Pour la deuxième fois en sept mois, le quartier général de l’armée congolaise à Kinshasa a été attaquée ce mardi par des hommes armés « non-identifiés« .
Il y avait comme un goût de déjà vu à Kinshasa ce mardi 22 juillet 2014. Vers 14h un groupe d’une vingtaine d’hommes en armes s’est introduit dans le camp Tshatshi, la plus importante base militaire de Kinshasa, et quartier général de l’armée congolaise. Après une trentaine de minutes de fusillade, les forces de sécurité, qui avaient bouclé le quartier, ont pu maîtriser la situation et stopper les assaillants. Un premier bilan, avancé par une source militaire à la BBC, faisait état de 7 morts, dont 6 assaillants et 1 officier de la garde républicaine. Goût de déjà vu car il y a tout juste 7 mois, ce camp militaire avait été victime d’une attaque similaire. Le 30 décembre 2013, un groupe armé s’en était pris au camp Tshatshi, mais avait également visé le siège de la Radiotélévision nationale congolaise (RTNC) et l’aéroport international de N’djili, coûtant la vie à 52 assaillants et à trois membres des forces de sécurité (voir notre article).
« armés de couteaux et de machettes »
Comme en 2013, plusieurs questions se posent sur l’attaque d’un lieu aussi stratégique et protégé, en plein coeur de la capitale congolaise. Lors de la précédente attaque, le gouvernement avait présenté les assaillants comme des adeptes du pasteur Mukungubila. Concernant l’attaque de ce mardi, les informations sont encore confuses sur l’identité des attaquants. Selon les autorités congolaises, il s’agirait d’une « vingtaine de personnes habillées en civil et armées de couteaux et machettes ». Le gouverneur de Kinshasa, André Kimbuta a parlé d’un « groupe d’inciviques qui a tenté de créer de l’insécurité dans la ville« . Qui peuvent bien être ces hommes, armés de couteaux et de machettes, qui pensent pouvoir s’emparer d’un des lieux les mieux protégés de Kinshasa ?
Les « refoulés de Brazzaville«
Les autorités congolaises croient tenir une piste au sujet des assaillants. Pour André Kimbuta, il s’agirait « de refoulés de Brazzaville« , ces Congolais expulsés récemment du Congo voisin. Depuis la chute de Mobutu en 1997, Brazzaville est devenu le lieu de refuge des opposants congolais au régime de Kinshasa. Des anciens de la garde rapprochée du maréchal, mais aussi depuis quelques années, des proches du général Faustin Munene, lui aussi en délicatesse avec le régime congolais actuel et accusé de rébellion. Les rebelles Enyele de l’Equateur, en conflit avec une autre ethnie, mais aussi avec Kinshasa, ont eux aussi trouvé refuge au Congo-Brazzaville. Autant de pistes avancées par les autorités congolaises qui pourraient « coller » avec l’attaque de mardi.
Coup monté ?
Dans l’opposition on reste plus circonspect sur « ces attaques à répétition » dans des lieux stratégiques censés être protégés par l’armée et les services de sécurité. « Attaquer deux fois le camp Tshatshi en 7 mois avec des machettes, ce n’est pas commun ! » entend-on à Kinshasa. Dans une capitale ou les rumeurs vont bon train, certains croient à « un coup monté » par le pouvoir et parle de « divertissement du régime« . C’est le cas de Roger Lumbala, du RCD/N, proche des ex-rebelles du M23 qui affirme que cette attaque a été montée « pour distraire les Congolais« . Du côté de l’Apareco d’Honoré Ngbanda, ancien responsable de la sécurité du maréchal Mobutu et visé (implicitement) par les déclarations d’André Kimbuta, cette attaque a été créee de toute pièce pour permettre l’arrestation de militaires congolais et opérer « une épuration » au sein de l’armée. Des proches de Ngbanda, dont certains sont à Brazzaville, ont été récemment amnistiés par Kinshasa pour faits insurrectionnels. Pour l’Apareco, le pouvoir tente une « purge » chez les forces armées congolaises afin d’éliminer les éléments les plus critiques envers le régime du président Joseph Kabila.
Une seule chose est sûre pour le moment : on sait très peu de chose sur l’attaque du camp Tshatshi de ce mardi… alors que la lumière n’a toujours pas été faite sur celle du 30 décembre 2013.
Christophe RIGAUD – Afrikarabia