Depuis samedi 1er décembre, un groupe de quatre Congolais a entamé une grève de la faim devant l’église du Sacré Coeur à Paris. Ils dénoncent la guerre meurtrière en République démocratique du Congo (RDC) et demandent la création d’un Tribunal pénal international pour les crimes au Congo.
Déjà trois jours de grève de la faim pour Pierrot, Hervé, Nicole et Angélique, quatre jeunes Congolais du RNC (1). Emmitouflés dans leurs anoraks, les grévistes de la faim cachent mal la fatigue et le froid qui commence à les gagner dans ce parc au pied du Sacré Coeur, dans le 18ème arrondissement de Paris. Depuis samedi 1er décembre, ce petit groupe a décidé de dénoncer la guerre qui frappe depuis plus de 16 ans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), en cessant de s’alimenter. La décision n’a pas été prise à la légère. Après avoir « épuisé tous les moyens de pression » pour sensibiliser le public au calvaire du peuple congolais, Hervé ne voyait plus que la grève le faim pour faire bouger les choses. Une « conduite extrême« , comme il le dit, qui n’est rien au regard des millions de morts, des viols et crimes atroces commis en RDC, dans l’indifférence générale de la communauté internationale.
« L’arme judiciaire »
Au milieu du petit groupe, on trouve maître Hamuli Rety. président du CRID (2) et avocat, notamment auprès du Tribunal pénal international pour le Rwanda. Ce juriste n’est pas en grève de la faim, mais défend une idée simple, partagée par les grévistes : « si les solutions militaires, politiques et diplomatiques ont toutes échoué depuis plus de 15 ans, pourquoi ne pas utiliser l’arme judiciaire ». Maître Réty plaide pour la création d’un Tribunal pénal international pour le Congo, à l’image de celui créé pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie.
16 années de perdu
Pour justifier la pertinence de sa proposition, Hamuli Rety fait d’abord le constat des échecs passés. « Toutes les solutions proposées par la communauté internationale ont été de « bonnes-mauvaises » solutions » ironise-t-il. Et d’énumérer : « les négociations entre victimes et belligérants, entre agresseurs et agressés, le brassage des armées (intégration des rebelles dans l’armée régulière, ndlr) qui a été une aberration, les accords de Sun City, le partage du pouvoir (le fameux 1+4, ndlr), tout a échoué !« . « Les enfants qui avaient 5 ans à l’arrivée de l’AFDL (la première rébellion de 1997, soutenue également par le Rwanda, ndlr) ont aujourd’hui 20 ans. C’est pratiquement toute une génération qui a été sacrifiée« , explique-t-il.
La suite du Tribunal pénal international sur le Rwanda (TPIR)
Selon maître Rety, seul un Tribunal pénal international peut être efficace. « On a parlé de la création d’une Cour spéciale (comme au Liban pour l’assassinat de Rafic Harriri, ndlr), mais aujourd’hui le Congo de Joseph Kabila, le Congo de l’AFDL, du RCD est incapable d’organiser des procès justes et équitables puisqu’ils sont parties prenantes« , fait remarquer cet ancien avocat du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Fort de son expérience d’Arusha, le siège du TPIR, Hamuly Rety souhaiterait que le Tribunal pénal international pour le Congo soit la continuité logique de celui pour le Rwanda. « Rien que pour des raisons de rationalités budgétaires, le tribunal existe déjà, il est rodé, les matériaux judiciaires existent, la jurisprudence, les pièces à conviction sont là« , explique maître Rety, « or ce qui se passe au Congo, c’est pratiquement la continuité du génocide rwandais. Les acteurs des massacres au Congo sont pratiquement les mêmes« . Enfin, preuve pour cet avocat de l’efficacité de cette juridiction : les succès remportés en ex-Yougoslavie, au Libéria ou en Sierra-Leone. Reste maintenant à maître Rety de convaincre la communauté internationale… une lourde tâche en perspective.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia