moyens financiers et d’organisation, le cycle électoral prend un retard inquiétant.
Pari risqué
Dans un climat de crise politique aiguë et après les démissions en cascade des frondeurs de la majorité, la révélation de ce projet de texte apparaît bien osé pour le camp présidentiel. Les opposants au troisième mandat se font de plus en plus nombreux, même au sein de la famille présidentielle, et l’opposition a déjà fortement mobilisé dans la rue, mi-septembre pour le départ de Joseph Kabila en 2016. Si ce texte venait à être adopté, il pourrait faire l’effet d’une bombe dans ce contexte de défiance exacerbé. En janvier 2015, un projet de loi électoral liant la tenue des élections à un recensement de population avait provoqué une importante mobilisation populaire… ainsi qu’une violente répression policière (« au moins 42 morts » selon les ONG internationales). Devant la pression de la rue, le gouvernement avait reculé et le texte litigieux abandonné. Joseph Kabila retentera-t-il l’expérience avec un référendum ? Pas si sûr. Un simple glissement du calendrier électoral permettrait au chef de l’Etat de se maintenir au pouvoir au-delà du délai constitutionnel… sans toucher la Constitution.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
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