Les négociations au Qatar et l’arrivée des Etats-Unis dans le cadre d’un possible accord de paix entre la RDC et le Rwanda rebattent les cartes pour la rébellion. Notamment pour l’AFC de Corneille Nangaa, qui pourrait se retrouver marginalisé dans cette sortie de crise.

L’histoire s’accélère à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) dans le conflit entre le Congo et les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda. À Doha, une rencontre inattendue a eu lieu entre les présidents congolais et rwandais le 18 mars, puis entre les rebelles du M23 et Kinshasa. Enfin, à Washington, une déclaration de principes a été signée le 25 avril entre la RDC et le Rwanda sous l’égide des Etats-Unis. Un texte évoque sans surprise l’aspect sécuritaire du dossier : préservation de l’intégrité territoriale des deux pays et « cessation de tout soutien aux groupes armés ». On pense évidemment à l’appui rwandais au M23 et à la « collaboration » de l’armée congolaise avec les FDLR, un groupe inspiré d’anciens génocidaires hutu, hostiles à Kigali. Des engagements qui n’ont jamais été respectés lors des différents rounds de négociations sous médiation africaine, à Nairobi, Luanda ou Dar es Salam.
Minerais contre sécurité
La deuxième partie de cette déclaration de principes est plus surprenante et signe une nouvelle approche dans la résolution du conflit. Elle prévoit un partenariat économique et minier entre les deux pays et signe l’arrivée impromptue d’un nouvel acteur : les Etats-Unis de Donald Trump. Ce volet économique acte la souveraineté de la RDC sur ces ressources minières et un partenariat avec le Rwanda voisin sur le transport et la transformation des minerais. Des entreprises américaines y seront également associées. Dans la délicate équation d’un possible accord de paix entre la RDC et le Rwanda, le partenariat économique entre les trois pays a été décisif pour faire entrer Donald Trump dans le jeu. Inspirée par le troc « minerais critiques contre sécurité » proposé par les Etats-Unis en Ukraine, la présidence congolaise a présenté le même projet à Washington : accès aux minerais contre protection américaine.
Gagnant-gagnant… vraiment ?
Kigali n’est pas en reste pour être dans les petits papiers de la nouvelle administration Trump, puisqu’elle se propose d’accueillir les migrants expulsés des Etats-Unis. Les trois pays semblent donc y trouver leur compte : la RDC en récupérant ses territoires sous contrôle rebelle, les Etats-Unis en se voyant ouvrir les portes de sites miniers, et le Rwanda en s’assurant l’exportation et la transformation des minerais. Il y a pourtant de nombreux bémols à ce projet d’accord. Pour la RDC, tout d’abord, qui ne se voit attribuer qu’un simple rôle de fournisseur de minerais. « Un bradage des ressources naturelles » selon l’opposition. Les Etats-Unis ensuite, qui devront se frayer une place au milieu des nombreux autres groupes armés de la région, mais aussi au milieu des nombreuses entreprises minières chinoises, très implantées au Congo.
Un accord au détriment de l’AFC-M23
Un autre acteur pourrait être perdant dans ce nouveau deal « business contre territoires » entre la RDC et le Rwanda, c’est l’AFC-M23 de Corneille Nangaa. La rébellion s’est toujours déclarée « non-concernée » par les décisions prises entre Etats, comme cela a été le cas à Luanda, Dar Es Salam ou Doha. Mais l’arrivée des Etats-Unis et un possible accord assorti d’un deal minier change la donne. Ce très virtuel accord pourrait se faire au détriment de l’AFC-M23, qui devrait rendre les territoires conquis sans bénéficier du deal minier. La rébellion cherche donc le moyen de se faire une place entre Kinshasa, Kigali et Washington, au risque de se voir marginaliser. Tout comme le M23, les groupes armés Wazalendo affichent également leur hostilité à une simple résolution du conflit entre Etats. Si le conflit a bien une dimension régionale, il a aussi une dimension locale, où il faudra bien trouver une porte de sortie pour l’AFC-M23, et les groupes armés supplétifs que Kinshasa a enrôlé auprès de l’armée congolaise.
… et le M23 reprend ses offensives
Le M23 a marqué une pause militaire en stoppant ses offensives pendant les discussions de Doha et l’entrée en jeu des Etats-Unis avec la visite de l’envoyé spécial américain Massad Boulos dans la région. En signe de bonne volonté, la rébellion s’est même retirée de Walikale pour laisser l’entreprise minière à capitaux américains, Alphamin, reprendre son activité. Mais l’accalmie aura été de courte durée, et devant l’annonce d’un accord entre la RDC et le Rwanda, sous l’égide de Donald Trump, le M23 a repris ses offensives au Nord, vers le lac Edouard, et vers le Sud, en direction d’Uvira. Des conquêtes de nouveaux territoires qui se font toujours sans résistance de l’armée congolaise.
L’AFC trop dépendant du M23
Le projet d’accord entre Kinshasa et Kigali constitue donc un tournant pour l’AFC-M23 de Corneille Nangaa. L’ancien président de la Commission électorale congolaise doit se positionner pour tirer les bénéfices des larges territoires administrés par la rébellion. Le patron de l’AFC se trouve dans une position très inconfortable, et reste trop dépendant du bon vouloir du M23 et de son parrain rwandais. « Le M23, qui a une branche politique et une branche militaire, est plus fort que l’AFC, qui est uniquement un mouvement politique. Corneille Nangaa a été poussé sur le devant de la scène pour congoliser le mouvement », estime le chercheur Josaphat Musamba, chercheur au GEC-SH/CERUKi ISP de Bukavu.
Nangaa absent à Doha
L’AFC de Corneille de Nangaa est arrivée tardivement dans la galaxie M23. Alors que les rebelles ont repris les armes fin 2021, c’est en 2023 que, depuis le Kenya, Corneille Nangaa lance l’AFC, avec à ses côtés Bertrand Bisimwa. « Les deux structures ne sont pas encore en compétition, ils ont construit ensemble leur discours de légitimation et d’explication de leur combat. Ils se sont nourris de leurs revendications respectives : la sécurité des Tutsi pour le M23 et des revendications de politique intérieure pour l’AFC. Mais il pourrait y avoir concurrence » suggère Josaphat Musamba. Signe qui ne trompe pas, c’est Bertrand Bisimwa qui était présent à Doha pendant les discussions avec les autorités congolaises, et non Corneille Nangaa. Dans la longue histoire des rébellions soutenue par Kigali, RCD, CNDP, M23… cela s’est souvent terminé par des scissions et des éclatements au sein de ces groupes.
Nangaa pro-dialogue
Alors pour se démarquer et se trouver une porte de sortie, Corneille Nangaa tente de ramener le conflit à un problème de politique intérieur et de mauvaise gouvernance. Son objectif : faire partir Félix Tshisekedi. Par la force ou par le dialogue. Corneille Nangaa s’est, en effet, arrimé au « Pacte pour la paix » porté par les Eglises catholique et protestante (CENCO et ECC). Ce dialogue inter-congolais est également soutenu par les principaux leaders de l’opposition politique : Martin Fayulu, Moïse Katumbi, Delly Sesanga, ainsi que l’ancien président Joseph Kabila. Un drôle d’attelage qui forme pourtant un front anti-Kabila qui pourrait déboucher sur une transition politique et un énième partage du pouvoir. On pense au fameux « 1+4 » (un président et quatre vice-présidents) mis en place en 2003 et qui intégrait les groupes armés dans les institutions politiques. Pour l’instant, l’option du dialogue interne est rejetée par Félix Tshisekedi, trop content d’avoir la possibilité de s’offrir un accord de paix avec le Rwanda sans remettre en cause de son pouvoir.
Une crise aux multiples acteurs
Fort de la pression militaire du M23, Corneille Nangaa tente de faire monter les enchères. En plus d’un dialogue inter-congolais, le patron de l’AFC demande l’amnistie, la récupération des biens confisqués des membres de la rébellion, ainsi que l’intégration dans l’armée et dans les institutions politiques de son mouvement. Avec le président du M23, Bertrand Bisimwa, Nangaa avait été condamnés à mort par le tribunal militaire pour « crimes de guerre, trahison et participation à un mouvement insurrectionnel ». Une chose est sûre, pour mettre fin à cette crise sécuritaire, il ne suffira pas d’un accord régional entre la RDC et le Rwanda, même sous médiation américaine. Un accord qui reste aujourd’hui très hypothétique. Il faudra prendre en compte l’ensemble de la centaine de groupes armés de la région et leur proposer de réelles alternatives à leur démobilisation. Enfin, il faudra que Kinshasa accepte de voir en face ce qui obère son développement depuis des décennies : la corruption, la prédation des ressources par les élites et la répression des oppositions.
Christophe Rigaud – Afrikarabia
Pourquoi, l’être humain, rsouvent, pérsiste dans ses erreurs d’analyse malgré le fait que les faits soientt visibles pour toute personne de bonne foi?
Si ce conflit se termine par un accord ou par des arrangements, quels sera les gagnants et les perdants:
Les gagnants
1. (a) La RDC et la Rwanda gagneraient la securité de leurs pays et la paix de leurs peuples. (b) les échanges commerciaux et les projets communs bénéficeraient de leur développement économique respectif dans un climat appaisé et pour le bien être des populations de la région.
2. Pour le M23, (a) les Tutsis congolais, par leur retour dans leurs terres et y trouver la quétudes – Oui les faits sont tétus, c’est leur région; (b) Le fait de ne pas être ciblés, brulés, tués et mangés serait une victoire de la vie sur la mort.
3. AFC, le fait d’obtenir place sur une la table où se termine l’avenir de leur pays, est un gain important – le fédéralisme serait l’objectif.
4. Les USA qui sécuriseraient leurs châines d’approvionnement en minerais stratégiques.
Les perdants: (a) Les Européens et surtout la Belgique qui sont allés vite à la gachette et au besogne. Ils risquent de s’auto exclure dans la prise de décision à ce qui a trait la région des grands lacs africains et de l’Afrique dans son ensemble. (b), Tous ces experts, consultants et journalistes occidentaux qui s’étaient élevés au rang de connaisseurs de la région et qui, par leur narrative, se penser capables de détermine l’avenir de cette région.