Après les violentes manifestations de janvier 2015 contre la loi électorale, l’opposition appelle à manifester ce mardi contre le « glissement » du calendrier électoral et pour la tenue de l’élection présidentielle en novembre 2016. Une mobilisation sous haute surveillance.
Mardi 15 septembre 2015 à 10h30, tous les yeux seront rivés sur la place Sainte Thérèse de Ndjili. Une trentaine de partis politiques de l’opposition réunis au sein la Dynamique de l’opposition manifesteront contre le glissement du mandat présidentiel qui expire, pour le président Joseph Kabila, le 27 novembre 2016. Selon la Constitution, le président congolais ne peut en effet pas briguer de troisième mandat. Mais l’opposition redoute un « glissement » du calendrier électoral qui accumule les retards et qui n’aurait d’autre objectif que de maintenir Joseph Kabila au pouvoir au-delà du délai constitutionnel.
Anti-Kabila
Du côté des revendications des manifestants, les slogans devraient tourner autour de la tenue d’élections « transparentes, apaisées et crédibles », avec notamment la fiabilisation du fichier électoral. L’opposition réclame, depuis les élections contestés de 2011, « l’enrôlement des nouveaux majeurs et des Congolais de l’extérieur », mais aussi le « nettoyage des doublons et des électeurs fictifs ». Mais qu’on ne s’y trompe pas, les slogans devraient également être très hostiles au président Joseph Kabila, que les opposants soupçonnent d’utiliser tous les subterfuges pour s’accrocher à son fauteuil. « 2016, non au glissement », ou le plus radical « Kabila dégage » devraient donc faire partie du cortège.
L’élection des gouverneurs reportée
Le « glissement » reste la grande crainte des opposants au président Congolais. La dernière décision de la Cour constitutionnelle fait redouter une révision complète du calendrier électoral, mettant en danger la tenue de la présidentielle et des législatives, comme prévues fin novembre 2016. Devant, les nombreux blocages institutionnels et le manque de moyens financiers, la Cour a exigé l’organisation des élections des gouverneurs des provinces récemment démembrées avant la tenue des élections provinciales d’octobre. Les élections des gouverneurs ayant été reportées sine die « faute d’argent », le calendrier électoral risque donc de s’en trouver modifié… et donc décalé – voir notre article.
« Au moins 42 morts » en janvier 2015
C’est dans ce contexte de tension politique, que la manifestation de mardi tentera de faire pression sur le gouvernement pour débloquer la situation. L’opposition demande la tenue d’une réunion tripartite (opposition, Commission électorale et majorité) pour trouver un calendrier consensuel, reporter certains scrutins et « sécuriser » la présidentielle pour novembre 2016. Pour atteindre cet objectif, l’opposition espère donc une forte mobilisation ce mardi à Kinshasa. Dans toute les têtes, il y a bien sûr les manifestations de janvier 2015, qui avaient fini par faire reculer le gouvernement sur la loi électorale, qui pouvait, elle aussi, faire « glisser » le calendrier électoral. Une « victoire » qui s’était tout de même soldée par une répression féroce des services de sécurité congolais : « au moins 42 morts » selon les ONG internationales – voir notre article.
Ouagadougou et Bujumbura dans toutes les têtes
Les Congolais descendront-ils dans la rue, au risque de se frotter à la police du tristement célèbre général Célestin Kanyama, ? Avant le « succès » des manifestations de janvier 2015, l’opposition avaient multiplier les meetings de protestation depuis l’automne 2014… sans grand succès. L’opposition espère donc que cette manifestation du 15 septembre ne sera que le début d’un mouvement plus profond : « il était temps de relancer la contestation populaire. Le « glissement » est déjà là et après, il sera trop tard » nous confiait un membre de l’opposition. Pour les autorités congolaises, cette manifestation sera placée sous haute surveillance. Le renversement express de Blaise Compaoré, le président burkinabé, est encore dans toutes les mémoires à Kinshasa. Le contre-exemple d’une répression féroce au Burundi, qui a d’ailleurs permis à Pierre Nkurunziza de se maintenir au pouvoir, pourrait également servir de « modèle ». Ce qui peut évidemment faire craindre des « bavures policières ».
Kinshasa « prend acte »
Dernière élément : la mobilisation de janvier 2015 avait pris de l’ampleur, après deux jours de forte contestation, lorsque les étudiants de l’Unikin sont entrés dans le mouvement. C’est à partir de ce moment-là que Kinshasa a pris peur et a décidé de couper l’accès aux téléphones portables et aux réseaux sociaux. La capacité de l’opposition à rassembler plus largement que leurs simples militants, constitue sans doute la clé de la manifestation de mardi. Pour le moment, Kinshasa fait le dos rond et le gouverneur de la ville de Kinshasa, André Kimbuta, a « pris acte de l’organisation de cette activité » et demande au « Commissaire provincial de la Police nationale de prendre les dispositions sécuritaires habituelles ». Pour l’instant, la Police congolaise a souvent eu « l’habitude » de sombrer dans la répression.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia
Je ne m’étonnerai pas de la façon dont la police va se comporte. Le Gouv Kimbuta a toujours été versatile a la dernière minute il va changer d’avis pour annuler l’autorisation. Allons voir tenons bon.