Au moins 19 morts à Beni dans une attaque attribuée aux rebelles ougandais. La série noire continue dans la région, où l’armée congolaise et les casques bleus de la Monusco peinent à juguler les attaques rebelles.
Depuis octobre 2014, les environs de la ville de Beni, dans le Nord-Est de la République démocratique du Congo (RD Congo) sont le théâtre de massacres d’une rare violence. Les attaques se déroulent souvent selon le même mode opératoire : la nuit, à l’arme blanche, à la machette ou à la hache. Les autorités congolaises attribuent ces violences aux rebelles ougandais des « Forces démocratiques alliées » (ADF). Ce conflit de basse intensité, qui passe en dessous des radars médiatiques a fait plus de 900 victimes et 180.000 déplacés en quatre ans.
Quatre ans d’impuissance
Ce week-end, la derrière attaque en date, s’est une nouvelle fois déroulée à Beni, cette ville moyenne du Nord-Kivu, dans la nuit de samedi à dimanche. Le premier bilan fait état d’au moins 19 morts, dont 5 militaires. Selon des témoins cités par des médias congolais, les rebelles se seraient déguisés en militaires afin d’attaquer des positions de l’armée régulière congolaise. La dernière attaque attribuée aux ADF remontait au mois de mai dernier et avait fait 10 morts… tous civils.
Ces tueries à répétition, extrêmement violentes, exaspèrent la population, d’autant que les autorités congolaises et les casques bleus de l’ONU, présents dans la zone, semblent totalement incapables d’arrêter les massacres. Mais ce qui inquiète, c’est le relatif flou qui plane autour de la rébellion des ADF. Ce groupe rebelle ougandais, présent depuis plus de 20 ans au Congo, a abandonné petit à petit sa lutte contre le pouvoir de Kampala pour survivre de petits trafics et de rapine au Nord-Est de la RDC. Et ce qui interroge, ce sont les liens qui se sont tissés entre les rebelles et certains officiers de l’armée régulière.
… et d’impunité
Plusieurs enquêtes des experts des Nations unies et du Groupe d’Etude sur le Congo (GEC) ont pointé la responsabilité de l’armée congolaise, et principalement celle du général Muhindo Akili Mundos, comme complice et co-auteur de certains massacres de masse dans la région de Beni. Le GEC explique dans son rapport – à consulter ici – que l’armée congolaise aurait utilisé ce groupe armé contre un autre, afin de l’affaiblir. Le général Mundos « couvrait » ainsi les différentes tueries de masse perpétrés autour de Beni. Ce qui expliquerait l’impunité qui règne au Nord-Kivu, où les crimes n’ont jamais été punis. Depuis, Mundos a été muté en Ituri, puis dernièrement au Sud-Kivu, mais les experts estiment que ce haut gradé joue toujours un rôle important dans le Nord-Kivu voisin.
L’insécurité au Nord-Kivu reste révélatrice d’une situation sécuritaire qui n’a jamais été stabilisée depuis 20 ans en République démocratique du Congo (RDC). Et les ingrédients sont tous réunis pour faire de l’Est du pays, une cocotte minute toujours au bord de l’explosion. Une centaine de groupes rebelles sont toujours actifs dans la région, l’Etat est absent, l’armée, mal payée, reste faible et les casques bleus inefficaces. A trois mois d’une élection présidentielle aussi attendue qu’incertaine, ce regain de violence au Nord-Kivu n’annonce rien de bon. La société civile a décrété une journée ville morte à Beni ce lundi pour protester contre l’insécurité.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Merci beaucoup pour cet article qui donne une image claire du calvaire des populations de Beni a l’Est de la République Démocratique du Congo. Tant que toutes ces tueriies et autres graves et massives violations des droits humains resteront impunies, la paix a l’Est de la République Démocratique du Congo sera une utopie. On ne construira jamais la paix alors que l’injustice et l’impunité se portent en bonne santé .