La signature de l’accord de paix entre le gouvernement congolais et les rebelles du M23, prévue le 11 novembre à Kampala, a été reportée sine die. En cause : la dénomination du texte, mais aussi le sort des ex-rebelles, la transformation du M23 en parti politique et des raisons de politique intérieure. Explications.
Nouvel échec à Kampala. L’accord de paix entre les autorités de République démocratique du Congo (RDC) et la rébellion du M23 fixé, le 11 novembre en Ouganda, n’a pas été signé et aucune nouvelle date fixée. Pourtant jusqu’au dernier moment, tout semblait être déjà écrit. L’Ouganda, la communauté internationale et les rebelles, annonçaient en coeur ,à qui voulait l’entendre, un « accord historique » pour l’Est du Congo. Mais à 17h00 ce lundi, quelques minutes avant la signature, le gouvernement congolais a fait volte-face. Pour quelles raisons ?
Le chat et la souris
Pour le comprendre, il faut faire un petit retour en arrière. Le gouvernement congolais s’est toujours rendu aux négociations de paix de Kampala à reculons. Des pourparlers jugés « humiliants » par Kinshasa. La prise de la ville de Goma par les rebelles du M23 en novembre 2012 pousse le gouvernement congolais, sous pression internationale, à engager un dialogue avec la rébellion. Les rebelles se retirent alors de Goma et Kinshasa accepte d' »écouter » les revendications de la rébellion. Kampala ouvre les pourparlers le 9 décembre 2012. Pendant onze mois, rebelles et autorités congolaises jouent au chat et à la souris en Ouganda. Aucune des deux parties ne veut faire de concessions. A l’époque le M23 domine militairement l’armée congolaise et Kinshasa ne souhaite rien lâcher aux rebelles sous prétexte d’affaiblir son régime déjà mal en point après la réélection contestée de Joseph Kabila. Mais rapidement le vent tourne sur le terrain militaire.
La Brigade arrive, les parrains s’abstiennent
La communauté internationale, accusée d’inefficacité à l’Est du Congo depuis 10 ans, décide de montrer ses muscles face aux rebelles. Une première. L’ONU décide de créer une Brigade d’intervention munie d’un mandat offensif, chargé de « neutraliser les groupes armés ». Entre temps, Joseph Kabila, poussé par la pression politique, réorganise ses bataillons dans les Kivus. Kinshasa change le commandement des FARDC et décide (enfin) de nourrir, payer et armer ses soldats. Résultat : en quelques semaines, l’offensive des FARDC, appuyée par l’ONU, chasse les rebelles de tous ses bastions du Kivu. Dernier coup de grâce : les parrains rwandais et ougandais, sous pression de l’ONU et des Etats-unis, refusent de venir en aide au M23. Les rebelles s’enfuis vers l’Ouganda et le Rwanda. Fin de partie pour le M23 qui annonce le 5 novembre 2013 « mettre un terme à sa rébellion ».
Changement de cap
A ce moment précis, que reste-t-il à négocier à Kampala ? Rien. Joseph Kabila à gagner militairement (une première) et souhaite bien en tirer partie politiquement. Toute concession à la rébellion accréditerait la thèse, très répandue à Kinshasa, du double jeu que jouerait le président Kabila : combattre les rébellions tout en donnant des gages à Kigali. En 2009, après l’arrestation du rebelle Laurent Nkunda par le Rwanda, Joseph Kabila à inviter les troupes de Kigali sur le sol congolais pour lutter contre les rebelles hutus des FDLR. A l’époque, cette « collaboration » avait beaucoup divisée à Kinshasa. En 2013, la stratégie du président Kabila a changé. Le président Kabila cherche à briguer un troisième mandat et la popularité acquise après les victoires de l’armée congolaise pourrait lui être bien utile pour changer à sa convenance la Constitution qui lui interdit de se représenter en 2016.
Les raisons de l’échec
A Kampala, Kinshasa a donc un tout autre agenda dans la tête qu’une simple signature d’un accord de paix avec le M23. A la veille de nommer un nouveau gouvernement censé élargir sa majorité présidentielle, Joseph Kabila est particulièrement sensible aux appels de la classe politique congolaise qui le somme de ne rien concéder aux rebelles : ni intégration dans l’armée, ni intégration politique et encore moins partage du pouvoir. Ce lundi, la délégation gouvernementale a donc rejeter plusieurs points de l’accord avec le M23. Tout d’abord le terme du document : « accord de paix ». Kinshasa souhaitait signer une « déclaration » signifiant la reddition du mouvement armé. Voilà pour la version officielle donné par le facilitateur ougandais. Mais dans la balance, le sort des ex-rebelles a également pesé dans le « report » de signature. Kinshasa voudrait voir les principaux chefs militaires du M23 jugés au Congo pour les crimes commis. Mais pour le moment, l’Ouganda qui abrite le commandant militaire du M23, Sultani Makenga, a fait connaître son refus de livrer les rebelles. Kinshasa a donc « puni » Kampala par son refus de signer l’accord ce lundi. Concernant la mutation du M23 en parti politique, la délégation gouvernementale semble également avoir fait marche arrière. Désormais Kinshasa ne souhaite pas voir ce mouvement intégrer l’échiquier politique congolais. Raison invoquée : le M23 n’est pas un parti agréé par les autorités congolaises. Raison moins avouable : les autres partis politiques que tente actuellement de séduire Joseph Kabila pour intégrer son gouvernement d’union nationale, verraient l’arrivée du M23 à Kinshasa d’un très mauvais oeil. Ce sont donc des raisons de politique intérieure qui ont forcé Joseph Kabila à reculer juste avant la signature de l’accord ce lundi. Il n’y a donc pas de vraie surprise dans cet échec de Kampala. Sans date fixée pour un nouveau rendez-vous, la balle est désormais dans le camp ougandais et rwandais. Kampala et Kigali doivent régler la difficile équation du sort des chefs militaires du M23.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Photo : Montagnes du Kivu © DR
Cet échec était prévisible; les congolais ont la suite dans les idées, nous annoncions que cet accord peut ou ne pas être signé, ce qui est important c’est l’accord-cadre d’Addis-Abeba et c’est de cet accord qu’il s’agit pour pacifier l’Est de notre pays! Le sort des belligérants est déjà là; tout au départ ils étaient nulle part, et aujourd’hui, les congolais les laissent aussi nulle part! point Barre!!!!Ils doivent répondre de leurs actes de barbarie, eux et leur commanditaire!!!