Une juge de Lubumbashi dénonce les menaces dont elle a été victime pour condamner Moïse Katumbi à trois ans de prison dans une affaire de spoliation biens. Selon la juge, cette condamnation visait seulement à rendre le candidat à la présidentielle inéligible. Les autorités dénoncent « une machination ».

Chantal Ramazani affirme a reçu des pressions de sa hiérarchie et des services de renseignements © DR
Une juge en fuite, un dossier truffé d’irrégularités et un jugement prononcé en moins de 24 heures pour discréditer un adversaire politique du pouvoir… il n’en fallait pas moins pour raviver les soupçons de chasse aux sorcières dont sont victimes les anciens alliés de Joseph Kabila passés dans l’opposition. Dans une lettre adressée à l’Union européenne, à l’Union africaine et au chef de la mission de l’ONU au Congo, Chantal Ramazani Wazuri, juge à Lubumbashi, dénonce dans une violent réquisitoire les pressions dont elle a été victime dans « l’affaire Katumbi ». L’ancien gouverneur du Katanga était accusé de spoliation de biens immobiliers et condamné à 3 ans de prison. Une accusation qui a toujours été contestée par le principal intéressé qui considère l’affaire comme « un montage grossier » pour écarter un adversaire politique au camp présidentiel. Dans sa lettre, la juge raconte les pressions morales et physiques exercées par sa hiérarchie ainsi que par les services de renseignements congolais (ANR). Chantal Ramazani dénonce les menaces pour qu’elle applique sa signature sur le jugement condamnant Moïse Katumbi. Selon la juge, le but de cette manœuvre était d’écarter l’ex-gouverneur du Katanga de la course à la présidentielle. « J’ai été obligée (…) de condamner monsieur Moïse Katumbi » en vue « d’obtenir son inéligibilité » écrit la magistrate qui met en cause directement le patron de l’ANR, Kalev Mutond. Face aux pressions, Chantal Ramazani a fui la République démocratique du Congo (RDC) et se trouverait actuellement à Bruxelles dans le but de demander le statut de réfugié.
Une affaire politique
Fait excessivement rare, les renseignements congolais, toujours avares de déclarations à la presse, sont sortis de leur silence pour réagir à la missive de la juge de Lubumbashi. L’ANR doute d’abord de l’authenticité du document avant de remettre en cause la « véracité du contenu », contestant les accusations visant le numéro un de l’ANR « bouc émissaire préféré des délinquants et autres criminels » (sic). L’agence estime que « cette lettre n’est qu’une machination pour dédouaner à vil prix une personne condamnée » et demande à la justice « qu’une enquête soit ouverte ». Il faut tout de même constater que l’affaire revêt une connotation fortement politique. Car depuis deux mois, Moïse Katumbi est à l’étranger (officiellement pour raison médicale) dans l’espoir d’un retour rapide au Congo. Mais depuis cette condamnation à 3 ans de prison dans cette affaire de spoliation, l’homme d’affaires risque la prison dès qu’il rentrera au Congo. C’est du moins ce que le ministre de la justice congolais, Alexis Thambwe Mwamba, a déclaré récemment aux médias locaux. « L’affaire Katumbi » retarde donc le retour au pays de l’ancien gouverneur du Katanga, condition sine qua non pour mener à bien son projet politique. L’exil médical arrange cependant les affaires du pouvoir en place à Kinshasa, qui ne voit pas d’un très bon oeil le retour d’un adversaire de poids au camp présidentiel. Avec cette épée de Damoclès au dessus de la tête, Moïse Katumbi n’a pas pu rejoindre Kinshasa avec son nouvel allié, Etienne Tshisekedi, dont le retour triomphal dans la capitale congolaise, a privé le candidat à la présidentielle d’un bain de foule aux côtés du doyen de l’opposition. Le témoignage de la juge Ramazani tombe à point nommé pour Katumbi qui projette de rentrer en RDC pour le 31 juillet prochain, date de la grande manifestation de l’opposition… une rendez-vous incontournable pour le candidat à la présidentielle.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Si vos déclarations sont exactes, je vous félicite madame pour votre courage et les dénonciations de « ces mafias africaines post coloniales » qui pillent les caisses de l’État en s’enrichissant au-delà de la raison, qui piétinent les libertés individuelles en exerçant des pressions sur les autorités judiciaires pour condamner et écarter des opposants politiques…Ces mafias au pouvoir qui ne sont là que pour se servir. Vous au moins avez eu le courage de prendre vos responsabilités en les dénonçant plutôt que de leur servir de faire valoir. Ce que vous avez eu le courage de faire,d’autres chez vous ou ailleurs et pas si loin que cela de chez vous se sont assis sur les concepts de droits appris dans les grandes universités du monde pour préserver leurs intérêts mesquins. BRAVO A VOUS ET MERCI!
Désobéissante : Mme Chantal Ramazani Wazuri est une lanceuse d’alerte, une héroïne et patriote.
Un nouveau mouvement planétaire est en marche. Ses héros s’appellent Edward Snowden, Julian Assange, Irène Frachon, Hervé Falciani, mais aussi Mme Chantal Ramazani Wazuri, la juge présidente du Tribunal de Paix de Kamalondo à Lubumbashi.
En l’espace de quelques années, ils ont brisé le silence. Quelquefois au prix de leur carrière ou de leur liberté, ils ont révélé au grand jour les versants sombres de nos sociétés.
Si les lanceurs d’alerte ont des motivations diverses, tous sont inspirés par un dessein commun : de dénoncer l’inacceptable, l’injustice des lois, des procédures. Ils ont eu cependant l’immense mérite de faire valoir l’idée que les hommes, s’ils veulent, ont à chaque instant la capacité de s’opposer efficacement à ceux qui détiennent la puissance étatique, le pouvoir et qui parfois les oppriment. C’est le cas de Mme Chantal.
L’édifice d’un système politique qui prévaut dans une société repose tout entier sur la collaboration volontaire, résignée, fataliste, des femmes et des hommes qui la constituent.
Tout s’écroule si ces derniers décident de mettre fin à cette collaboration. Et quand le plus grand nombre conteste la légitimité d’un régime – comme c’est le cas de la RDC actuellement, ce n’est pas un lanceur d’alerte qui se lève, mais des millions. Qu’est-ce que vous faites les élites et les masses populaires ?
Du droit de résister à la tyrannie au devoir de désobéir à un ordre manifestement illégal, on n’attend pas le dernier coup de sifflet. La désobéissance implique un passage à l’acte, c’est-à-dire une transgression plus ou moins consciente de la loi, qui se distingue nettement de la protestation, même si elle peut s’accompagner parfois d’illégalisme.
Quand un mouvement de protestation collective devient un mouvement qui revendique le fait de désobéir aux lois, on s’approche graduellement et par étapes d’un mouvement collectif de désobéissance civile. Il est plus que temps pour que notre peuple prenne conscience qu’il a le pouvoir de défier et finalement de défaire l’empire du mal qui l’asservit, sans recourir à la violence, mais en refusant simplement d’obéir à des lois car nous sommes gouvernés par une bande des maffiosi.
Au lieu de parler du dialogue dans toutes ses coutures, voilà l’occasion toute donnée de se dresser – comme un seul homme – pour amplifier cet acte de bravoure de Chantal Ramazani, une héroïne moderne qui bravant tous les risques de cette camarilla qui nous gouverne, rebattant en tout cas toutes les cartes de sa vie, semble vouloir privilégier l’intérêt général à l’exclusion de tout intérêt personnel. Elle est parmi les nouveaux désobéissants de notre époque qu’il faudra protéger car elle fait partie de ceux dont la capacité d’insurrection prolonge les fulgurances courageuses de Martin Luther King ou Gandhi, après l’émancipation de la minorité noire aux Usa ou du peuple indien face à la tutelle coloniale. D’autres émancipations se mettent en mouvement aujourd’hui.
En agissant ainsi tout comme le consultant à la NSA (National Security Agency), Mme Chantal a agi comme Edward Snowden qui a fui les USA en juin 2013 pour Hong-Kong d’où il faisait ses révélations sur le système d’écoute mondial et il déclara : « Je suis prêt à tout sacrifier, car je ne peux pas, en conscience, laisser le gouvernement détruire la protection de la vie privée. »
Paul Watson défend la biodiversité, Hervé Falciani l’idée de faire de la finance un allié de l’économie réelle et du bien-être des citoyens – et non pas un gigantesque gruyère de trous noirs – et Snowden, lui, l’un des droits de l’homme les sacrés du XXIè siècle : la préservation de l’intimité et de la vie privée.
Quand à Chantal Ramazani Wazuri, à travers sa lettre, elle a démontré la gestion scabreuse de la justice en RDC qu’il s’agit d’un « Etat de droit failli » et sa révélation est un antidote démocratique contre toutes les manipulations et les dénis. A travers son acte courageux et patriotique, elle a ébranlé les kleptocrates qui nous dirigent – une bande des mafiosi – et secoué l’illégalisme public ambiant dans notre pays.
Je comprends pourquoi le secrétaire général de PPRD, toute honte bue, affirme que « bord oyo eko die te ». Il s’agit d’une grave dérive tyrannique et le peuple congolais devrait tout faire pour chasser cette bande du pouvoir car, en effet, les questions posées sont donc infiniment complexes.
Reste néanmoins que la société civile et l’opposition au régime de Joseph Kabila manifestent leur colère face à l’immensité du cynisme qui défigure les bonnes consciences.
La RDC, notre pays, est aujourd’hui menacée par toutes les plaies d’Egypte : la course effrénée à l’argent facile, la médiocrité est devenue l’alpha et l’oméga de ceux qui s’enrichissent et veulent rester au pouvoir à n’importe quel prix même s’il faut tuer, ils tuent et se comportent sans égard aux normes éthiques et à la morale républicaine.
Culottés, ils démentent et musèlent les citoyens au nom de la défense de leurs intérêts. Face à cette sinistre farce, où est l’ordre des avocats, des magistrats, des auxiliaires de la justice, des nouveaux désobéissants ? Qu’ils se lèvent pour protéger notre patrie au lieu de léguer aux générations futures autre chose qu’une humanité en lambeaux. Le droit doit être leur allié et leur bouclier. C’est le sens de mon appel. Le moment est arrivé d’appliquer l’article 64 de la constitution et il n’y a pas de minutes à perdre et Chantal Ramazani Wazuri a montré le chemin de désobéir aux lois injustes. Albert KABONGO, Mentor de la Galaxie des Patriotes Congolais